Pourquoi est-on nationaliste corse ?

On est un nationaliste corse quand on on a répondu à de simples questions. Il y a un Peuple Corse menacé de disparaître et d’être spolié de son territoire. C’est le résultat d’une politique économique et culturelle sciemment mise en œuvre par la République jacobine française. Il n’y a aucun hasard ni aucune fatalité.

 

Notre nationalisme est la réponse à cette injustice. Il n’a rien à voir avec le nationalisme des conquérants. Il faudrait inventer un autre mot tant il s’y oppose. Il est uniquement défensif. Les Corses n’ont jamais été en mesure d’agresser à partir de leur île. Leur histoire les a dotés d’une culture farouchement défensive. Ils peuvent à titre individuel servir des politiques de domination, par exemple ils ont été colonisateurs quand ils croyaient apporter les bienfaits de la civilisation universelle de la République française, ils ont été efficaces si on croit le Maréchal Lyautey. Quand ils vivent ensemble sur l’île, ils s’y accrochent.

Ils ont été manipulés. On leur a menti en disant que la Corse était irrémédiablement pauvre pour les convaincre de considérer l’exil comme un don généreux pour leur promotion sociale dont il fallait se montrer dignes alors que la tutelle n’avait besoin que de puiser dans le réservoir d’hommes pour ses guerres et son Empire colonial.

 

Avec les saignées des guerres mondiales, la décolonisation et le recentrage sur l’Europe l’état républicain se doit de rééquilibrer les parties qu’il a négligées de l’hexagone harmonieux, périphériques notamment comme sa façade ouest, le bassin aquitain, la Corse… En 1957 il fait son Plan d’Action Régionale (PAR) qui prévoit pour la Corse trois Sociétés d’économies mixtes, la Setco pour développer le tourisme, la Somivac pour l’agriculture et la troisième qui n’a jamais vu le jour pour le développement sylvo-pastoral parce qu’il était difficile d’y implanter des bergers allogènes et d’avoir des rendements spéculatifs aussi juteux que sur le littoral.

Le tourisme selon la Datar des années 70-73 envisageait la construction de 250 à 300.000 lits en dix ans (affaire de l’Hudson Institute: rapport secret dont l’ARC a eu connaissance et abandonné, une fois dénoncé).

Le tourisme de nos jours, non maîtrisé se débat dans des contradictions : mitage des paysages, résidences secondaires, prix des loyers, grignotages des terres agricoles, effet d’aubaine de l’Enveloppe de Continuité Territoriale (CT) que se disputent les Compagnies de transports, « vie chère », spéculation immobilière, comportements mafieux… et avec le développement des grandes surfaces on peut imaginer un tourisme genre Datar Hudson Institute.

 

L’agriculture de la Somivac bloquée en aôut 1975 à Aleria reste assistée et aux lendemains incertains avec les primes à la vache et sous la pression immobilière.

Le sylvo-pastoral est sous la promesse de plans divers, développement de l’intérieur, loi montagne et autres discours hypnotiseurs. Pour l’intérieur, on a pour le moment les dérives de la prime à la vache, la spéculation immobilière qui touche des villages, des résidences d’été pour certes aussi des autochtones, mais avec une normalisation dans le droit commun des Arrêtés Miot et une augmentation des impôts sur les successions fragilisant le patrimoine rural familial.

La politique constante de la République démontre clairement son fond idéologique qui refuse le moindre droit linguistique à une communauté historique, ce en quoi on peut dire qu’elle est totalitaire, qu’en refusant le droit à la différence elle est une démocratie gravement malade génétiquement.

 

Elle ne ratifie pas la Charte des langues régionales ou minoritaires que le Conseil de l’Europe propose en 1992 aux 47 membres qui le composent mais elle introduit l’article 2 de la Constitution à cette date (le français est la langue de la République) tout en déclarant que cela « ne nuirait pas aux langues régionales ». Le Conseil Constitutionnel décrète que cette Charte avait certaines clauses qui étaient contraires à la Constitution. Isolée internationalement, le Conseil économique et social des Nations Unies lui demande de ratifier la Charte en 2008, à cette date elle consent à reconnaître, sans droit concret, par l’art.75-1 de la Constitution que « les langues régionales font partie du patrimoine de la France ».

Le Rapport des linguistes de l’Unesco de 2003 qui est accessible en ligne sur internet explique clairement les moyens employés pour ce génocide culturel.

Parmi les facteurs qu’ils avancent pour évaluer la vitalité d’une langue minoritaire, ils sont au nombre de 9, aucun ne laisse la moindre chance de survie à notre langue et le facteur 7 donne la clef de cette politique criminelle quand il stipule qu’il y a Assimilation forcée quand seule la langue dominante a un statut officiel. Le résultat recherché par la République est presque atteint : la langue Corse est en voie d’extinction qui s’accélère, elle n’est plus une langue maternelle enseignée à la maison, sa transmission d’une génération à l’autre se tarit, une minorité la parle. La République des jacobins n’acceptera la coofficialité qu’en dernier ressort, le dos au mur. Elle cherchera à nous berner avec les promesses d’un bilinguisme à sa botte pour continuer son assimilation forcée. Elle cache ses intentions, elle ment. Elle devrait être traduite devant le tribunal international des Droits de l’Homme et des Droits des peuples.

 

Gagner des élections avec une large majorité est une bonne chose. Cependant il serait illusoire et dangereux de penser que la suite de notre combat pour sauver le Peuple Corse sur sa terre va aller de soi. Notre victoire équivaut à obliger la République à remettre en cause l’idée complaisante qu’elle se fait d’elle même, sa doctrine constitutionnelle d’État jacobin. Ce qu’elle perçoit comme un danger de dislocation alors qu’il pourrait s’agir de la guérison de son handicap congénital. Sauver la Corse pourrait valoir d’améliorer la France. De toute façon nous n’avons pas le choix, nous ne pouvons pas nous résigner au sort qu’elle nous réserve.

Si la justice est de notre coté de Peuple demandant ses Droits, nous pouvons compromettre le résultat en sous estimant le cynisme de l’État jacobin et l’effort à faire pour l’amener à composition.

Il nous faut le soutien d’une plus grande majorité de Corses éclairés sur le fond des problèmes à résoudre et qui puissent ne pas être bernés par des fausses solutions. On peut en douter quand on a des nôtres ou des sympathisants qui pensent que c’est les Corses qui ont délaissés leur langue et que c’est à eux de la maintenir. C’est faux, ils ignorent tout du mécanisme de l’assimilation forcée mis en œuvre par l’État comme les linguistes de l’Unesco le décrivent dans leur rapport de 2003.

Illusion ou intoxication quand aussi on dit que le tourisme est le moteur de l’économie. Il ne peut l’être que s’il est maîtrisé , or le pouvoir des Corses est inexistant pour ce faire. Ils en sont réduits à se battre pour des paillotes. «Quand le bâtiment va, tout va » disait-on après-guerre lors de la Reconstruction. Mais pourquoi plus 60.000 pauvres, réellement pauvres et autant de précaires ? Pourquoi importe-ton 96 ou 97% de tout ce qu’on consomme malgré l’enveloppe de CT ?

 

Majoritaires ? La belle affaire!

En attendant nos élus sont devant l’énormité de la tâche en situation d’usure accélérée. Ils négocient ? Sans avoir achevé leur fusion et trouver une cohésion interne pour convaincre plus de Corses et peser sur le pouvoir jacobin. Le petit jeu d’alliances électorales, de « listes équilibrées », de postes à se disputer, pardon à se répartir, c’est prendre le risque d’Hannibal marquant la pose dans les délices de Capoue.

Cet article est donné à la rédaction ce dimanche, la veille de l’entrevue avec le Premier Ministre.

Je pourrais faire, s’il y a lieu, mon autocritique. Mais je prends les paris en attendant… Macron.

Max Simeoni.