I messaghji d'Edmond Simeoni

Sperenza ghjuventù !

Nous venons de fêter les 40 ans de l’Université de Corse. Edmond Simeoni aurait sûrement aimé ce moment et se serait probablement exprimé avec fierté et enthousiasme. Peut-être, comme le 14 février 2018 sur son blog, aurait-il adressé un nouveau message à la jeunesse. Extraits

 

« Elle est la semence et l’espérance de notre Peuple. Nous avons un immense devoir d’éducation et de formation, de prévoyance, de soutien, de préparation à leur insertion dans la vie active. Avoir contribué à arracher à l’Etat et au clan, la réouverture de l’Université de Corse, est un des fleurons de notre combat pour l’émancipation.

Ils sont des dizaines de milliers – de 14 à 25 ans – ici et dans la diaspora, à vivre les joies et les difficultés de leur âge qui restent, en dépit de toute autre considération, la période des projets, des rêves, des inquiétudes – concernant notamment leur futur emploi – des rencontres, du sas de l’apprentissage de la vie en commun mais surtout des espérances. La société, avec ses progrès technologiques, l’élévation générale du niveau de vie, ses plaies – la violence, la faim dans le monde, la précarité ici même – est à la fois exaltante car les changements sont majeurs dans tous les domaines mais les interrogations nous taraudent tous, jeunes y compris : où va le monde, sur le plan politique, économique et social – quel développement ? –, dans les domaines de la justice, des valeurs, de la paix ébranlée – par le terrorisme, de graves conflits et des antagonismes féroces –, du dérèglement climatique, des solidarités, de la santé ?

L’insouciance est l’apanage heureux de la jeunesse qui est elle-même un passage, un état transitoire, trop fugace, initiatique ; mais qui n’est pas épargnée par le tumulte et les turbulences de la vie publique, surtout en Corse ; ils y sont nés dans les violences, multiples et graves, la contestation, les transes sociales et politiques, les convulsions et peu de familles ont été exemptes de souffrances, d’interrogations, d’anxiété pour les leurs, très engagés et sévèrement réprimés.

Ils ont vécu dans un effondrement moral qui, il est vrai, existe aussi ailleurs, dans la perte des repères, les doutes sur les certitudes les mieux établies, dans les questionnements compulsifs sur la démocratie, l’éthique, avec des réponses peu convaincantes d’une société à bout de souffle mais qui espère un changement profond. Mais qui s’interroge quand même encore sur la capacité collective de notre peuple à le conceptualiser, à l’organiser tous ensemble et mieux à le réaliser.

Le chemin partagé, diversifié, a été très long, cinquante ans – avec des luttes interminables, souvent coûteuses, traumatisantes et parsemées de dérives, regrettables mais inhérentes au genre, sous toutes les latitudes- pour contribuer à redonner du sens et de l’espoir à toute la population ; mais il faut de la cécité ou de la mauvaise foi pour ne pas constater qu’un monde nouveau, émerge en Corse ; le vieux système de clientèle, usé, discrédité, hoquète ; l’État, discrédité, se mure dans son refus de reconnaitre notre peuple – ce refus est consubstantiel de son essence d’État-Nation, sa doctrine, de sa construction, de sa nature profondément coloniale, basée sur la force – mais la mouvance de progrès marque des points démocratiques aux élections et dans l’administration de la Corse ; la conscience populaire croît : la diaspora s’implique ; toutes les forces économiques, sociales, culturelles, écologiques, le monde du travail, sont traversés par des courants novateurs et des initiatives prometteuses.

L’île prend enfin conscience de ses immenses potentialités que vous ferez prospérer et que vous partagerez plus équitablement et d’un courant conséquent de compréhension et de sympathie internationales. L’aspiration à la démocratie et à la liberté ne peut plus être interdite, refusée, empêchée mais elle peut être retardée et gravement conflictuelle. L’État ne veut pas résoudre le problème corse par le dialogue ; il veut briser la résistance corse. Il a déjà échoué ; il a perdu et il le sait mais il est décidé à ne rien céder, à nous faire payer chèrement notre rébellion légitime, fondée, démocratique, notre droit à vivre libres, à construire et à développer notre Pays. Il devrait savoir que la résistance et la liberté sont dans notre ADN depuis des siècles. L’heure n’est ni au défaitisme ni à l’exaltation, ni aux doutes. L’heure est à la volonté, à la ténacité, à la responsabilité, à l’organisation. » •