Les choses bougent en faveur de la réserve naturelle de Scàndula. Les eurodéputés François Alfonsi et Michelle Rivasi ne renoncent pas et continuent de mener bataille pour la récupération du Diplôme Européen. Voici leur dernier courrier adressé le 1er février au Secrétaire Général de la Convention de Berne au Conseil de l’Europe. Affaire que nous suivons de près.
“Monsieur le Secrétaire Général
Lors de précédents échanges de courriers, nous avons évoqué l’avenir de la réserve de Scandola, après que les experts du Conseil de l’Europe aient préconisé le 19 mars 2020 le retrait du diplôme européen qui lui avait été attribué en 1985.
Nous avons, comme vous le demandiez le 29 mai 2020, « encouragé les autorités de la réserve naturelle » à faire connaître « les progrès réalisés », de façon à engager un processus de réattribution du diplôme européen dont votre séance plénière du 04 décembre 2020 a confirmé le retrait en suivant les préconisations du Comité des Experts, tout en leur demandant « de prendre en considération les nouvelles informations transmises en vue, le cas échéant, de renouveler le Diplôme Européen en cas de preuves suffisantes d’amélioration ».
Aussi nous tenons à vous informer de certaines évolutions intervenues ces derniers mois.
En Corse, François Alfonsi a rencontré les dirigeants du Parc et de l’Office de l’Environnement pour les sensibiliser à vos attentes, et a été depuis régulièrement invité aux différentes initiatives qu’ils ont prises.
Par ailleurs, depuis le Parlement Européen, nous avons engagé ensemble une démarche de concertation avec l’État, dont la réserve dépend pour sa réglementation, et nous avons rencontré à cet effet Madame Bérangère Abba, Secrétaire d’État à la biodiversité, en novembre dernier.
Voici ce qu’il ressort de ces démarches.
1/ Concernant la sur-fréquentation de la réserve.
Les gestionnaires, en l’état de la réglementation qui est régie par un décret ministériel datant de 1975, ne disposent d’aucun moyen de régulation directe. Nous avons donc sollicité l’État pour qu’il modifie son décret et introduise une possibilité de limitation du nombre de professionnels et de navires assurant les prestations de visite de la réserve. La Secrétaire d’État a objecté qu’il s’agissait là d’une procédure (la modification du décret de gestion de la réserve) qui ne pourrait aboutir avant 2022. Elle s’est engagée à la mettre en œuvre en comprimant au mieux les délais.
Cependant, les acteurs locaux ont engagé dès cette saison une action intéressante qui va agir dans le sens d’une réduction significative de cette fréquentation dès cette année 2021.
Ainsi la commune d’Ota, qui gère le port de Porto d’où sont acheminés la plus grande partie des visiteurs et d’où partent la majorité des bateaux rapides 12 places dont la multiplication depuis 2011 a provoqué un très fort accroissement des circuits de visite, et donc des dérangements, a pris l’initiative de réduire le nombre de bateaux autorisés à stationner dans son port. Comme il s’agit du point de départ le plus proche de la réserve, et donc des bateaux à passagers qui peuvent multiplier les rotations en profitant de la proximité, l’action menée par le Maire d’Ota aura un fort impact pour réduire la fréquentation.
Ainsi, durant l’été 2020, 30 bateaux assurant la visite de la réserve étaient comptabilisés à Portu. Dans son appel à candidatures, publié par annonce légale en décembre 2020, le maire d’Ota, gestionnaire du port de Portu, a limité à 13 le nombre de places accordées à ces professionnels pour les cinq prochaines années, avec au maximum deux bateaux par société. Soit au total 26 bateaux autorisés, -13% par rapport à 2020. Compte tenu de la fréquentation supérieure par ces embarcations par rapport à celles qui viennent de plus loin (Calvi, Aiacciu, golfe de Sagone), l’impact sera une baisse de l’ordre de 20% par rapport à 2019 et 2020, des excursions de bateaux s’adonnant à cette activité dans la réserve à compter de l’été 2021. Et lors de la réunion des élus tenue à Portu le 15 décembre dernier, M. Pierre Paul de Pianelli, maire d’Ota, a exprimé sa volonté de ne pas renouveler lors de la prochaine attribution les créneaux qui se seraient libérés d’ici là du fait de l’abandon d’un armateur (arrêt volontaire, départ à la retraite ou faillite).
2/ Concernant la protection des herbiers de Posidonie.
Lors de la rencontre avec la Secrétaire d’État à la biodiversité, Madame Bérangère Abba, nous lui avons demandé que l’État intervienne dès cette année, sans attendre un nouveau décret ministériel. En effet, le 19 mai 2000, le Préfet maritime a pris un arrêté qui interdit le mouillage de nuit dans la réserve. Il est donc tout à fait possible que le même Préfet maritime modifie son arrêté et prononce cette interdiction 24 heures sur 24.
Le Conseil scientifique de la Réserve a fait état de la dégradation des herbiers du fait des plaisanciers et de leurs ancres, et c’est là un des effets les plus clairs de la sur-fréquentation touristique. Il a aussi fait état d’un travail d’enquête auprès des plaisanciers qui indique que cette mesure d’interdiction de mouillage serait plutôt bien acceptée, et que d’ores et déjà ils ne sont qu’une petite minorité à jeter l’ancre (environ 13%). Mais cela suffit pour provoquer des dégâts jugés importants par tous les scientifiques.
Madame Abba nous a promis d’étudier cette proposition et de nous apporter une réponse rapide. Voilà deux mois que notre entretien a eu lieu, et nous relançons notre demande. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de sa réponse. Vous trouverez ci-joint les documents qui ont accompagné notre démarche en novembre dernier.
3/ Concernant les aires de quiétude pour les balbuzards.
Elles ont été mises en place durant la période de reproduction du balbuzard de l’été 2019, et renouvelées en 2020. Cette mesure est bien respectée par les bateliers, et doit encore être confortée envers les autres usagers, notamment les plaisanciers, qui n’en sont que peu informés. Lors de la réunion de Portu du 15 décembre dernier, le Parc Régional s’est engagé à développer l’information à ce sujet par tous moyens.
4/ Concernant le renforcement des moyens et l’extension de la Réserve.
D’ores et déjà, dès le printemps 2021, le Parc Régional et l’Office de l’Environnement de la Corse ont décidé de positionner des moyens (deux bateaux et quatre agents) à Portu, en complément de la surveillance exercée jusque-là depuis Galeria. Ces moyens nouveaux viennent par anticipation de l’extension de la Réserve pour laquelle la Collectivité de Corse a délibéré le 28 juillet 2020.
Lors de la réunion des acteurs locaux le 15 décembre 2020, un accord unanime est intervenu pour retenir un périmètre définitif calé sur les limites du site Unesco au sud, levant les dernières oppositions.
Les atermoiements sont désormais derrière nous, et la procédure d’extension est activement poursuivie.
Compte tenu de ces évolutions survenues ces derniers mois, et des avancées que nous attendons, notamment au niveau de l’État concernant l’interdiction de mouillage dans la réserve, il nous semble justifié que le Comité des Experts du Conseil de l’Europe puisse instruire un avis actualisé.
Avec le Conseil Scientifique et son Président Charles-François Boudouresque, nous entretenons une concertation régulière, avec l’espoir que cette réserve à laquelle nous sommes extrêmement attachés trouve des conditions futures de préservation garanties, suffisantes et pérennes.
Nous nous tenons à votre disposition, et à celle de votre Comité d’Experts, pour compléter cette première information, et nous vous prions d’agréer, Monsieur le Secrétaire Général, l’expression de nos sentiments les meilleurs.” •
François Alfonsi et Michèle Rivasi, MEP
En savoir plus : www.francois-alfonsi.com