Eaux d’Orezza

Enfin un accord !

Sous le titre «Un accord qui garantit les intérêts des salariés, du territoire d’Orezza et de la Corse», le Conseil Exécutif de Corse informe, qu’enfin, les longues négociations entamées il y a 17 mois ont abouti entre la Société Nouvelle d’Exploitation des Eaux d’Orezza, présidée par Madame Mora, qui gère le domaine et son exploitation, et la Collectivité de Corse, propriétaire de la source et de sa renommée mondiale.

 

L’acqua acitosa, ce qu’elle représente pour la Corse, son Histoire qui remonte à l’antiquité, mais aussi l’attachement qu’on lui porte bien au-delà des habitants de la pieve, ses salariés, son potentiel pour le rayonnement économique de toute la micro région, son statut de «bien public», d’une part, les contraintes lourdes et le coût que cela représente pour le maintien de sa qualité et de son rayonnement, bref les difficultés d’une entreprise d’autre part, opposent les deux parties depuis des mois. Une équation difficile et des enjeux considérables, qui justifient le bras de fer. Rappelons que la source est restée inexploitée durant cinq ans faute de repreneur pour un outil en piteux état. Qu’il fallait probablement un peu de folie ou un sacré goût du capital-risque pour accepter un tel défi économique il y a 23 ans, restructurer les bâtiments, valoriser la source, parvenir à commercialiser les eaux au-delà de nos frontières… Poussé par un attachement affectif (ses ancêtres figurent sur l’étiquette choisie pour la bouteille), François Xavier Mora, enfant du pays et PDG de l’entreprise Marne et Champagne, a relevé ce défi. Seule une telle fortune, et une carrure d’entrepreneur au sens premier du terme pouvait s’y risquer. Et il fallait justement avoir la dimension qui rassure les autorités (à l’époque le Conseil Général de Haute-Corse) pour une fois aux commandes savoir se dépêtrer des difficultés. Rendons quand même à César…, ce «cran» a permis à l’acqua citosa de devenir l’un des fleurons de notre économie! Reprise en 1998, pour une concession de 20 ans, l’eau est à nouveau consommée dès 2000 et le succès est immédiat. Aujourd’hui elle a certes reconquis la Corse, mais elle est exportée jusqu’en Chine, aux Etats-Unis, au Japon, et est servie parmi les tables gastronomiques les plus prestigieuses.

Au décès de François Xavier Mora, en 2010, avec soulagement pour la micro-région et pour les salariés, son épouse et sa fille reprennent la suite. Compliqué dans un monde de l’eau terriblement concurrentiel face aux trusts industriels comme Nestlé (Perrier, San Pellegrino…) ou Danone (Badoit), et pour une source qui commande une manipulation: dégazéifiée et déferrisée, l’eau est ensuite regazéifiée et referrisée aux strictes normes autorisées pour sa commercialisation, ce qui réclame un suivi scientifique précis.

 

À l’approche de la fin de la concession, il était donc demandé un prolongement de 25 ans de celle-ci permettant d’amortir les investissements et d’asseoir la solidité de la société d’exploitation.

Car la source n’est pas sa propriété. Elle est propriété de la Collectivité de Corse. C’est un bien public que les élus se doivent de préserver pour aujourd’hui et pour demain. Il y a donc, comme le rappelait il y a peu Femu a Corsica, des exigences: garantir les emplois et les conditions de travail, préserver la ressource, la marque et le fonds de commerce, propriétés de la Collectivité de Corse, assurer la prééminence de l’intérêt public, générer le maximum de retombées économiques directes et indirectes sur la région et la Corse.

La législation qui régit le cadre d’exploitation des eaux de source ayant changé pour veiller notamment au respect des règles de mise en concurrence, la CdC se devait de son côté de sécuriser ce patrimoine au plan juridique, politique et au plan des retombées économiques et sociales pour le territoire. Depuis près de deux ans, il a fallu donc se pencher sur le cadre juridique le plus approprié pour préserver ces impératifs, tout en veillant à ne pas mettre en péril son exploitation.

 

Ce casse-tête a nécessité des négociations compliquées qui viennent donc d’aboutir après 17 mois d’échanges parfois tendus (lire ci-contre). Un contrat de location-gérance est mis en place avec la Société de Madame Mora et dans quatre ans, la Collectivité de Corse lancera un nouvel appel d’offre.

Désormais, pour la Société Nouvelle d’Exploitation des Eaux d’Orezza, un nouveau défi est posé: se préparer à la mise en concurrence et démontrer ses capacités à vouloir conserver la gestion de la source en répondant aux aspirations de la Corse.

Pour la Collectivité de Corse qui sécurise ainsi la pérennité de l’exploitation de la source, la volonté est de faire en sorte que les gestionnaires, quels qu’ils soient, répondent pleinement aux enjeux de développement économique et social de l’île.

Longa vita à l’acqua acitosa! •

Fabiana Giovannini.