Femu a Corsica

Le courrier de Gilles Simeoni aux militants

Lettre Femu juin 2018

 

 

Bastia, venneri u 22 di ghjugnu 2018

Cara amica,

Caru amicu,

Je souhaite m’adresser par cette lettre à chacune et à chacun des 1.500 militantes, militants, responsables politiques, et élus, qui, le dimanche 15 octobre 2017 à Corti, ont décidé, par un vote solennel, d’acter la naissance de Femu a Corsica.  Je l’écris en tant que militant, et non en qualité de Président du Conseil exécutif de Corse : cette fonction impose en effet de se tenir à distance des enjeux de partis, sauf à ce que nous options pour un mode de fonctionnement à l’anglo-saxonne, où le chef du Gouvernement est aussi le dirigeant du principal parti de la majorité.

Je l’écris aussi en ma qualité de responsable politique ayant participé à la réunion de Corti précitée, et pour rappeler les enjeux, à un moment où la Corse s’apprête à entrer dans une séquence politique importante.  Nous avons donc créé ensemble, à l’occasion de l’Assemblée Générale constitutive du 15 octobre 2017, Femu a Corsica, né de la fusion des anciennes structures Inseme per a Corsica, PNC, et Chjama, et de l’adhésion de centaines de femmes et d’hommes n’ayant jamais appartenu à aucune de ces trois structures.

Cette Assemblée Générale de Corti a été un moment fondateur, reposant sur un engagement solennel.

Par notre vote unanime, nous avons non seulement décidé entre nous, mais aussi acté devant tous les Corses, la disparition irréversible de nos anciennes structures, et la naissance de Femu a Corsica.

Nous avons, ensemble, solennellement réaffirmé les deux piliers indissociables sur lesquels repose Femu a Corsica :

la fidélité intangible aux fondamentaux de la lutte du peuple corse, un idéal au nom duquel des générations de femmes et d’hommes se sont engagés depuis des décennies ;

la volonté de s’ouvrir à toutes celles et ceux qui se reconnaissent désormais dans cet idéal et veulent s’engager pour construire une Corse démocratique, émancipée, et apaisée.

Nous avons également, par le vote toujours, doté Femu a Corsica de statuts, d’une charte éthique, et d’une motion d’orientation politique.

Nous avons décidé que les militantes et militants de Femu a Corsica seraient toutes et tous à égalité de droits et de devoirs, qu’ils aient appartenu à une des trois organisations ayant fusionné ou qu’ils soient de nouveaux militants.

Nous avons enfin désigné une Coordination chargée d’organiser une nouvelle Assemblée Générale dès le début de l’année 2018.

Le respect de ces engagements et de ce calendrier sont, à l’évidence, un impératif moral et politique.

D’abord parce que le vote du 15 octobre 2017 nous engage toutes et tous, individuellement et collectivement.

C’est en effet, par exemple, au nom de Femu a Corsica, et non d’Inseme, du PNC, ou de la Chjama, que nous avons conclu avec nos partenaires de Corsica Libera l’accord stratégique « Pè a Corsica », et pris la décision d’une liste commune dès le premier tour.

C’est aussi au nom de Femu a Corsica, et non d’Inseme, du PNC, ou de la Chjama, que nous avons convaincu des milliers de Corses de nous rejoindre par leurs actes et leur adhésion militante, et des dizaines de milliers supplémentaires de nous soutenir par leur vote.

 

C’est enfin pour représenter Femu a Corsica, et non Inseme, le PNC, ou la Chjama que les candidates et les candidats sur la liste des territoriales ont été élus.

La réapparition des anciennes structures serait donc, à l’évidence, un manquement et un recul par rapport aux engagements pris.

Elle serait aussi une régression par rapport aux enjeux qui sont face à nous.

Nous rétracter sur les sigles ou les logiques d’appareil serait une erreur politique, et conduirait à décevoir de nombreux Corses qui nous ont fait confiance.

Comme serait une erreur de transposer, au sein de Femu a Corsica, des rapports de force ou des tendances construits sur les anciennes appartenances ou les anciennes structures.

Cela n’atténue en rien l’exigence de débat interne qui nous anime tous : tout sujet qui pose problème, difficulté, ou simplement question doit bien sûr pouvoir être abordé au sein de Femu, y compris par exemple ceux relatifs à la recherche d’une meilleure articulation entre les élus et les militants et territoires, ou la possibilité de regard critique ou différencié du mouvement sur tel ou tel dossier.

C’est d’ailleurs précisément la diversité des opinions au sein du mouvement qui est garante du pluralisme interne, le pluralisme du nationalisme de façon générale étant par ailleurs, et c’est une bonne chose, assuré.

 

C’est donc au sein de Femu a Corsica, et sur la base de débats internes à venir et non à travers une logique de regroupement liée au passé militant que seront entre autres formés ou modifiés nos choix sur :

– le mode de gouvernance, qui devra permettre à chacun de se sentir pleinement reconnu et représenté ;

– la revendication institutionnelle, le contenu de l’autonomie, ou le concept d’autodétermination ;

– les relations au sein de « Pè a Corsica » ou les rapports avec les autres forces politiques nationalistes et non nationalistes ;

– la doctrine économique et sociale et le positionnement sur les questions de société ;

– la préparation des futures échéances électorales ;

– la stratégie par rapport à l’Etat.

 

Des débats qui seront, si nécessaire, tranchés, comme dans toute organisation démocratique, par le vote des militants.

Mais au-delà de ces aspects liés au fonctionnement interne de Femu, il est une évidence politique : la victoire historique de décembre 2017, et ce qui s’est passé depuis, rendent plus indispensable que jamais la montée en puissance rapide de Femu a Corsica.

Femu a Corsica dont nous avons déjà convenu tous ensemble qu’il devait être à la fois un parti de gouvernement, capable de soutenir, d’irriguer, et de renforcer l’action du Conseil exécutif et de la majorité territoriale, et un parti de militants, adossé à un fonctionnement clair et démocratique, présent sur tous les terrains de lutte et d’action, au plan interne comme aux plans européen et international.

Cette évolution est donc conforme à notre volonté commune maintes fois exprimée.

Elle répond à l’attente et aux espoirs de toutes celles et tous ceux qui nous ont déjà rejoints ou qui désirent le faire.

Elle est la seule à la hauteur des défis que nous devons relever, aussi bien dans la construction d’une Corse émancipée et apaisée, que dans le rapport de force politique et démocratique que l’attitude de l’Etat, qui pour l’heure ferme la porte à toute solution politique, nous impose de construire.

Nous l’avons dit et répété : avemu un paese da fà !

Pour construire un pays, il faut des principes. Nous les avons placés au coeur de notre démarche, et ils y resteront : l’éthique, la démocratie, la prééminence de l’intérêt général sur les intérêts particuliers.

Et il faut garder le cap, celui qui nous a valu de gagner la confiance des Corses et qui nous permettra de la conserver et de l’élargir :

– l’union de nos forces au sein de Femu a Corsica ;

– la mise en oeuvre d’une vision stratégique partagée avec les autres nationalistes, une vision qu’il convient de renforcer et d’étendre en permanence ;

– la volonté d’ouverture aux autres forces politiques et la création de plateformes communes d’action dans l’intérêt de la Corse à chaque fois que possible ;

– le dialogue si possible, et la fermeté et l’inflexibilité dès lors que nécessaire, dans le rapport à l’Etat, avec pour boussole, dans chacun de nos choix, l’intérêt collectif du peuple corse, et pour fil conducteur l’émancipation politique, économique, et sociale de notre pays. Oui, il y a, chez les militants comme chez tous les Corses, des impatiences, des sujets de mécontentement, des inquiétudes.

Mais qui pouvait penser que les choses seraient faciles ?

Quelles que soient les incertitudes ou les difficultés, nous les dépasserons, parce que notre combat est dans le sens de l’Histoire et que notre démarche est porteuse d’espoir et de progrès, pour cette île et pour son peuple.

Ce sont ces principes, cette volonté et cet espoir que Femu a Corsica doit incarner.

Nous l’avons promis le 15 octobre 2017, et des milliers de Corses attendent que l’engagement pris se concrétise pleinement.

A nous toutes et à nous tous de faire, dès aujourd’hui et sans délai supplémentaire, les choix forts et clairs qui permettront à notre promesse commune de s’accomplir.

 

Je proposerai pour ma part à la Coordination de Femu qu’une date pour la prochaine Assemblée Générale de Femu a Corsica soit arrêtée en commun et fixée pour cet été.

 

Gilles Simeoni.

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