Les nouveaux filtres à particules du navire amiral de la Méridionale ont été inaugurés le 5 septembre dernier lors de la traversée Marseille-Aiacciu. La compagnie, qui était déjà pionnière dans le raccordement des navires au courant de quai, effectuera désormais la liaison entre Marseille et la Corse sans émettre de fumées noires.
Une prouesse technologique. Trois ans de recherches ont été nécessaires avant son installation. Cette innovation a été rendue possible par la mise en place d’un filtre sur les moteurs captant 99 % des rejets de particules fines et des oxydes de soufre, ce qui neutralise les émissions polluantes. Le fonctionnement de ce procédé connait trois grandes phases selon Christophe Seguinot, directeur technique de l’armateur basé à Marseille : « Vous avez les tuyaux d’échappement dans lesquels on injecte du bicarbonate de sodium. Par réaction chimique, les particules acides contenues dans les gaz vont être neutralisées puis filtrées. Les déchets solides sont ensuite récupérés à terre sous forme de poudre par les incinérateurs. »
Une solution inédite. La méridionale avait expérimenté dès 2019 la marinisation des filtres à particules à base de bicarbonate de soude utilisés traditionnellement dans les complexes industriels comme les centrales thermiques. Après le succès du test, l’innovation a alors été étendue aux quatre moteurs. La création de ce filtre révolutionnaire a demandé un investissement de 16 millions d’euros dont plus de la moitié financée par la région PACA et près de 5 millions par l’Ademe. Cette innovation intervient dans un contexte de plus en plus tendu entre les élus méditerranéens et les professionnels du maritime alors que le maire de Marseille a lancé, cet été, une pétition contre la pollution émise par les bateaux de croisière. Benoit Payan avait alors réuni 50 000 signatures, signe du mécontentement des riverains et habitants de la côte face à la pollution de l’air.
Le Piana est à présent le seul navire à aller au-delà de la règlementation internationale qui impose une réduction par sept de la teneur en soufre des carburants utilisés dans le transport maritime, passant de 3,5 % à 0,5 %. Mais le choix de la Méridionale reste une exception alors que les autres compagnies utilisent des systèmes de circuits ouverts où l’eau utilisée pour nettoyer les fumées est directement rejetée en mer. « La prochaine étape concernera les rejets de dioxyde d’azote, où nous visons une baisse de 70 % », développe Christophe Seguinot.
Le transport maritime, qui représente 90 % du commerce mondial, est responsable de 4 % des émissions de CO2 et de 10 % des émissions de soufre. Cette solution pourrait être généralisée pour faciliter le respect de la décision de l’Organisation maritime de limiter les émissions de soufre à 0,1 % à compter de 2025 en Méditerranée. Les compagnies continuent cependant de privilégier les fuels lourds dégageant beaucoup de matières polluantes comme l’oxyde d’azote et l’oxyde de souffre. •