Eskolim

Comprendre et soutenir l’enseignement par immersion

Eskolim est une association créée en 2009 et qui regroupe les cinq réseaux d’établissements scolaires associatifs par immersion en langue régionale que sont Seaska (pour le basque), Bressola (le catalan), Diwan (le breton), Calendreta (l’occitan) et ABCM Zwei Sprachigkeit (pour l’alsacien et l’allemand standard). En se regroupant, ces cinq réseaux ont créé un centre de formation commun, spécifique à l’enseignement immersif, l’Institut Supérieur des Langues de la République Française. Les formations des maîtres appelés à enseigner sont décentralisées et confiées aux établissements dédiés à chaque langue. Tous les deux ans, l’ISLRF organise un colloque sur la pédagogie immersive dans l’une des régions concernées où ils coordonnent et mêlent leurs expériences, accumulent du savoir et optimisent leur action en faveur de l’immersion linguistique.
L’union fait la force!

 

La Corse n’adhère pas à Eskolim parce que, jusqu’ici, notre île n’a pas misé sur l’enseignement associatif, contrairement à nos amis basques, bretons, catalans, occitans ou alsaciens. En mettant tous nos efforts sur la progression de la langue corse dans l’enseignement public, il y a eu certes des avancées, et il faut saluer l’engagement de ces 40 dernières années de combat. Mais hélas, on le voit, ces avancées sont trop lentes et encore largement insuffisantes pour assurer un avenir à la langue corse alors qu’une véritable guerre est menée et s’est même intensifiée sous la mandature d’Emmanuel Macron et de son ministre de l’Éducation Nationale Jean Michel Blanquer. Et nous sommes largement en infériorité numérique! Très bientôt les maîtres parfaitement corsophones manqueront pour assurer la transmission aux jeunes générations. Un contre la montre est engagé.

 

Avec la multiplication récente des agressions contre nos acquis, il est démontré, outre la poursuite des luttes engagées notamment pour faire progresser l’enseignement public, qu’il manque à notre arsenal de résistance, un outil supplémentaire. Cet outil, ce sont les écoles associatives d’enseignement immersif en langue corse. Arritti ne cesse de plaider en faveur d’une telle initiative. Elle est actuellement recherchée par l’associu Scola Corsa, qui probablement fera savoir sous peu ses initiatives.

La plupart des partis nationalistes y sont favorables. Femu a Corsica a adopté à une très large majorité lors de son assemblée générale en 2019, une motion proposée par François Alfonsi qui demandait à ce que le parti s’y engage.

L’enseignement associatif immersif a plusieurs avantages. En plaçant l’enfant dès son plus jeune âge dans un bain linguistique en langue régionale à l’école, il lui offre une chance non seulement de se réapproprier sa langue, mais aussi d’être davantage réceptif à l’apprentissage d’autres langues, y compris le français; il est avéré que l’enseignement associatif en langue régionale produit plus facilement des enfants multilingues.

De même l’enfant appréhende mieux certaines matières, notamment les mathématiques et les écoles du réseau eskolim démontrent une meilleure réussite scolaire! (voir notre article ici sur l’argumentaire produit par Eskolim).

 

Le pouvoir français met des obstacles que les écoles associatives immersives essaient de contourner. La loi autorise la prise en charge du salaire de l’enseignant dans les écoles confessionnelles. Les réseaux d’enseignement immersif en langue régionale ont donc saisi cette opportunité pour obtenir le même avantage. Cependant, les premières années d’existence sont à la charge des associations. Ce qui est très lourd.

D’autant que l’objectif n’est pas l’élitisme, mais bien de s’ouvrir à tous les enfants désireux de se réapproprier la langue de leurs parents, voire de leur grands-parents, quand les parents ne sont plus en mesure de leur transmettre. Arritti a déjà développé comment l’intelligence basque permettait l’accessibilité de ces écoles à tous les enfants qui le souhaitent, quel que soit leur niveau social. Nous y reviendrons de nouveau. En mode coopératif et solidaire énormément de choses sont possibles. Il suffit d’avoir la volonté politique.

La Corse est d’ailleurs bien mieux armée aujourd’hui pour y parvenir. Le riacquistu linguistique reste un des fondamentaux du nationalisme et les nationalistes corses ont en main aujourd’hui plusieurs outils institutionnels. Avec la Collectivité de Corse, les communes sous notre responsabilité, trouver des locaux, des budgets est largement aujourd’hui à notre portée.

Reste à obtenir des avancées pour contractualiser les nouveaux établissements dès leur ouverture, pour permettre l’utilisation des langues régionales aux examens et aux concours, pour créer des postes d’enseignants en fonction de la croissance de ces écoles. Eskolim est un outil de combat pour cela. Il s’emploie à permettre à ses réseaux de changer d’ambition et de répondre plus facilement à la demande sociale.

La foi, la passion, l’abnégation parfois de ces militants de la langue est extraordinaire. Des parents qui veillent à l’animation des écoles, aux enseignants à l’âme pionnière qui s’investissent totalement dans le projet pédagogique, jusqu’aux militants qui soutiennent et structurent ces réseaux, la Corse a encore beaucoup à apprendre des réseaux Eskolim.

Mais avec nos ressources humaines, notre expérience et aussi une forte volonté politique, nous avons de quoi construire notre propre modèle, sans rien envier à personne. Basta à vulè. Tocca à noi! •

Fabiana Giovannini.

 

Pour aller plus loin, lire aussi l’article Argumentaire produit par Eskolim sur l’intérêt de l’enseignement associatif immersif (extraits)