La « proposition de loi visant à favoriser l’assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété » a poursuivi son chemin législatif sans encombre. Déposée par le gouvernement le 16 novembre 2016 selon une « procédure accélérée », votée en première lecture le 8 décembre 2016, elle vient d’être adoptée par le Sénat le 8 février 2017. Son adoption finale en seconde lecture par l’Assemblée Nationale sera désormais une simple formalité. Ce succès fait partie du « paquet » négocié par la Collectivité Territoriale de Corse dans le cadre de la promulgation des ordonnances en vue de la Collectivité Unique, que le Ministre en charge du dossier, Jean Michel Baylet, a mené devant l’Assemblée Nationale et le Sénat dans le respect des engagements pris.
Cette loi propose principalement deux mesures. La première consiste à sécuriser la procédure notariale de prescription acquisitive par laquelle de très nombreux biens pourront être enfin titrés, l’autre à prolonger jusqu’à 2027 une disposition prévue pour prendre fin en décembre 2017 qui réduit de moitié les droits de succession dans l’île.
En effet, durant des décennies, du fait de la déprise économique, notamment dans l’intérieur de l’île, qui a généré un désintérêt des héritiers, et du fait de l’absence d’obligation de déclaration des successions qui découlait des évolutions successives des arrêtés Miot depuis le 19ème siècle, ce qui exonérait de fait du paiement des droits, les propriétés dans l’île sont restées dans l’indivision. Ainsi, seulement 350 déclarations de succession étaient enregistrées pour 2800 décès en moyenne par an. L’effet pervers de ce système est qu’une grande partie du foncier est propriété de personnes décédées il y a plus de cent ans, dont les enfants sont presque centenaires quand ils sont encore en vie, que la Corse a un taux de « biens non délimités » considérable, et que cet imbroglio foncier ne peut qu’aller crescendo.
D’autre part les systèmes en place d’anticipation des successions n’étant pas mis en œuvre (donations libres de droits d’un parent à ses enfants), la mise en œuvre d’une taxation totale au moment de la succession revenait à alourdir fortement l’impôt foncier globalement payé en Corse.
Il est impossible de favoriser les sorties d’indivision si les droits à payer sont tels que le bien hérité doit aussitôt être vendu pour pouvoir les acquitter. Et, politiquement, il est impossible d’accepter un dispositif qui, en multipliant les biens mis à la vente, amènerait à favoriser la spéculation immobilière.
C’est pourquoi cette question des arrêtés Miot a toujours été au centre de l’action politique en Corse, faisant l’unanimité des forces politiques. Edmond Simeoni a rappelé récemment combien la société civile, et notamment la profession des notaires engagée derrière Me Alain Spadoni dans tous les combats depuis 25 ans, a été présente dans ce combat. Le vote intervenu au Parlement est un nouveau succès à mettre à leur actif.
Dans un avenir que nous espérons proche, la Corse pourra décider par elle-même de son statut fiscal. En attendant cette prolongation de dix ans était essentielle.
Fabiana Giovannini.