Un annu dopu cù Ghjuvanni Biancucci

Notre série «Un annu dopu » est consacrée cette semaine à certainement le plus expérimenté des élus à l’Assemblée de Corse. Président du Groupe Femu a Corsica, Président de la Commission des Finances, Président du Conseil de Surveillance d’Air Corsica, Vice-président de la CAPA et Maire de son village Cùtuli Curtichjatu, où il travaille comme artisan coutelier, Ghjuvanni Biancucci est un briscard du nationalisme. Engagé depuis le début des années 60, il a été de tous les combats de la Lutte de Libération Nationale jusqu’aux années 90 qui marquent les premiers pas des politiques d’Unione avec le mouvement autonomiste, puis aux évolutions qui porteront les deux tendances historiques à se rapprocher définitivement pour bâtir l’alternative au système clan qui a mené à la victoire. Bien qu’élu depuis 2004 à l’Assemblée de Corse, comme l’ensemble de la majorité territoriale, il doit aujourd’hui faire l’apprentissage de la prise de responsabilités.

Arritti hà raccoltu u so sìntimu.

Site frà l’eletti i più spirimentati di l’Assemblea di Corsica… chì ne dite di ssa mandatura ?

Hè di sicuru a più diffìciuli dipò u 1982.

Hè troppu à l’accortu : dui anni, hè scabrosu è ci ani lasciatu i finanzi à l’abbottu.

Hè a prima volta ind’a storia dipoi u 1768, chì i naziunali sò à u cumandu di l’istituzioni. Certi pinsavani chi avariami difficultà pà ghjestiscia a CTC ma a u cuntrariu avemi fattu una bedda dimustrazioni è l’acquistu hè tamantu.

Les élus de la majorité par contre sont tous, à quelques exceptions près, assez « nouveaux »… voire inexpérimentés… en tant que président, comment organisez-vous le travail au sein du groupe Femu a Corsica ? Et entre les deux groupes nationalistes ?

Nous avons passé les premiers mois que l’on pourrait qualifier de rodage.

Aujourd’hui notre groupe est plus opérationnel.

Nous nous réunissons la veille de la réunion des commissions organiques (finances, économie, culture), systématiquement la veille des sessions.

Nous nous consultons régulièrement et autant que de besoin. L’idée que chacun peut porter un ou deux dossiers est très bien intégrée. Il faut bien sûr y ajouter notre participation nombreuse et active aux différents Offices, Agences et organismes divers.

Pendant des décennies, à l’Assemblée et ailleurs, nous avons joué en attaque, en pratiquant un harcèlement permanent.

Cela n’a jamais été simple et a nécessité un investissement et une attention de tous les jours. Aujourd’hui, il faut jouer en défense et j’ai le rôle de capitaine et d’arrière central, de sentinelle aussi.

Le groupe se porte de mieux en mieux, et j’en veux pour preuve la dernière session.

Nous travaillons de concert avec Corsica Lìbera, nous avons rarement des divergences. Je veux parler aussi bien du fond des dossiers que de la dimension tactique. À ceux qui nous prédisaient une union précaire et difficile, nous avons répondu par la capacité de dépasser nos différences, par la maturité politique et le sens aigu des intérêts majeurs de notre pays.

L’entente est excellente et notre soutien envers l’Exécutif est sans faille. S’ella dura, fà virdura !

 

La majorité territoriale a tout affronté depuis décembre 2015. Elle a hérité d’un passif de gestion désastreuse, a dû faire face à une actualité lourde, depuis Les Jardins de l’Empereur à l’affaire de Siscu, en passant par celle de Reims, les intempéries catastrophiques ou encore les condamnations qui pendent au nez de la CTC avec les fameux 89M d’euros qu’elle pourrait devoir rembourser…

comment le groupe soutient-il l’Exécutif ?

Tout ou presque est résumé dans cette question. Nous avons pris la direction des affaires de la Collectivité Territoriale dans la pire des situations depuis la création du statut particulier en 1982.

Point n’est besoin d’en rajouter, le cumul des gestions antérieures pèse lourdement. Cela a été particulièrement mauvais et désastreux avec, on le sait, « le pompon » pour la mandature Giacobbi- Bucchini.

En passant, et en dehors de tous les problèmes que l’on a connu, nous devons endosser non seulement les 98 M d’euros de passif, les 7M d’euros dus par Cofremar aux entrepreneurs corses et les 19M d’euros des Agences et Offices (dont 8 rien que pour l’office de l’Environnement) qui s’ajoutent aux désastreux emprunts toxiques de 2008 (107M d’euros) qui ont produit un solde de 295M d’euros !, auxquels risqueraient de s’additionner aujourd’hui 89M d’euros comme pénalité de mauvaise gestion de l’Office des Transports de la Corse.

De plus, c’est vrai, l’actualité n’a pas été simple. Mais, ne dit-on pas que c’est dans la tempête que l’on apprécie les grands capitaines !

 

Comment jugez-vous les résultats de l’Exécutif après un an à exercer des responsabilités ?

Mon avis est que les choses vont bien et l’Exécutif est largement à la hauteur de la situation. Beaucoup de bon sens, de compétences, une stratégie claire, alliée à une technicité affirmée.

Finances, transports, économie, culture, foncier, environnement, agriculture…

chaque domaine montre une réelle volonté d’aboutir.

 

Il ne faut cependant pas se couper du terrain… Or on ressent le reproche de l’extérieur que les nationalistes s’institutionnalisent, oublient les fondamentaux… votre opinion ?

Cela est vrai, mais il faut comprendre que jusqu’à présent notre effort a été porté sur l’investissement nécessaire au niveau des institutions. Habiter la collectivité et être habitée par elle n’est pas une petite affaire. De plus, notre rôle a changé.

Ceci dit, il faut dans les mois qui viennent organiser doublement Femu a Corsica, à la fois sur le terrain (rughjoni) et au plan des sensibilités politiques.

De plus, des échéances électorales arrivent et nous devons être prêts et opérationnels.

L’heure est venue de mettre en forme notre Démarche. Envisager une assemblée générale au printemps me paraît raisonnable.

Avec des nationalistes dans l’opposition ou dans la majorité, avec ou sans violence, l’Etat ne cède pas un pouce de terrain sur nos revendications essentielles. Comment parvenir à se faire entendre ?

J’ai peur qu’une fois de plus, démonstration est faite que l’Etat français se préoccupe peu des « bonnes paroles et des votes de majorité ». Même si nous sommes entendus et compris, par certains hommes et femmes politiques français, le dialogue est difficile avec l’Etat.

Pour notre part, nous continuerons à proposer, argumenter, revendiquer, mais il est à craindre que si le blocage perdure, progressivement la situation ne s’aggrave. Il faudra alors reconsidérer la stratégie et faire éventuellement appel au peuple (manifestation, mobilisations, actions de terrain…)

L’autonomie voire l’autodétermination sont encore loin mais ce sont des combats que nous ne pouvons perdre.

 

Quand est-ce que les mouvements nationalistes vont parler des législatives ? Mis à part la multiplication des candidats à la candidature, on ne comprend pas bien quelle va être la stratégie… simple rôle de représentation ou conscience qu’une nouvelle étape peut être franchie ?

Les discussions ont commencé à notre échelle. Elles se poursuivent. Nous devons en assumer la responsabilité pleinement et entièrement.

Pour ma part, mais je crois que beaucoup partagent cette vision, il faut que nous ayons des candidats susceptibles non seulement de capitaliser notre électorat mais aussi de pouvoir bénéficier du capital de sympathie qu’a Pè a Corsica.

 

Côté Femu a Corsica, quelles sont les procédures de désignation ? Dans quels délais ?

Ce sont on le sait, des procédures rodées et connues parce qu’habituelles. Les responsables, les élus, les militants représentants les différentes sensibilités doivent se réunir sous peu. Quoiqu’il en soit, nous devons avant le mois de mars avoir désigné nos candidats.

Dois-je ajouter que pour moi, il ne peut y avoir que des candidats d’union (Femu et Corsica Lìbera) ?

 

La Collectivité Unique : le point de vue de Jean Biancucci ?

Pour être simple : la Collectivité unique ne répond que partiellement à notre demande. Les travaux entrepris dans le cadre de la Commission des Compétences Législatives et Réglementaires envisageaient à la fois de supprimer les Conseils généraux mais aussi d’acquérir des compétences nouvelles et des alternatives à la spéculation foncières et immobilières (statut de résident ou pas). Une restauration des finances publiques en termes de ressources, l’officialité de notre langue…

Aujourd’hui, c’est vrai le compte n’y est pas. Malgré tout, avec la disparition des Conseils départementaux, la Corse peut rentrer dans le IIIème millénaire.

 

Vous êtes aussi le président d’Air Corsica. Un outil que vous connaissez bien pour avoir souvent blâmé les politiques aériennes par le passé. Comment ça se passe du côté des responsabilités ? C’est plus compliqué ou bien vous pouvez enfin agir ?

Cette question mérite de longs développements car le sujet est complexe, néanmoins je veux bien essayer de donner un début de réponse…

Air Corsica est une Société d’Economie Mixte « formatée » par le service public et qui a répondu avec sérieux au rôle qui lui est imparti dans le cadre de la Délégation de Service Public et des Obligations de Services Publics définies par l’Office des Transports. Ce travail doit être poursuivi, et si, par ailleurs, une politique de réduction des coûts doit être mise en oeuvre, il est envisagé un déploiement sur le marché concurrentiel. Cela se fera avec la plus grande prudence. Pour donner un exemple, Bruxelles, dès la fin du mois de mars, sera ouvert à 39 €. La politique commerciale est en plein développement.

Bien sûr, d’autres destinations sont à l’étude, en cohérence avec l’Office des Transports et l’Agence du Tourisme de la Corse.

Nous travaillons aussi de concert avec les Chambres de Commerces. Air Corsica se porte bien et envisage

l’avenir avec sérénité.

 

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