Oui, on perd la tête et il est urgent de retrouver un « pocu dighjudiziu » pour éviter le pire.
Jamais la situation n’a été aussi claire. Le pouvoir jacobin a déclaré ouvertement la guerre aux natios et à leur projet de sauver le Peuple Corse menacé de disparition. Finis les faux semblants, les statuts inefficaces, pour gagner du temps sans rien changer à son projet criminel d’endormir, d’affaiblir ses défenses, et dissoudre le cadavre dans les acides de son colonialisme.
Le Président nous a d’abord abordés avec un sourire de girondin vite transformé en rictus lors de l’anniversaire de l’assassinat d’Erignac, mise en scène d’une cérémonie solennelle du culte jacobin concélébrée avec ses diacres, Chevènement, Larcher et ses servants préfectoraux.
Le décor bien réfléchi expurgé de tout autre référence que celle de sa République des jacobins, les élus locaux, humiliés, traités comme des indigènes à rabaisser. Tellement énorme que cela paraissait irréel, il a fallu un peu de temps pour l’admettre.
On a pu penser que le Chef de l’Etat voulait conforter son corps préfectoral ou qu’il s’était laisser emporter par son narcissisme enflé du pouvoir absolu tout neuf qu’il détenait. Mais la raison essentielle n’est pas de nature individuelle, elle est politique.
Il s’est trouvé devant une majorité « absolue » des natios et aucun relais des républicains des clans, leur reconnaître la moindre légitimité revenait à reconnaître un quelconque bien fondé à leur idée de Peuple Corse malmené par la République. Il les traite donc de simples « élus locaux » qui « ne font pas la loi » même majoritaires à 70 ou 80 %.
Il prépare la suite de son offensive par le défilé de ses ministres et un titre attrape-nigaud d’une Madame Corse. Ils viennent, prennent les pouls, ânonnent de vagues promesses, notent les failles, désarment les esprits et laissent espérer que malgré tout le dialogue reste possible en disant qu’il appartient à Jupiter de décider en dernier ressort.
Nos élus sont dans la seringue.
Ils n’ont pas de plan B. Ils leur faut aller jusqu’au bout pour ne pas être accusés d’être ceux qui ont refusé le dialogue. Les restes de clans réconfortés ont repris l’espoir de revenir dans le jeu.
Ils reprochent aux natios d’être trop exigeants en parlant de coofficialité, de résidence, de fiscalité bref de ce Padduc qu’ils avaient eux-mêmes voté auparavant.
Nos élus, faute de plan B, discutent pour la mise en place de l’Assemblée Unique. Ils cèdent sur l’article 74 et acceptent l’article 72-5 en espérant qu’ils obtiendront de quoi faire usage en dialoguant sur la loi qui précisera les tenants et les aboutissants de cet article. Mais Jupiter a vite fait savoir que le cadre de l’article est une cage qui neutralise toute velléité de liberté.
Je crains que le remarquable acharnement de nos députés ne sera pas productif en espérant arracher quelques espaces de liberté, d’autonomie. Il n’est cependant pas inutile. Ils font connaître notre volonté commune, notre patience qui n’a rien d’un renoncement, ils informent ceux de leurs « collègues » honnêtes et capables de nous comprendre.
Bref ils préparent sur le front parlementaire la suite de la lutte. Nous avons commencé par l’internationalisation du problème Corse au Parlement européen, nous en sommes à sa « nationalisation » dans le Parlement républicain. Il faut continuer et ouvrir tous les fronts possibles. Mais le jacobinisme doctrinaire totalitaire, n’arrêtera que contraint et forcé dans un rapport de force politique où nous ne devons user que des moyens démocratiques pour être efficaces, la violence clandestine est dans le contexte une aubaine pour le pouvoir. Les avancées démocratiques de ce qui reste du Peuple sur sa terre sont indispensables pour faire comprendre ce qui est évident, que beaucoup de Corses constatent mais le plus souvent sans bien comprendre les mécanismes de la mort lente à l’échelle d’une vie d’homme mais de plus en plus rapide à celle du tempo de l’Histoire.
Comment faire savoir les causes de la chute démographique si on n’a pas connaissance de la Corse «réservoir d’hommes vidé» et des conséquences des « lois douanières » qui ont asphyxiées les productions de l’île, il y a deux siècles ? Les deux combinées rendant l’île entièrement dépendante, «aliénée». Comment expliquer que cette politique coloniale, le mot est pertinent, a toujours été poursuivie jusqu’à nos jours ? L’appropriation de la terre par la Somivac au détriment des paysans corses. Le développement du tourisme par la Setco et la Datar au profit des consortiums capitalistes qui avaient déjà mis la main sur des kilomètres du littoral (Agriates, la Testa Vintilegna, Devez, etc.). Comment faire bien comprendre concrètement toutes les luttes de terrain menées depuis plus de 50 ans par les natios alors qu’Aléria la plus citée a déjà 40 ans ? Que peut vouloir dire pour ceux qui ont 20 ou 30 ans la divulgation par les natios du plan du rapport de l’Hudson Institut commandité secrètement par la Datar.
Comment faire comprendre qu’une seule langue officielle sur un territoire où il en existe deux est le choix d’une politique d’assimilation forcée ce que affirment les experts linguistes de l’Unesco dans leur rapport de 2003 sur les langues régionales et que le volontarisme individuel s’il exprime une demande, une résistance mais que seule la coofficialité peut permettre une politique de restauration ?
Bref comment libérer le potentiel qui reste de notre Peuple pour sa survie sans qu’il ne connaisse le mal qui le ronge et ne se laisse pas duper par la désinformation et les manipulations constantes du système républicain jacobin ?
J’ai entendu dire dans ma jeunesse des sornettes énormes par certains de mes aînés élus du genre : « le droit pour tous, les privilèges pour les amis » ou « bisogna à mugne à Mariana » , une ignorance abyssale doublée d’une vanité de qui se croit malin et qui n’est que l’imbécillité d’un auto colonisé, «a cerbellu imprestatu »… un peu similaire, apparemment moins burlesque, les dires que la langue s’apprend à la maison alors que sous le même toit il n’y a plus personne capable de la transmettre de plus en plus souvent et ce n’est pas l’effet du hasard. Même bobard quand on affirme que seul l’entreprise crée des emplois alors que les emplois précaires prolifèrent plus qu’ailleurs… inutile d’insister ce serait une encyclopédie qui pourrait répertorier toutes les vicissitudes dont l’Etat français nous a accablés.
Longtemps les clanistes nous serinaient « présentez-vous aux élections » et on verra… à des élections qui ridiculisaient le suffrage universel (listes truquées, urnes bourrées, listes d’émargement prenant le maquis, rendues à la préfecture des jours après), des élections qui faisaient la joie des chansonniers parisiens, omerta de l’autorité républicaine complice. C’est un des premiers combats que les natios ont dû mener pour rétablir un peu de dignité à la démocratie et au suffrage universel. Il n’est pas étonnant que les avancées sur la voie démocratique soient des avancées pour la survie du Peuple.
Elles sont liées. Elles permettent le débat public qui analyse toutes les données pour convaincre et faire les choix. Elles sont celles qui ouvrent les portes de l’intelligence et de la responsabilité collective.
La situation délabrée de notre Peuple, après plus de deux siècles de ce colonialisme, devrait nous inciter à être vigilants pour que les erreurs du passé soient bannies de notre conduite.
Jupiter nous fait comprendre que la majorité absolue n’avait pas d’avenir sauf à servir le colonialisme.
Il nous a bien informés à ce sujet. Pourquoi diable on ne tire pas immédiatement la leçon ? Pourquoi chercher des alliances de type électoral pour un pouvoir local incapable dans le cadre des institutions actuelles de mener le combat historique d’émancipation.
Certes il faut détenir ce pouvoir local, ne pas le laisser à la discrétion des jacobins, et le gérer au mieux avec transparence et fraternité, pour gagner encore plus de Corses à la cause nationaliste, pour gagner quelques points dans les négociations avec le pouvoir central. Mais l’effort est de mobiliser les ressorts de l’âme corse et qu’elle enclenche la cohérence et le mental au niveau du combat sans merci pour survivre. Le totalitarisme jacobin est capable de tout. N’at- il pas sorti des barbouzes de la naphtaline pour faire couler le sang ?
Les arrières-pensées de mandats pour un cadre institutionnel inefficace sur l’essentiel sont dérisoires et néfastes. J’entends dire que certains bavent pour des indemnités de mandats et la notoriété attachée au titre d’élus.
Sont-ils déjà happés par des tentations délirantes de politicards ?
Un coeur de natio devrait être vacciné. Il est temps de faire les rappels.
Il n’y a aucune raison valable de ne pas serrer les rangs. Aucune avouable ?
La fusion pour unifier les autonomistes qui n’ont aucune divergence de fond ou de stratégie s’impose. Il faut savoir accepter la démocratie interne pour se faire confiance, pour utiliser la compétence et la disponibilité de chacun. Comment peut-on ne pas miser sur l’intelligence et la responsabilité collective si on est lucide ?
À pòpulu fattu bisogna à marchjà ? Cumè fà per fallu ? In ghjunghjendu à burlàssi trà fradelli di fede ? Ohimè !
Max Simeoni.