Économie, social

L’hiver sera dur !

L’été 2020 restera marqué par une récession sans précédent. La crise de l’économie touristique domine dans un tableau général très atteint. Toute la Corse subira les contrecoups d’une crise qui s’étendra à tous les secteurs ou presque.

 

Quelques activités en Europe ont échappé à la crise économique générée par le Covid-19, mais bien rares sont celles qui ont pris pied sur l’île pour y générer des emplois. Les télécommunications, les applications internet, les centrales de vente par internet, les séries ou les jeux vidéo plébiscités pour égayer les foyers confinés, les fournisseurs de services, rien de tout cela n’a réellement pignon sur rue chez nous au-delà de filiales locales restreintes.

Par contre, les secteurs atteints de plein fouet sont présents, et plus que présents, comme le tourisme et ses dérivés bien sûr, mais aussi les compagnies de transport, particulièrement dans l’aérien avec Air Corsica, notre petite industrie locale fortement appuyée sur l’aérien (Corse Composites) et sur un agroalimentaire dont la fréquentation touristique assure une grande partie des débouchés (Pietra ou Orezza, biscuiteries, secteur viticole, fromageries, etc.), : on a du mal à extraire un contre-exemple positif dans le panorama des activités qui assurent l’essentiel de l’emploi dans l’île en dehors de la fonction publique.

Le commerce et les grandes surfaces souffriront eux aussi car il est clair que leurs comptes annuels seront affectés par la moindre fréquentation touristique. Le bâtiment, dont les multiples chantiers seront en recherche d’acquéreurs à l’heure où le chômage va frapper très fort et les dépôts de bilan se multiplier, peinera à écouler ses stocks et ralentira mécaniquement son activité. Il faut s’attendre à un marasme général en dehors d’un secteur public que l’on sait déjà hypertrophié.

Faire face aux enjeux du court terme deviendra aussi la priorité des interventions publiques, négligeant les programmes de plus long terme, ceux qui préparent l’avenir : réhabilitation énergétique des logements, financement des investissements écologiques, conversion de l’agriculture, seront des priorités renvoyées à plus tard, ou minimisées dans les ambitions budgétaires.

 

Côté social, la rentrée s’annonce lourde de menaces sur l’emploi. Déjà, devant les tribunaux de commerce, les plans sociaux s’amoncellent qui promettent en septembre une flambée du chômage. Les travailleurs pauvres des saisons estivales sont pour beaucoup restés sur le carreau d’une saison amputée, et, pour les plus chanceux, ils n’auront travaillé que quelques semaines, bien moins que les autres années. Leurs droits au chômage seront diminués d’autant, les ramenant encore davantage en situation précaire pour passer l’hiver.

La pauvreté, déjà si forte en Corse, franchira un nouveau seuil.

Comment chiffrer tout cela ?

La récession en France est prévue pour avoisiner 10 %. Dans le contexte spécifique de l’île, cela ira bien plus loin. Sans doute pas loin de 20 %. Le chômage pourrait ainsi doubler.

Jusqu’à présent, les amortisseurs sociaux mis en place par l’État ont permis de contenir les effets de la baisse d’activité. Mais ce flot d’argent public ne pourra être éternel, surtout s’il faut faire face demain à un rebond de l’épidémie.

Dans ce contexte très difficile, il faut anticiper dès maintenant des mécanismes de solidarité renforcée, donner de nouveaux moyens aux organismes caritatifs et compter sur la solidarité sociale entre ceux qui sont épargnés, retraités et fonctionnaires, et ceux qui seront déstabilisés et ne pourront plus faire face, nouveaux chômeurs ou travailleurs saisonniers n’ayant pu reconstituer leurs revenus durant l’été.

Le pic de la crise économique sera pour cet hiver. Il faut s’y préparer.

F.A.