Quel est l’impact réel des résidences secondaires sur les territoires ?

Les résidences secondaires en débat

C’est l’objet de l’étude comparée qui a été présentée le mercredi 6 septembre à l’Università di Corsica. Cette étude réalisée par Arritti et le Peuple Breton, et soutenue par la fondation de l’Alliance Libre Européenne (Le centre Maurits Coppieters), s’intéresse au phénomène de résidentialisation dans les régions périphériques de l’Union Européenne.

 

Les régions dites périphériques comme la Bretagne, la Corse, la Pays de Galles ou Mallorca ont en commun de subir de plein fouet les conséquences de cette économie résidentielle. Fort impact sur l’environnement, pression foncière et immobilière, perte de repères culturels et sociaux … et ils sont d’autant plus impactant qu’ils touchent des peuples mis en minorités sur leur propre terre et dont la culture et la langue sont souvent en danger.

 

Cette étude que nous avons conduite a été réalisée sous forme de contribution de différents auteurs et d’interviews d’acteurs, universitaires, économistes, architectes ou encore politiques. Le but étant de faire connaitre les spécificités de chaque territoire mais aussi les points communs et de mettre à jour les solutions pour y remédier.

 

Le professeur Yves Lebahy agrégé de Géographie et ancien Président des Géographes de Bretagne, décrypte le phénomène :« Alors que l’activité touristique a un effet ponctuel dont peuvent tirer profit éventuellement et partiellement les populations autochtones, la résidentialisation a des effets fortement négatifs quand elle s’exprime à grande échelle sur certains territoires dans une « logique minière » incontestable. »

 

Gaël Briand, coauteur de l’étude et rédacteur en chef du Peuple Breton, considère que « les régions comme la Bretagne voient les résidences secondaires se multiplier et cela est considéré comme quelque chose de bénéfique pour le territoire, alors qu’en Corse, il y a une vraie vision politique, des propositions tels que le statut de résident ou encore la recherche d’évolutions statutaires pour pouvoir mettre en place une fiscalité adaptée. Si la Corse réussie, ce sont toutes les régions de France qui pourront en bénéficier. »

 

L’appel est lancé et il n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd, avec la présence attentive du Président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, de la Présidente de l’Agence de Tourisme de la Corse, Nanette Maupertuis, celle de Fabiana Giovannini, Présidente de l’Agence d’Urbanisme et de l’Energie et Jean-Christophe Angelini, Président de l’Adec et de l’Office Foncier.

 

Ce dernier avait alors été une des personnes interviewées en 2015, notamment sur la situation de Porto-Vecchio, où il est conseiller municipal d’opposition. Son constat est aujourd’hui toujours aussi amer : « Il y a une perversion de l’acte de construction, les prix vont toujours en augmentant et la part du non marchand progresse. L’urbanisme est clairement sur un modèle résidentiel, il y a un phénomène de contamination, on est face à un problème de société, de civilisation toute entière ».  Concernant les perspectives à venir, Jean-Christophe Angelini assure que « sans les compétences fiscales et sans adaptation réglementaire nous permettant de faire nos propres lois, nous manquerons de leviers fiscaux et réglementaires. Le statut de résident, la cooficialité, ou encore le foncier mais qui sont soumis à un processus de nature constitutionnelle, sont les objectifs politiques à atteindre. »

 

Le débat s’est avéré riche et constructif de par la présence de personnalités engagées comme des représentants de la Ligue des Droits de l’Homme, de l’association I Chjassi di u Cumunu, des universitaires, les assistants du député Paul-André Colombani, des maires, des agents du Parc Naturel Régional de la Corse, des élus de l’Assemblée de Corse, des militants, des étudiants etc…

 

La réflexion a tourné autour des solutions qui pouvaient être envisagée pour réguler et maîtriser les effets pervers de ce modèle résidentiel. L’étude du CMC recense quelques pistes, la première étant la volonté politique de s’emparer du sujet ! En premier lieu, on peut citer les programmes immobiliers réservés aux primo-accédants assortis d’une clause de non-vente durant plusieurs années. Le Peuple breton de l’été 2016 évoquait d’ailleurs le cas de la commune de St Ives, en Cornouailles qui a voté contre la construction de nouvelles résidences secondaires. Il faut dire qu’en 2015, on comptait en Cornouailles (Grande Bretagne) 24 2213 résidences secondaires. Le gouvernement cherche à contourner ce référendum local car ils ont peur de la contagion. Suivent les quotas (taux maximum de résidences secondaires) et autres programmes spécifiques visant à limiter la construction ou l’acquisition de résidences secondaires.

 

Il existe bien sûr la taxation, mais cela n’est pas toujours simple. Cela pose la problématique de la succession patrimoniale et interroge la fiscalité au sens large. Plus anecdotique, en Bretagne, l’Union démocratique bretonne avait proposé une taxation audiovisuelle non plus seulement dans les résidences principales, mais aussi dans les résidences secondaires afin de financer l’émergence d’une télévision régionale qui, aujourd’hui, fait défaut. Ainsi, la « consommation du territoire » participerait à minima au développement d’activités économiques productives et utiles, à la culture notamment.

 

Ici, l’Assemblée de Corse s’est prononcé favorablement pour le statut de résident mais sa mise en œuvre ne sera rendue possible qu’après modification constitutionnelle. Le combat politique reste donc plein et entier pour changer de modèle de société qui pèsera durablement sur notre territoire et notre peuple si nous ne nous mobilisons pas.

 

Arritti

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