Les lobbyistes, ces vampires qu’il faut mettre dans la lumière !

Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, en direct à la radio, a démissionné avec fracas le 28 août 2018, accusant notamment le poids des lobbies dans les cercles du pouvoir. Qui sont-ils, ont-ils réellement du pouvoir, gouvernent-ils ?

‘‘Les bons et les mauvais chasseurs’’

 

Tout d’abord, ‘‘lobbyiste’’ (personne travaillant pour un groupe d’intérêt ou de pression) vient du mot anglais ‘‘lobby’’ signifiant ‘‘couloir’’ ou ‘‘entrée’’. En effet, ce sont dans les couloirs ou à l’entrée de la Chambre des Communes (la Chambre des députés britanniques) que les lobbyistes venaient, dès le XIX siècle, pour convaincre les députés britanniques et ainsi influencer leurs décisions.

 

Aujourd’hui, l’activité de lobbying ne se fait plus (que) dans les couloirs du Parlement, mais partout : dans les cabinets ministériels, dans les bureaux des députés, autour d’une table au restaurant… mais par analogie, cette expression est restée car elle veut tout dire. Dans l’ombre, des hommes de pression essayent d’influencer des élus avant qu’ils ne prennent leurs décisions finales.

 

Quelque part, cette affaire des lobbyistes rappelle le sketch des Inconnus, dans les années 1990, qui parlait ‘‘des bons et des mauvais chasseurs’’. À vrai dire, c’est un peu la même chose avec les lobbies. Il y a les bons et les mauvais lobbies mais c’est compliqué de faire la différence.

 

Interdire les lobbyistes ?

 

Au-delà de l’image détestable que les lobbies ont et entretiennent, et la démission de Nicolas Hulot ne fera qu’empirer les choses, à juste titre, le lobbyiste peut avoir son utilité, notamment lorsqu’il défend un intérêt particulier. Ce n’est donc pas condamnable en soit.

 

Les élus, qui doivent travailler dans l’intérêt général, ne savent pas tout et ne peuvent pas tout savoir. Pour cela, ils ont besoin d’avoir des avis d’experts, techniques voire juridiques. Ils ont besoin d’entendre tous les avis, toutes les idées, toutes les options avant de se faire leur propre opinion et de ‘‘trancher’’ dans le sens de l’intérêt général. En cela, le lobbying n’est pas un problème en soit.

 

Mais il existe un monde entre, d’un côté, les lobbyistes qui défendent les multinationales, comme Total par exemple. Ils sont nombreux, très grassement rémunérés, sortis des grandes écoles parisiennes, ayant un carnet d’adresses fourni leur permettant d’avoir accès à tous les cercles du pouvoir, souvent d’anciens copains d’école, et de l’autre, des lobbyistes qui défendent les petits, les fragiles, les sans-voix, comme la Ligue de Protection des Oiseaux, par exemple. Ces derniers sont peu nombreux, souvent bénévoles ou modestement payés par des associations ; ils n’ont pas le bras long et doivent se démener pour faire passer leur message tout en combattant les idées des puissants.

 

Comment la lutte d’influence peut-elle être juste et équitable quand certains disposent de millions d’euros pour arroser les élus de notes, de rapports, d’amendements pré-écrits alors que d’autres n’ont rien et accès à personne ? Comment une décision juste et équitable peut-elle être prise quand certains ont accès par lien d’amitié, parfois de famille, aux grands de ce monde et que d’autres n’arrivent même pas à avoir un rendez-vous avec l’élu ou le ministre ? Comment l’intérêt général peut-il primer quand certains ont accès à tous les plateaux de TV et les journaux ou aux coulisses du pouvoir, aux réunions de l’ombre et aux conciliabules secrets quand d’autres n’ont accès à rien, pas même aux médias ?

 

Le rôle des élus

 

Au-delà du poids gigantesque des lobbyistes, c’est le rôle des élus qui est mis en exergue avec la démission de Nicolas Hulot. En effet, aussi puissants que soient les lobbyistes, ils n’auraient pas cette influence si les élus ne reprenaient pas en boucle et sans recul les arguments avancés comme le fameux ‘‘ça va créer des emplois !’’ Les élus et les ministres sont tout aussi responsables mais ils sont faibles face à ces véritables ‘‘armées de l’ombre’’ qui agissent comme des vampires, la nuit, dans l’ombre, à l’abri des regards citoyens.

 

C’est pourquoi, la seule solution pour protéger les élus – et donc la prise de décision dans l’intérêt général – c’est de traiter les lobbyistes comme des vampires. Et les vampires, ça craint la lumière !

 

Tous les lobbyistes devraient être inscrits sur un registre public et en ligne, indiquant pour qui ils travaillent et qui ils rencontrent, ce qui n’est que partiellement le cas aujourd’hui. Chaque intérêt particulier devrait avoir un nombre limité de lobbyistes enregistrés auprès d’une institution afin d’éviter ces ‘‘armées de l’ombre’’ noyant les élus de leurs notes et de leurs amendements. Les élus devraient être obligés de ne rencontrer que des lobbyistes enregistrés, et de publier leur agenda politique en déclarant tous les rendez-vous avec les lobbyistes pour qu’on sache sous ‘‘quelle influence’’ est tel ou tel élu.

 

De plus, il devrait être interdit de devenir lobbyiste juste après avoir eu un mandat électif, a fortiori un mandat exécutif, car le passage incessant entre sphère d’influence et sphère politique crée un sentiment de monde fermé pour les citoyens. Enfin, le non-cumul des mandats dans le temps réduirait d’autant l’emprise des lobbyistes sur les élus, rendant ainsi un peu de pouvoir au citoyen.

 

En définitive, les lobbyistes peuvent être utiles à la vie démocratique parce qu’ils permettent de donner une voix à un intérêt particulier mais ils peuvent être aussi dangereux -et c’est souvent le cas – car ils agissent dans l’ombre pour influencer les décisions avec des moyens à la limite de la légalité, parfois même au-delà ! Il est temps de mettre de la transparence dans nos démocraties et de rendre le pouvoir aux citoyens en lui permettant de contrôler ses élus et les prises de décisions. Pour cela, il faut traiter les lobbyistes, notamment ceux qui agissent dans l’ombre, comme des vampires… en allumant la lumière !

 

 

Roccu GAROBY

Co-Porte-Parole de Régions et Peuples Solidaires

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