Nous poursuivons la retranscription du discours du 19 août 1973 prononcé par Edmond Simeoni au VIIe congrès de l’ARC à Cateraghju. Il y développait la revendication de l’autonomie que l’ARC, devenue Azzione pè a Rinascita Corsa, avait fait sienne lors de ce congrès historique. Le discours était révolutionnaire, dur dans la forme, les militants étaient prêts à tous les sacrifices et l’ont démontré par la suite. C’était il y a près de 50 ans. Il est grand temps que l’État entende cette revendication d’autonomie de plein exercice et de plein droit telle qu’elle est exprimée aujourd’hui, soutenue par près de 70 % des Corses dont 12 % souhaitent aller encore plus loin vers l’indépendance. Extraits.
« La Corse est une colonie française. Réservoir d’hommes, aliéné sur le plan culturel et économique, victime de la discrimination, le Peuple Corse, pourtant férocement attaché à sa terre, est contraint à la dilution, à l’exil, donc à la disparition définitive à court terme. Il existe une incompatibilité formelle entre le rôle assigné à la Corse dans l’économie française (en particulier rôle de fournisseur de devises en matière de tourisme), et les aspirations du Peuple Corse à la survie, à la dignité, à la promotion, à la maîtrise de son destin, dans son pays. Mieux l’incompatibilité se radicalise car l’État français, pour mener à bon terme son plan, doit détruire l’opposition chaque jour plus acharnée que représente l’identité corse : c’est la voie qu’il a choisi en 1973 en adoptant le très officiel « Schéma de déménagement de la Corse » qui postule au terme de 1985, la mainmise totale des intérêts étrangers sur notre île, et la disparition de notre Peuple par une immigration massive de non-Corses.
Nous sommes donc en état de légitime défense, et nous devons, désormais, forger et renforcer les armes de celle-ci.
Le 26 juillet 1973, l’Assemblée Générale des militants de l’ARC a Abbazia (Fiumorbu) décide, après discussion à la base, à la quasi-unanimité, que, l’Action Régionaliste Corse doit se transformer en « Azzione pè a Rinàscita Corsa » (ARC demeurant donc notre sigle, confirmant ainsi continuité et progression).
L’ARC nouvelle, mouvement démocratique, revendique pour la Corse un Statut d’Autonomie, condamnant explicitement, sans équivoque, toutes références à l’irrédentisme, au fascisme, et à tous les totalitarismes en général.
Cette Autonomie est parfaitement compatible avec l’Article 72 de la Constitution de la République Française et seule une conception restrictive, jacobine, et entachée de procès d’intention de l’Article I de cette même Constitution (la France est Une et Indivisible) peut s’opposer à cette revendication légale, non séparatiste.
Quelle autonomie ?
Il s’agit d’une autonomie partielle, n’impliquant pas pour la Corse l’obtention de la souveraineté internationale qui reste l’apanage de la République Française ; celle-ci conserve, sans partage, les maîtres instruments : le domaine des Affaires étrangères et celui de la Défense National ; par contre, la Corse Autonome, ayant les compétences législatives, exécutives, administratives et financières dans le domaine des infrastructures générales, de la mise en valeur, des transports extérieurs, de l’Éducation, de la Santé publique, du Commerce extérieur, etc. Dans tous ces domaines, des accords préférentiels seront tenacement recherchés et privilégiés avec l’État français sur la base du strict respect des intérêts réciproques. Il s’agit, compte tenu de l’évolutivité de la situation et des plans néfastes désormais publics de l’État français, d’une revendication modérée et ferme à la fois, que nous devons rendre tous les jours plus crédibles.
Elle est :
– conservatoire, cela signifie que tout ce qui est fait désormais contre les Corses, pourrait, demain, être défait par eux ;
– adaptée à la survie et à l’épanouissement de notre Peuple ;
– politique et dont le contenu se suffit à lui-même, ceci excluant formellement toute référence à des philosophies, ou à des schémas importés. » •