Colonialisme par assimilation forcée ? Vince per ùn more !

Gilles Simeoni et Jean Guy Talamoni s’entretenaient la semaine dernière avec les représentants du Gouvernement. Alors que la situation semble dans l’impasse et qu’une grande manifestation se prépare, la République jacobine saura-t-elle reprendre le dialogue ?

 

Notre paire de Présidents à la tête d’une majorité de plus de 56 %, forts d’une légitimité indiscutable, malgré les messages négatifs délivrés par des Missi Dominici venus les sonder dont une Madame Corse, souriante dans l’île et aussitôt pissant froid dès son retour à Paris, malgré tout ce cirque, ils allaient discuter avec le Premier des Ministres de la République et les Présidents du Sénat et de la Chambre des députés. Le premier leur dit simplement que le Président Macron parlera lors de la partie politique prévue après la cérémonie à la mémoire du Préfet Erignac assassiné il y a 20 ans. Le second leur signifia sèchement qu’une modification de la Constitution dans le sens qu’ils souhaitaient n’était pas envisageable. Le troisième les écouta poliment…

 

Dépités et furieux, nos Présidents aussitôt lancent de Paris un appel à manifester juste avant la venue du Président Macron. Ils espèrent sauver un minimum de leur ambassade grâce à un appui populaire d’envergure. Ils ne savent rien de ce que peut dire ou ne pas dire le Chef de l’État. Ils misent sur cette force populaire pour qu’il engage enfin un dialogue sur le fond pour une sortie politique «apaisée», pour que le Chef de l’État infléchisse la direction annoncée par les autorités parisiennes. Ils ne veulent pas d’une manifestation uniquement nationaliste, ils souhaitent que le Peuple témoigne.

Beaucoup d’aléas et de confusion possibles selon moi.

Les candidats battus de droite et de gauche ont annoncé qu’ils ne participeront pas à la manifestation des natios. Ils sont à la recherche d’un appui du pouvoir central pour se sortir du quasi néant dans lequel la déroute électorale du système claniste les a jetés. Il n’y a pour le moment qu’un seul pouvoir, celui de Macron. Ils sont tous plus ou moins prêts à aller dans son sens. Certains, les plus affaiblis, auraient voulu voir se dresser un front anti natios pour écarter le danger de l’indépendantisme.

Le FLNC et la violence clandestine ayant cessé, ce front républicain s’est ramolli. Aussi ils courtisent le pouvoir sur les thèmes comme celui de la coofficialité ou du statut de résident que leurs partis avaient voté par le Padduc, un minimum pour les natios à la recherche du plus large consensus possible. Thèmes nécessitant une réforme de la Constitution que le pouvoir actuel rejette. On voit mal Jupiter à Aiacciu descendant de l’Olympe élyséen en marchant sur la tête de ses fidèles servants.

Une manif même réussie pourrait l’y amener ? Qui ne sait que le pouvoir surtout quand il se concentre dans les mains d’un seul répugne à un rapport de force qu’on lui impose de but en blanc? On est Chef ou pas ? Le Commandant des armées l’a appris à ses dépens. Et la météo pourrait gêner plus la foule de parapluies que l’imperméable du Chef. Pluie ou soleil que va-t-il nous chanter?

Pas de coofficialité, pas de statut de résident mais son humeur de girondin va aider la langue corse qui « fait partie des langues régionales, patrimoine de la France » (art.75-1 de la Constitution), va préserver la beauté de l’île des trafics de la spéculation. L’humeur du Chef? Un chef en joue sur tous les tons selon les circonstances. Il contrôle ses émotions. Il s’impose ou joue le manianime.

 

Oui, il a été judicieux que les natios se présentent à Paris prêts à entendre les arguments et les propositions des gouvernants. Oui, Jean Guy Talamoni a bien fait de s’employer pour faire comprendre que l’option indépendantisme n’était pas celle des quelques années à venir, qu’elle resterait une option du débat démocratique, qu’il y avait donc place au dialogue et qu’implicitement le pouvoir républicain avait le temps d’expliquer comment il aiderait la langue et préserverait le patrimoine nature de l’île. Il aurait été sans doute plus logique de manifester après que ce Président eût parlé comme l’avait annoncé son premier Ministre. Désormais peu importe, on doit faire en sorte que ce 3 février, il y ait le plus possible de manifestants.

Mais après? Pour moi, tout ce que peut apporter un Président de la République jacobine sera insuffisant pour sauver la langue, pour préserver la Terre, bref pour sauver le Peuple Corse. Il y a une incompatibilité totale entre le jacobinisme républicain qui a su mettre en oeuvre depuis plus de deux siècles une politique d’assimilation forcée efficace, habilement travestie, acceptée par les Corses en général, au point de croire qu’elle était inspirée par la générosité d’un grand pays créateur d’une grande civilisation universelle.

Hier, les Corses ont été un réservoir d’hommes (guerre, encadrement de l’Empire), de nos jours la terre insulaire profite surtout aux productions importées (98% pour alimenter les touristes et les habitants, pour bâtir, se vêtir…), la dépendance est totale. La pauvreté s’étend. Et on nous ressasse depuis toujours que ce qui compte c’est le développement économique. Il y est, mais pas pour la grande majorité des Corses puisqu’ils n’existent pas selon l’égalitarisme républicain.

 

Après le 3 février, après la venue du Président tout reste à faire et dans de mauvaises conditions presqu’à coup sûr. Une République hostile, fermée, des natios aux commandes de la CTC, sans moyens efficaces donc soumis à l’usure et devant émanciper l’île et son Peuple en les sortant d’une situation d’un processus de colonisation par assimilation forcée dont la preuve est donnée scientifiquement par le rapport des experts de l’Unesco de 2003 quand ils avancent le facteur 7 parmi les 9 qui définissent la vitalité d’une langue et la menace qui pèse sur les langues Régionales ou Minoritaires : «quand dans un pays où plusieurs langues sont parlées, une seule a un statut officiel, il s’agit d’une politique d’assimilation forcée. »

Telle est la raison réelle du refus de la coofficialité et elle est la même pour le statut de résident.

Une doctrine totalitaire masquée. Un génocide complet culturel pour la disparition d’un petit Peuple. Majoritaires les natios? Le Bras de fer continuera. Vince per ùn more.

Max Simeoni.

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