Vers la fin de « l’état de grâce »

« L’état de grâce » post-électoral touche à sa fin. Face à un gouvernement manœuvrier, clairement hostile, handicapé par une fusion des trois collectivités menée sur fond de comportements budgétaires irresponsables du côté de feu les Conseils départementaux, et devant faire face à des dossiers cruciaux (déchets, transports notamment), l’Exécutif ne peut compter que sur lui-même, et sur les forces qui, dans la société corse, ont appuyé son élection. Comment pourrait-il y parvenir sans avoir à ses côtés un parti politique démocratique, organisé et puissant ?

 

La manœuvre politicienne de l’Etat à propos des organismes corses HLM a rebondi cette semaine à l’Assemblée Nationale. Dans la loi ELAN qui vient d’être votée, tous les Offices HLM de France sont prévus d’être regroupés, aucun nouvel organisme de logements sociaux ne pouvant compter dans son parc, selon la nouvelle loi, moins de 15.000 logements.
Mais le nouveau clanisme veille : la loi ELAN prévoit ainsi que la Corse soit placée en situation dérogatoire pour pouvoir maintenir deux structures séparées, nord et sud, celle du Sud ayant été donnée par le Préfet au nouveau leader macronien, Laurent Marcangeli, Ainsi ceux qui n’ont que le « droit commun » à la bouche usent de la dérogation législative pour manigancer leurs arrangements politiciens. Et ce sont les mêmes qui refusent, soi-disant au nom du principe constitutionnel de « l’égalité entre les territoires », la moindre demande d’adaptation formulée par l’Assemblée de Corse, comme par exemple l’instauration d’une taxe insulaire sur les camping-cars. Voilà comment l’Etat agit aujourd’hui, et il est à craindre que cela aille en empirant dans les mois à venir.
D’un ministre à l’autre, jusqu’à Nicolas Hulot venu rallumer la flamme de l’incinérateur plutôt que de donner des moyens nouveaux pour lancer une dynamique pour le tri sélectif, les émissaires d’Emmanuel Macron dépêchés sur l’île s’emploient à « fermer les portes ». La Corse est un territoire que « l’Etat-Macron » veut garder dans le giron jacobin, et cet Etat-là ne souhaite certainement pas la réussite de la majorité nationaliste !
Car l’inscription dans la durée d’une majorité nationaliste, sur plusieurs mandatures successives, est la hantise de ceux qui nous gouvernent. Cela les obligerait à négocier et à aller sur la voie d’une autonomie interne qu’ils refusent absolument, comme l’a montré le débat sur la réforme constitutionnelle. Face au raz de marée électoral, ils ont dû admettre la mention de la Corse dans la constitution, mais ils se sont attaché à vider de son sens la reconnaissance de sa spécificité. L’avenir du peuple corse ne peut se limiter à ces maigres avancées, et c’est seulement quand l’Etat finira par admettre que le « parti français » est définitivement minoritaire sur l’île qu’il acceptera de négocier la transition vers l’autonomie. Cette majorité doit donc réussir et, dans moins de trois ans, être en mesure de se succéder à elle-même.
Sa composante principale est Femu a Corsica, à l’origine coalition électorale, qui a pris, en octobre dernier, alors que commençait la campagne électorale, l’engagement de se constituer en force politique nouvelle, le « parti de gouvernement », qui permettra une telle évolution politique. Les leaders sortants, Mattea Lacave et Gilles Simeoni pour Inseme Pè a Corsica, Jean Christophe Angelini pour le PNC, Jean Biancucci pour Chjama Naziunale, en ont pris l’engagement solennel devant un millier de militants rassemblés sous un chapiteau. Une volonté s’est exprimée, des statuts ont été adoptés : il est exclus de faire machine arrière !
Or la création de Femu a Corsica, en tant que parti de gouvernement, n’a pas embrayé au lendemain de l’élection de décembre alors que cela était prévu. Il faut impérativement rattraper le temps perdu. Le plus dur a été fait : rassembler plus de mille adhésions, adopter des statuts, imprimer une image forte dans l’opinion qui attend cette mise en place.
Mais elle ne voit rien venir. Il est un secret de polichinelle que des résistances importantes se manifestent encore du côté de la direction du PNC qui reviendrait ainsi sur les engagements de son AG de septembre 2017. Mais le temps est compté, et revenir sur les engagements pris à la veille des élections aurait des conséquences négatives considérables. Face à nos adversaires, nous ne pouvons rester dans le statu quo si l’on veut pouvoir surmonter la fin de l’état de grâce qui se profile à l’horizon.

François Alfonsi.

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