PLU de Bonifaziu

Illégal en totalité !

L’association U Levante avait saisi le tribunal administratif de Bastia d’une demande d’annulation du refus de Jean-Charles Orsucci, le maire de Bonifaziu, de saisir le conseil municipal afin d’abroger le plan local d’urbanisme en juin 2020. Celui-ci, qui avait été approuvé en 2006 et modifié à plusieurs reprises en 2015, a été jugé illégal en totalité le jeudi 17 février dernier.

 

Le tribunal s’est fondé sur les dispositions du code de l’Urbanisme ou encore du Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (Padduc).

Le tribunal administratif « a jugé que le classement des zones constructibles de plus de 1000 hectares de terrains était déséquilibré, car permettant une augmentation potentielle de 60 % de la population de la commune de Bonifacio, alors que celle-ci n’a crû que de 11 % en 10 ans. Il a ainsi estimé qu’en ouvrant à l’urbanisation de vastes secteurs de la commune, le long du littoral et autour de hameaux à l’habitat limité et dispersé, les auteurs du PLU ont favorisé un mitage qui ne permet pas d’atteindre les objectifs de développement durable prescrits par la loi. »

La municipalité de Bonifaziu, qui dispose de deux mois pour interjeter appel, a publié un communiqué pour éclaircir la situation :

« Tout d’abord, nous rappelons que le PLU de Bonifacio a été adopté en 2006 sous une précédente mandature, et que le maire actuel, alors conseiller municipal d’opposition, avait voté contre son approbation. Pour autant et depuis son accession aux responsabilités en mars 2008, la municipalité demeure contrainte d’appliquer le PLU en vigueur. Et ce d’autant plus que, attaqué en 2006 dans son intégralité par les associations de défense de l’environnement, la grande majorité du PLU avait été successivement validée par le Tribunal Administratif, la Cour Administrative d’Appel puis le Conseil d’État le 9 décembre 2011. En 2008, soutenue alors par les associations de défense de l’environnement, la municipalité prévoyait d’étendre la constructibilité notamment dans la campagne bonifacienne. Cet objectif politique constant s’est heurté depuis à l’enchevêtrement des lois et règlements qui ont impacté la procédure de révision générale du document d’urbanisme, certes imparfait mais qui avait le mérite d’exister. »

Le jugement du tribunal administratif de Bastia signe la fin de l’« espoir de construire dans la campagne bonifacienne » selon la municipalité bonifacienne, ce qui serait « catastrophique pour la population bonifacienne ». Jean-Charles Orsucci tiendra une réunion publique « sur les suites à donner à cette décision » le 18 mars à 18h à l’espace Saint-Jacques.

 

De son côté, l’association U Levante se félicite de cette décision : « 18 mois après, le Tribunal administratif reconnaît la légitimité de nos revendications : la commune de Bunifaziu a choisi en 2006 un modèle de développement communal complètement disproportionné, basé sur la consommation et l’exploitation à outrance de ses sites, parmi les plus beaux de Corse ». L’association de défense de l’environnement précise dans ses communiqués qu’« entre 2013 et 2019, 854 logements ont été autorisés à la construction. En parallèle, la commune a gagné 231 habitants permanents. C’est 6 à 7 fois plus que les besoins de la population locale dans une commune où il y avait déjà plus de résidences secondaires que de résidences principales. »

« Nous ne comptons plus les nombres de fois où les associations, seules, ont dénoncé et déféré au TA les atteintes régulières et continues portées à l’environnement du sud de l’île » déplore encore l’associu U Levante. « Le maire, l’adjoint en charge de l’urbanisme, et tous les services de l’État » avaient connaissance de l’illégalité de ce PLU, « le conseil municipal a eu 15 ans pour l’abroger… mais ne l’a pas fait. »

Mis en chantier en 2013, et malgré moults tentatives notamment de l’Agence de l’aménagement de l’urbanisme et de l’énergie de la Corse pour inciter le maire à relancer l’élaboration d’un nouveau PLU en compatibilité avec le Padduc, les choses sont restées en l’état. « Heureusement, précise encore U Levante, l’association ABCDE avait déféré une partie de ce PLU et obtenu l’annulation en 2010 de plusieurs zonages littoraux. Ce PLU illégal d’ouest en est et du nord au sud n’a pas non plus été mis en compatibilité avec le Padduc ». Mise en compatibilité qui aurait dû être effective fin 2018 pour toutes les communes de Corse, a fortiori pour les communes qui subissent une forte pression urbanistique. U Levante dénonce cet attentisme général dans l’île, alors que le Padduc a valeur de directive territoriale d’aménagement. En effet, l’application de ce PLU « pendant 15 ans a pour conséquence un mitage extrêmement important du territoire bonifacien, la perte d’espaces stratégiques agricoles, le saccage de paysages exceptionnels, l’inaccessibilité à de grandes portions du domaine public maritime occupé par des résidences secondaires luxueuses les pieds dans l’eau. »

Il est grand temps de préserver et réparer ce qui peut encore l’être. La mise en route d’un nouveau PLU dans le respect du Padduc est un défi à relever par la commune, mais aussi par la Collectivité de Corse. •

Arritti.