L’électoralisme a t il pris le dessus ?

Si l’espoir fait vivre, l’impuissance tue…

Une situation insulaire inquiétante, son économie rurale agro-pastorale évaporée depuis la Libération, 160.000 hab. en 1960 par exode massif, 320.000 hab. de nos jours du fait d’une émigration hors proportions par rapport au fond autochtone vieillissant, 22.000 très pauvres et encore plus d’étriqués. La vague déferlante de l’économie touristique à la suite du reflux de l’exode.

Ce «moteur » d’un développement rend l’île encore plus dépendante.

L’industrie touristique nécessite des investissements lourds (hôtels, infrastructures, résidence secondaires…), matériaux, ciment, briques, menuiserie industrielle… sont importés comme les produits de la grande distribution soutenus par l’enveloppe de CT ou par internet consommés par les estivants et les indigènes plus ou moins pauvres cherchant à épargner pour leurs enfants ou leurs vieux jours et cette épargne est pour l’essentiel investie par les banques pour développer ailleurs… les commerçants locaux restent «petits», simples relais fragiles des gros fournisseurs (concessionnaires de véhicules, marques en franchise…).

 

L’île a quelques produits de qualité (miel, charcuterie, fromages…) qui servent plus le marketing touristique qu’une densification économique.

Elle a surtout un patrimoine naturel remarquable qui lui file entre les doigts comme un héritage incapable de résister à la prédation spéculative. Il y a assez d’argent de par le continent, l’Europe… pour racheter et revendre non seulement les sites avec des horizons bleus mais jusqu’au dernier châtaignier.

Cet argent, souvent douteux, est plus corrosif que le système du clientélisme à l’ancienne.

Il suffisait à l’élu de dégoter un petit emploi public ou de pistonner un diplômé pour recueillir dans les urnes des paquets de bulletins de la reconnaissance de toute une famille nombreuse. Le clientélisme «moderne» a changé de nature. Il n’est plus mu par la nécessité immédiate des familles.

Civilisation des loisirs, tourisme, profits à tout prix, liberté des mœurs vont dans le sens de l’évolution plus individualiste de la société. Le paternalisme des chefs de clans n’est plus qu’une complicité pour tourner la loi des permis de construire et les règles des dossiers de subventions en tous genres. L’île ne prépare pas un avenir, elle dilapide son patrimoine Nature. Il est illusoire de croire rebâtir sur les ruines d’une économie ancienne que la République a laissé sciemment mourir avec des subventions pour l’essentiel. L’île est primordiale pour sa géostratégie, elle a été un réservoir d’hommes et aujourd’hui de consommateurs. Le système généralisé des subventions est une maladie chronique, une addiction et tout au plus un sédatif pour prémunir des crampes trop douloureuses.

Quelques-uns en font un bon usage… l’exception. Les autres s’occupent en végétant ou disparaissent, ou recherchent une nouvelle voie subventionnée… on voit bien que les insulaires à résidence principale soumis à l’égalitarisme jacobin sont hors-jeu pour défendre leur patrimoine naturel qui est un élément du marché financier.

Les natios malgré leur victoire sont démunis. Ils ont un peu gêné la spéculation qui s’est adaptée: elle passe trop souvent par l’alibi du développement relayé par des politiciens de proximité en manque de moyens, sollicités par électeurs avec des besoins contradictoires.

Les natios n’ont pas les moyens même dirigeant un statut particulier qui l’a été toujours un peu plus depuis Deffere, Joxe, Jospin et avec l’Assemblée Unique sans donner un pouvoir suffisant.

Il reste pouvoir de gestion.

On pourra considérer en être sorti quand le minimum sera acquis (coofficialité, statut de résident, pouvoir législatif, réglementaire et pouvoir fiscal réel…), le minimum est donc l’autonomie avec la reconnaissance juridique du Peuple Corse.

Alors rêver d’une évolution fédéraliste de la République quand le temps est compté pour la survie?

 

Seule garantie: une force politique locale consciente et déterminée de terrain et non une présence seulement dans une institution inadaptée.

Les idées et les projets ne manquent pas, la difficulté est de les réaliser sinon ils finissent à la poubelle des promesses non tenues.

Exemples : l’idée d’une compagnie de transport au service de l’île est passée mais de nombreux paramètres sont incontrôlables avec les compétences actuellement dévolues (Europe, État, intérêts locaux et marseillais…). De même il est évident que l’indépendance énergétique de l’île est possible dans une vingtaine d’années et elle changerait tout en bien. Mais qu’attendre des enjeux complexes de la stratégie d’EDF, du devenir du nucléaire, du temps nécessaire pour passer à plus d’énergies renouvelables sans trop de risques pour elle et pour assoir une politique nouvelle de l’énergie, vitale pour toute économie d’un pays. Nombre de guerres ont été la conséquence et continuerons de l’être. Les moyens de cette indépendance énergétique ne sont pas encore à notre portée même si quelques ébauches sont toujours possibles. Ces moyens ne peuvent commencer que par le préalable de la volonté politique du Peuple. C’est la mission historique de notre nationalisme que de lui permettre d’exister.

 

On en est loin. Il manque cette organisation de terrain. Nos élus vont s’éreinter à installer l’Assemblée unique. Ils vont faire les frais de son rodage, enlisés dans le jeu institutionnel. C’était un passage obligé. L’erreur pour ne pas dire la faute a été d’avoir négligé le terrain pour privilégier l’institutionnel. Les indépendantistes ont payé cher la clandestinité, ils préservent leur créneau néanmoins en dehors d’elle.

Les autonomistes n’ont pas à ce jour fusionné alors qu’ils n’ont pas de divergences doctrinales ou de choix des moyens. La fusion est tour à tour différée ou mise en avant selon des critères réversibles en fonction des calculs, jamais clairement débattus publiquement ni en interne à ma connaissance.

Je pense que tout se tient et voudrais me tromper. Pas de fusion parce que le jeu de l’électoralisme a pris le dessus. Une bonne cause comme un bon cheval ne fait pas de bons cavaliers forcément.

Les nationalistes passeront les obstacles s’ils prouvent qu’ils sont capables de donner l’exemple en interne d’un véritable et rigoureux comportement démocratique avec débats clairs. Ils sont obligés de montrer un exemple collectif, d’autodiscipline, de démocratie qui servira de référence et convaincra assez pour sortir de la mêlasse leur Peuple. L’approximation est là à combattre sans cesse.

Trop rigide mon propos?

Max Simeoni

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