E riflessioni di Max Simeoni

Un peuple conscient et déterminé

Max Simeoni
par Max Simeoni
Curieux de regarder la télévision et de voir que, dans ce tohu-bohu, les images de violences de guerre en Ukraine alternent avec celles « d’émeutes » en Corse. Les unes et les autres n’ont aucune racine commune, si ce n’est qu’elles sont des réactions de peuples, l’Ukrainien contre Poutine, le Corse contre la République des jacobins.

 

Le Président Macron s’agite en Europe pour stopper les chars russes et délègue le dossier insulaire à Darmanin ministre de l’Intérieur. Il vient pour ouvrir un dialogue et faire des promesses, accompagné de quelques cadeaux. Un nouveau préfet l’a précédé, plus souriant et plus ouvert, remplaçant le préfet sévère comme un gardien de prison. Si Macron est réélu –  les sondages lui sont favorables  –, c’est lui qui décidera du contenu et du tempo. Madame Corse à la retraite au Conseil d’État ? Si, par miracle, un autre candidat jacobin prenait la suite, il peut repartir de zéro.

Sur l’île, les élus de toutes les tendances sont présents au milieu des lacrymogènes pour manifester leur soutien à cette jeunesse en colère et déterminée. Les élus nationalistes de l’ex-coalition espèrent que, devant la difficulté, le Président de l’Exécutif ne pourra plus faire cavalier seul et penser avancer sans eux. La pêche est ouverte en eaux troubles…

 

Les défenses d’un peuple dépendent surtout des conditions différentes dans lesquelles il est plongé.

L’Ukraine a quelques millions d’habitants, mais surtout elle est dans une position géopolitique primordiale entre l’Europe des occidentaux et la Russie de l’ex-URSS. Poutine semble désireux de retrouver un peu de cette influence perdue. L’Ukraine est un carrefour qui pourrait déboucher en Méditerranée par le détroit de Constantinople, et qui commande l’accès au Moyen Orient comme à l’Asie du Sud et du Centre, et à tous leurs pipelines de gaz et de pétrole.

De sa position importante dans l’ouest du mare nostrum, la Corse a conservé d’être un simple relai d’avions vers la partie ouest devant intervenir au Moyen Orient et en Afrique.

Ce parallèle pour dire simplement que tout peuple, pour s’en sortir, doit commencer à lutter lui-même, sans donner procuration et il trouvera par la suite des soutiens. Les Ukrainiens cherchent à mettre à l’abri femmes et enfants mais beaucoup se battent et sont soutenus. Ils ont des morts.

 

Les Corses n’ont pas à mourir sous les balles ou les bombes. Ils sont pris au piège comme dans une nasse d’où ils ne peuvent plus sortir, celle d’un tourisme qui, de l’extérieur, entretient le vivier. Plus de 97 % de ce qu’ils consomment, nourriture, vêtements, bâtiment (ciment, briques, menuiseries métalliques…). Sortir de ce piège de dépendance ne peut se faire du jour au lendemain, il y aurait trop de casse. Il faudrait les moyens politiques, ceux de l’autonomie, pour y parvenir et amener l’État, jacobin ou non, à accompagner cette sortie par étapes.

Un trait caractéristique de cet emballement des jeunes me paraît avoir eu comme catalyseur l’agression d’Yvan Colonna, détenu DPS, dans des conditions mettant en cause les autorités administratives de la prison, conditions qui font penser à un possible assassinat téléguidé. On retrouve ce réflexe atavique de résister à ce genre de domination. Elle est aussi l’expression d’un malaise plus global : difficulté d’emploi, de logement, d’avoir à partir sans retour facile… Bref, l’île n’est plus l’abri qui allait de soi pour tous les membres d’une famille.

Les Corses ont de tout temps su se regrouper en défensive en cas de périls immédiats ou d’injustices criardes. Ils ont pu construire chez eux et à partir d’eux, de même que sous Pasquale Paoli. Période trop brève. Il en reste le souvenir.

 

Le défi à relever est majeur pour sortir de la nasse. Il faut bien connaître cette colonisation par assimilation de l’État jacobin qui ne veut reconnaître aucun droit à un peuple sur son territoire au nom d’un égalitarisme républicain. Un État non démocratique, mal né, inachevé puisque la démocratie est le vivre en commun par le dialogue respectueux.

Sortir du piège d’une dépendance qui serait octroyée par générosité, qui nous met en situation d’être minoritaires avant de disparaître, comment cela pourrait être un exemple de valeurs universelles dont se gargarisent ceux qui colonisent ?

Que ce soit paix ou guerre, le Peuple Corse ne peut bannir le colonialisme qu’en prenant conscience du danger et de sa nature. Puis de s’organiser en fonction. C’est une logique de guerre civique et populaire et non une logique de guerre où tous les moyens sont bons.

Un peuple pleinement conscient et déterminé, sinon le salut reste aléatoire pour ne pas dire impossible.

Les jeunes ont réagi, une bonne surprise pour moi. Mais ils se trompent quand ils disent qu’ils ont obtenu en quelques manifs musclées plus que tous les parleurs nationalistes. Ils ont bénéficié de toutes les autres actions politiques, bonnes ou moins bonnes, et des circonstances électorales. Un Président en lévitation européenne, un Poutine va-t’en guerre…

Ils sont prêts pour la relève, il ne manque que le parti frère pour leur passer le témoin. On le fait quand ? •