Doit-on s’inquiéter ?

Pagaïe générale. Des mécontents de partout, aucune organisation n’y échappe. Macron élu Président à l’Élysée est le résultat de l’effondrement du système électoral alternant de la Ve République. Il est sans opposition parlementaire pour le moment. L’effondrement des clans était d’ailleurs perceptible dès les primaires. La suite a démontré qu’il était entièrement lié à l’effondrement parisien.

La percée «miraculeuse» des natios à la mairie de Bastia puis à la CTC doit être tempérée; malgré un progrès acquis par leur action échelonnée sur 50 années, ce contexte hexagonale les a facilités mais rien n’a changé du jacobinisme républicain.

La pagaïe ?

À droite deux listes (Bozzi – Grimaldi / Mondoloni – Rocca Serra), la fusion annoncée pour le second tour veut rassurer pour le premier. À gauche les insoumis ont fait alliance avec les communistes, et Mélenchon vitupère. Quant au reste, le PRG avec Jean Zuccarelli à la recherche d’un « front républicain » capable de se dresser contre le « séparatisme » des natios, il s’oppose au tandem Orsucci – Orlandi. Le parti LRM a du mal à figurer, l’épisode en cours de Barat oblige le Président à arbitrer, en personne il sonde à l’occasion d’une cérémonie à Paris en l’honneur des pompiers… c’est dire combien la campagne électorale pour l’Assemblée Unique de décembre où seuls les corses vont voter, agite tout y compris les pieds de Jupiter…

 

Et les natios à peu près assurés de reconduire leur majorité ont des crampes dans tous leurs membres. L’Alliance Corsica Lìbera – «modérés » dès le premier tour n’est aller de soi. Le Rinnovu est réfuté, il s’est mis « dans l’opposition » selon Corsica Lìbera. Il fera sa liste espérant avoir des élus ou être coopté, son contingent de voix pouvant être utile ou nécessaire à partir du second tour. En attendant il compte sur les indépendantistes les plus radicaux, ceux qui auraient voté l’alliance faute de mieux ou qui se seraient abstenus. Ils concurrencent Corsica Lìbera sur sa gauche.

La fusion des «modérés » a du mal à sauver les apparences. Elle apparaît comme une fusion tardive que la proximité du scrutin de décembre impose et où se jouent l’équilibre sur les listes, les participations à l’Exécutif de l’Assemblée Unique et à celui de la future organisation politique qui sera décrétée le 15 octobre mais ses statuts déjà négociés avec quelques difficultés ne pourront pas être appliqués pour l’élection de décembre. On aura le nom Femu a Corsica qui restera à concrétiser et à roder. La conférence de presse des «100» du PNC de ce dimanche, aussi mesurée a-telle été, l’atteste. On peut se demander si la dynamique de l’alliance n’en sera pas affectée.

La suite de la campagne jusqu’à décembre pourrait l’améliorer, on doit l’espérer. Mais la majorité natio ne peut se permettre une fois élue une incohérence interne pour mener sa politique de sauvetage historique du peuple corse sur le temps long que cela nécessite. Elle ne peut pas non plus négliger la construction d’une organisation, son outil de terrain électoral mais encore d’avantage qui doit servir à la cohésion de la prise de conscience des causes de l’état de mort lente et inéluctable si un projet n’est pas assumé en fonction de cette prise de conscience.

 

Le Président Macron au sommet de l’État républicain attend pour l’essentiel de voir comment les natios vont s’en sortir, entre temps il cherche à avoir des correspondants locaux pour ne pas avoir à faire qu’aux seuls natios.

Lesquels se sont réconfortés en allant Écosse et en Catalogne. Si ces deux peuples comme beaucoup d’autres luttent pour échapper à des dominations, les situations sont très différentes de celle de la Corse : la démographie, les ressources, les moyens mis en œuvre pour les coloniser…

La dictature d’un Franco et l’assimilation orchestrée par l’école de Jules Ferry entre autre.

Si la présence sur tous les fronts est logique puisqu’il s’agit de sauver un peuple pas loin historiquement de recevoir l’extrême onction, il ne faut pas trop attendre des autres. De l’Europe en particulier qui ne peut pas intervenir directement dans les affaires internes des États.

Catalogne ou Écosse ne peuvent être reconnues qu’avec l’accord de Madrid et de Londres.

L’Europe reste pour le moment celles des États et non des peuples.

Le modèle républicain jacobin lui persiste. Il a justifié un Empire colonial au nom de sa mission civilisatrice universelle alors qu’il disputait à l’Angleterre tout ce qui pouvait être colonisé sur la planète. Les deux en concurrence se vantaient que leur Empire qui ne voyaient jamais le soleil se coucher. Ils les ont perdus mais continuent à défendre des intérêts qui n’ont rien de civilisateurs par les expéditions militaires et de l’aide aux dirigeants de ces pays sans se préoccuper à quoi il sert, où il va…

 

La mondialisation des puissances occidentales s’est mondialisée à la terre entière. Les peuples, les continents rattrapent leur retard technique et s’imposent progressivement, la course effrénée à l’innovation n’est plus du seul domaine d’un occident vieillissant et la rentabilité se moque des frontières. La démographie des peuples est un élément de force ou de faiblesse.

Pour le peuple corse rien ne va en sa faveur mais surtout le jacobinisme persiste dans l’agencement de la pyramide de la République et encore plus peut être dans la culture de toutes ses élites élues et administratives.

Une seule leçon, le peuple corse ne peut compter que sur lui-même (depuis longtemps on rabâche qu’on ne peut pas sauver un peuple par procuration) et les natios n’existent que comme les oies du Capitole. Tout autre motivation de leur part est bien plus qu’une faute, un aveuglement qui vaut trahison.