Réserve de Scàndula

L’État est irresponsable !

La réattribution du diplôme européen perdu par la Réserve de Scàndula devant le Conseil de l’Europe demande que des mesures soient prises pour rassurer les experts européens sur les moyens aptes à garantir la préservation des paysages, de la richesse en biodiversité marine et terrestre, ainsi que la surveillance continue de ce patrimoine exceptionnel, un des plus fameux de toute la Méditerranée. Or l’État continue dans sa politique aberrante qui refuse toute évolution dans le sens de la protection du site. Un comble !

 

 

Il faut bien mesurer l’absurdité de la situation. Le Préfet maritime l’exprime dans un courrier adressé aux ministres Barbara Pompili, Ministre de la Transition écologique, et Bérangère Abba, Secrétaire d’État à le Biodiversité, quelques jours après que nous l’ayons rencontré à la Préfecture maritime de Toulon, Michèle Rivasi et moi-même, le 22 mars 2021.

Nous lui avons notamment demandé d’édicter une interdiction de mouillage dans la réserve, particulièrement sur les herbiers de posidonie dont les scientifiques du Conseil Scientifique de la Réserve ont déploré la perte importante de sa qualité, alors qu’il était à l’origine un des plus beaux de Méditerranée.

Le Préfet maritime a opposé que le décret tel que rédigé en 1975 lui interdisait de prendre une telle mesure. Dans le même temps, il nous informait de son intention d’instaurer une telle interdiction, pour les navires de plaisance les plus grands, dans tous les herbiers de posidonie du littoral français, de Menton en Provence à Collioure en Catalogne, et sur tout le pourtour de la Corse… à l’exception de la réserve de Scàndula !

Nos protestations face à ce « grand n’importe quoi » ont reçu son assentiment, et il a promis d’intervenir auprès des ministres concernés pour modifier l’arrêté de 1975 afin d’en finir avec cette situation absurde. Ce qu’il a fait par un courrier en date du 13 avril 2021, adressé à « Madame la ministre de la Transition écologique et à Madame la Secrétaire d’État à la Biodiversité ».

 

Le Préfet maritime : « l’article 18 du décret de création de la réserve (décret n°75.1128 du 9 décembre 1975) édicte la liberté de navigation, limitant le pouvoir du Préfet maritime à l’encadrement de la vitesse de navigation des embarcations y transitant (…)

Le 22 mars dernier, j’ai reçu les députés européens M. François ALFONSI et Mme Michelle RIVASI, venus plaider la mise en place d’une réglementation sur le mouillage des navires dans la réserve marine de Scandola afin de protéger les herbiers de Posidonie et contribuer ainsi à une réattribution du diplôme européen.

En l’état, je leur ai indiqué ne pas être en mesure de mettre en œuvre, au sein de la Réserve de Scandola, une réglementation de la navigation et du mouillage visant à préserver l’herbier de posidonie et à réguler la fréquentation dans le but de préserver la population des balbuzards.

Cette situation génère une forme d’incompréhension parmi les usagers de la mer et les élus de ce secteur protégé, alors que les dispositifs de régulation du mouillage et de protection des herbiers de posidonie sont parallèlement mis en œuvre sur la façade Méditerranée.

Ainsi, à court terme, l’ensemble des côtes de la Corse sera soumis à ces mesures de gestion des mouillages et de protection des herbiers de posidonie, sauf les secteurs compris dans le périmètre de la réserve de Scandola, ce qui constitue un paradoxe.

Compte tenu de cette situation et du besoin impérieux d’y réglementer la navigation ainsi que le mouillage, je vous propose de prendre une mesure d’urgence consistant à abroger l’article 18 du décret n° 75-1128. »

 

« Paradoxe » : le Préfet maritime a le sens de la formulation et de l’euphémisme. En fait, on nage en pleine aberration et en pleine incompétence. Cette demande d’interdiction totale du mouillage dans la réserve de Scàndola, nous l’avons demandé de longue date, notamment lors d’une réunion à distance avec la Secrétaire d’État Bérangère Abba le 17 novembre 2020. Malgré nos relances, nous n’avons obtenu aucune réponse.

Nous l’avons formulé à nouveau au Préfet maritime, qui s’en est fait le relais à son tour.

Mais, alors que l’été commence pour la nouvelle saison de plaisance, alors que la période de reproduction des balbuzards est en cours et va durer jusqu’au début du mois d’août, il n’y a toujours rien de fait.

 

Le Préfet maritime conclut ainsi : « Cette modification rapide du décret pourrait également constituer une première étape visant à rassurer, et permettre aux acteurs locaux de réengager le dialogue avec le secrétariat de la Convention de Berne en charge de la délivrance du diplôme européen. »

Qui pourra un jour nous expliquer pourquoi rien n’a été encore fait dans ce sens ?

Pour notre part, avec Michèle Rivasi, nous comptons saisir le Commissaire Européen à l’Environnement pour qu’il intervienne contre cette attitude de non-assistance à patrimoine naturel menacé. •

François Alfonsi.