Philippe Lamber ts sur RCFM. Extraits...

« La France est la dernière monarchie exécutive en Europe »

RCFM, Pierre-Louis Sardi : Vous avez rencontré les élus de la majorité territoriale, que ressort-il de vos échanges ?

 

Philippe Lamberts : D’abord un accueil chaleureux, c’est vrai que c’est une caractéristique je pense, à peu près dans tous les coins de France, les Belges sont bien accueillis dans ce pays, en particulier en Corse. On vient d’un pays multiculturel et cette dimension de diversité culturelle est évidemment très prégnante ici en Corse. J’ai un sentiment aussi d’une certaine tristesse de voir comment, après des années de violence, on a maintenant une situation politique dans laquelle les nationalistes sont majoritaires et qui font le choix du dialogue pour trouver une solution durable à l’existence de la Corse au sein de la République, mais que cette ouverture, cette main tendue rencontre, en fait, une paire de baffes, si on voit la manière dont Emmanuel Macron a traité les responsables politiques corses lors de sa visite ici au début de l’année. Je ne peux interpréter ça vraiment que comme une paire de claques publiques. Autrement dit, Emmanuel Macron a un jour parlé des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien, on a l’impression qu’il veut faire comprendre aux Corses qu’ils sont plutôt dans la deuxième catégorie. Cela me heurte évidemment pour un démocrate, surtout quand on vient d’un État fédéral.

 

Comme la Belgique ?

En Belgique, oui, on vit dans un État fédéral où bien sûr l’État central a un rôle à jouer, des responsabilités importantes, pas seulement dans les fonctions régaliennes, mais également pour gérer la Sécurité sociale par exemple. Mais il y a également des compétences très importantes qui sont dévolues aux entités fédérées, en l’occurrence ce que l’on appelle chez nous les « régions et communautés ». Pour nous, la répartition des pouvoirs, le fait que l’État central n’a pas toutes les compétences est naturel. Si vous allez en Allemagne, c’est la même chose. C’est pourquoi, dans cette perspective, les revendications des nationalistes corses nous semblent relativement modestes. Pourtant, le peu qu’ils demandent est traité comme inacceptable par l’État central en France.

 

Pour vous, Emmanuel Macron n’est pas le girondin qu’il dit être ?

Évidemment non ! C’est un jacobin de chez jacobin, je dirais même que c’est un bonapartiste ! C’est d’abord un autocrate, donc un monarque, certes élu, néanmoins tout procède de lui. C’est ça qui est le plus choquant pour un démocrate. Quelque part, la France est la dernière monarchie exécutive en Europe. Bien sûr, on peut se dire qu’en Hongrie, le premier ministre Orbàn détient également tous les pouvoirs, mais en France tout procède du monarque élu. Je rappelle encore l’épisode assez marquant lorsque nous recevions le ministre des Finances allemand et français, Wolfgang Schäuble et Pierre Moscovici à l’époque, pour nous parler au parlement européen de l’avenir de la zone euro, nous avions Schäuble qui nous faisait part de sa vision et Pierre Moscovici qui nous disait « le président Hollande pense que », « le président Hollande a l’intention de », « le président Hollande souhaite que », autrement dit, il était le vecteur de la parole royale.

On voit bien la différence. Visiblement cette époque-là a été renforcée par le pouvoir très personnel d’Emmanuel Macron.

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