Sustegnu à André Paccou

« La violence des mots ne peut faire société »

C’est sous ce titre que plusieurs centaines de personnalités et de citoyens, auxquels se sont joints aussi plusieurs partis politiques, notamment nationalistes, apportent leur soutien à André Paccou, porte-parole de la Ligue Corse des Droits de l’Homme, inlassable défenseur des droits de l’homme depuis de longues années dans l’île. Ce mardi, devait se tenir un procès bien étrange où il est la victime. Injurié, calomnié, harcelé, et même menacé qu’il est depuis des mois. Au-delà de ceux qui l’ont pris pour cible, il s’agit surtout de dire ici que cette « violence des mots » peut porter très loin l’opprobre, que ce sont des comportements insupportables et que la « liberté d’expression », que d’aucuns invoquent, n’autorise donc pas tout.

 

André est un homme qui dérange par ses messages, délivrés de manière imperturbable, quel que soit le contexte : rien ne justifie de faire abstraction des droits humains et de la dignité que l’on doit à chaque homme.

Une mission, comme porte-parole de la Ligue des Droits de l’Homme, qu’il n’a pas eu de mal à endosser tout au long de sa vie, tant elle dépasse ses engagements militants pour faire partie de ses convictions profondes. Cela lui a permis de soutenir tous les combats humanistes, et de s’investir systématiquement chaque fois que des droits sont bafoués.

C’est bien sûr le cas pour la situation des immigrés, pour les réfugiés, pour les précaires de toutes sortes, mais c’est aussi le cas des prisonniers politiques corses, prévenus, détenus ou recherchés, souvent privés des droits les plus élémentaires. Ils ont toujours, eux mêmes et leur famille, trouvé en André Paccou et la Ligue Corse des droits de l’Homme, une écoute, un soutien, et bien plus encore, un avocat efficace.

Cette abnégation qui est exaspérante aux yeux de ceux qui le harcèlent, lui a donc permis de supporter bien des vicissitudes et des attaques tout au long de son parcours, notamment lorsque défendre les prisonniers corses n’était pas une cause si consensuelle. La LDH a été alors un témoin et un appui précieux.

Mais le procès sensible qui nous occupe n’aurait pas eu à exister si, au travers de la personne d’André Paccou, ça n’était pas plutôt son action envers la cause des immigrés qui était avant tout visée. Les choses démarrent avec l’affaire dite de « Prunelli di Fium’Orbu » où les passions s’étaient déchaînées après qu’une enseignante avait voulu faire chanter aux enfants l’hymne à la paix qu’est « Imagine » de John Lenon, dans différentes langues, dont l’arabe. La fête de l’école avait dû être annulée. S’organise alors une campagne de haine contre André Paccou qui avait bien évidemment, comme d’autres, dénoncé les comportements racistes. Injures et obscénités sur les réseaux sociaux, relayés par des blogs d’extrême- droite, tracts anonymes, menaces et même actes d’intimidation, au point de s’en prendre y compris à sa famille, l’obligeant à porter plainte. Et pourtant, ce procès ne cherche pas des dommages et intérêts quelconques, il se veut avant tout «pédagogique pour la société corse » comme l’a dit le chanteur Jean Claude Acquaviva, parmi les nombreux soutiens autour d’André. «André n’est pas de ceux qui veulent envoyer les gens en prison » a repris Vincent Andriuzzi, ancien prisonnier politique. Il s’agit donc d’envoyer un message démocratique et apaisé, mais aussi une vraie leçon de vie aux cinq prévenus dans cette affaire. Après plusieurs reports, le procès devait se tenir ce mardi 11 avril. Le délibéré a été mis au 16 mai.

 

 

La lettre de soutien à André Paccou signée par plusieurs centaines de personnalités et citoyens :

« La liberté d’expression ce n’est pas la liberté d’injurier et de menacer. La malfaisance des mots porte en germe la violence.

Notre capacité à faire société repose sur notre capacité à donner sens à la fraternité en reliant les valeurs de justice, de tolérance et de respect de l’autre.

La société dans laquelle nous nous reconnaissons refuse que soient attisées les différences au profit d’une identité dévoyée.

Nous voulons que nos enfants vivent dans une Corse réconciliée avec elle-même.

Pour ces raisons, nous sommes solidaires d’André Paccou. Victime d’une campagne haineuse depuis près de deux ans, ce sont des centaines d’injures et de menaces qui le visent.

Nous l’assurons de notre soutien dans son combat pour défendre les valeurs humanistes alors que comparaîtront, le 11 avril à 14h devant le tribunal de Bastia, certains responsables de cette campagne

indigne. »

 

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