Depuis notre dossier consacré aux menaces qui pèsent sur le secteur aquacole corse*, représenté par le groupe Gloria Maris, premier exportateur de l’île employant 200 salariés dont 43 en Corse, l’affaire s’est encore assombrie. Afin de ne pas essuyer un refus et de mieux se préparer, l’entreprise a retiré sa demande de permis de construire déposée pour sa réinstallation à 200 mètres de sa base à terre actuelle pour une meilleure intégration au site. En clair, cette demande permettait d’éloigner de la limite du Grand Site l’installation reprochée et de l’améliorer au niveau fonctionnel et paysager. Le prétexte d’atteinte environnementale invoqué par ses détracteurs pour respecter le Grand Site est donc fallacieux.
Les reproches qui sont faits à l’entreprise Gloria Maris cachent en réalité une volonté de voir purement et simplement disparaître la ferme aquacole du site de la Parata au profit d’un tourisme de plus grande ampleur, avec l’aménagement d’un nouveau parking, récupérant probablement le ponton actuel pour les bateliers. Le dernier conseil municipal a confirmé cette crainte : la commune d’Aiacciu, après avoir participé et même soutenu le dossier de réinstallation, souhaite désormais voir disparaître la ferme aquacole du site de la Parata.
Or La Parata est identifié au Padduc comme une zone privilégiée dédiée à l’aquaculture et la ferme tire son succès justement de cette installation qui bénéficie d’une courantologie idéale et constante, permettant des conditions d’élevage optimales qui lui ont d’ailleurs valu l’obtention de ses labels de qualité. La ferme aquacole n’est pas un problème pour le Grand Site. Celui-ci a été obtenu alors que la ferme était déjà installée sur le secteur. Ce Grand Site n’a pas vocation à s’élargir puisqu’il est concentré sur la pointe de La Parata et des îles Sanguinaires. Le Réseau des Grands Sites de France précise bien dans sa charte qualité que « l’équilibre doit être trouvé, dans un esprit de concertation, entre l’accueil de qualité d’un public toujours plus nombreux et les activités économiques, touristiques, agricoles ». Un Grand Site n’est donc pas incompatible avec une activité économique. Et c’est bien la raison pour laquelle l’existence de la ferme aquacole depuis 30 ans n’a pas gêné l’obtention du label Grand Site à La Parata. La concertation a été jusqu’ici de mise, puisque c’est avec toutes les parties que le dossier de réinstallation a été étudié et accepté en son temps. Aujourd’hui, remettre en cause ce nouvel emplacement revient à remettre en cause l’existence de l’entreprise en Corse. Et contester une telle activité en lien avec la mer, reviendrait à remettre en cause toutes les activités économiques développées sur les Grands Sites de France, y compris par exemple le Grand Site de Patrimoniu… ça n’a pas de sens !
Que dit le Padduc ?
Le Padduc est une directive territoriale d’aménagement à laquelle la Collectivité de Corse et toutes les collectivités, y compris les communes, doivent se conformer. Dans son Schéma de mise en valeur de la mer (SMVM), document crucial intégré au Padduc, il est dit : « L’aquaculture constitue un gisement d’emplois qualifiés à promouvoir et encourager, d’autant qu’elle peut contribuer au rééquilibrage territorial sur le littoral. L’aquaculture marine corse représente, en valeur, 1/6e de la production française ». En fait, c’est bien plus que cela aujourd’hui. Le Groupe Gloria Maris est aujourd’hui leader français du secteur aquacole. Le SMVM ne s’y est pas trompé en louant ce secteur d’activités qui, bien maîtrisé, peut développer de la richesse pour l’économie insulaire dans le respect de son environnement. La ferme Acquadea de la Parata est aujourd’hui le premier exportateur de l’île, avant la clémentine de Corse !
Le SMVM qui, rappelons-le, édicte pour le Padduc les prescriptions pour asseoir le développement de la Corse à partir des richesses de la mer, poursuit : « Le SMVM doit donc permettre de favoriser le développement de cette filière tout en préservant le milieu. Le développement passe par le confortement des activités déjà existantes, par la création de nouvelles fermes dans les espaces favorables au développement de l’activité qu’il convient de préserver en ce sens, mais aussi par l’amélioration des conditions d’accès des professionnels à la mer, au foncier à proximité du rivage et au foncier à vocation économique et industrielle ». C’est ce vers quoi doivent tendre nos politiques : encouragement et soutien aux professionnels du secteur, notamment par « l’accès au foncier à proximité du rivage ». C’est dans cet esprit respectueux des directives du Padduc que la concertation s’est organisée entre tous les acteurs (commune d’Aiacciu, Collectivité de Corse, services de l’État, direction du Grand Site) pour étudier le projet de réinstallation de la ferme aquacole, de sorte à libérer l’emplacement actuel proche de la Maison du Grand Site, tout en lui permettant de rester à proximité des cages et du ponton indispensables à son activité. Cette « concertation » était-elle un leurre pour remettre en cause l’existence même de l’entreprise sur site ? On peut s’interroger aujourd’hui… Ce qui relèverait alors de la manœuvre.
« Les produits issus de l’aquaculture Corse, dit encore le SMVM, bénéficient de la bonne image environnementale de la Corse, qui pourrait largement participer à l’attractivité de la production et au développement de labels de qualité. Les certifications telles que le label rouge (porté par le Syndicat des aquaculteurs corses) ou encore le label bio AB sont à encourager ». Gloria Maris bénéficie de cette excellence environnementale que l’entreprise a respecté au point de décrocher justement le fameux Label rouge pour son élevage de maigre, seul Label rouge de Corse (également en bonne voie d’obtention pour la dorade).
Au total, le groupe Gloria Maris compte pas moins de sept labels de qualité (dont quatre en Corse) : « Bio », « Aquaculture de nos régions » « AB-Agriculture biologique », « Producteur artisan de qualité », « GlobalGAP », « Friend of the sea », « Origine France Garantie » et « Label rouge ».
Et le SMVM de prescrire : « Les fermes aquacoles existantes sont confortées et protégées dans leur vocation ».
Aussi, Arritti ne peut que réitérer son questionnement : y a-t-il un avenir pour l’aquaculture en Corse ? Qu’en pense la Collectivité de Corse qui a en charge l’application de son Schéma de mise en valeur de la mer et notamment de son plan de développement de l’aquaculture ? •