Le football est un phénomène de société. Sur le terrain, dans les stades et hors les stades, il déclenche le meilleur et le pire. À Aiacciu ce week-end, la Corse a été le théâtre d’un nouvel épisode particulièrement révoltant de ses débordements.
Le meilleur du football est une passion partagée en famille comme celle qu’était venu vivre dans les loges de Timizzolu ce gamin supporter de l’OM avec son père et sa mère.
Le pire du football, c’est cette hystérie qui explose de façon incontrôlée parmi des groupes de supporters violents qui finissent par perdre toute raison jusqu’à agresser violemment cette famille paisible.
Pour préserver le meilleur, il faut réprimer les tenants du pire, et, à chaque match, les autorités choisissent, ou pas, des mesures préventives. Des services de police et de renseignement sont consacrés à cette tâche, scrutant les réseaux sociaux, suivant de près les derbys les plus chauds et les clubs les plus à risques, et prenant in fine des décisions allant de moyens renforcés de surveillance à des interdictions de stade pour les supporters.
Le match ACA-OM avait lieu le samedi, et, dès le jeudi soir les esprits se sont gravement échauffés alors qu’une partie seulement des supporters marseillais étaient déjà en ville. Le maire d’Aiacciu, comme tous ses concitoyens, a rapidement pris conscience de l’exacerbation des tensions qui ne pouvaient qu’aller crescendo dans les 48 heures suivantes. Il a demandé au préfet d’interdire la venue de supporters extérieurs, comme cela se fait fréquemment pour les derbys les plus chauds, Marseille contre Nice, Lyon contre Saint-Étienne et aussi… Bastia contre Aiacciu. Il n’a pas été entendu.
Après des incidents répétés lors de la seconde nuit, il a demandé l’interdiction du match. Il n’a pas été davantage entendu. C’est bien dommage pour cette famille meurtrie, pour ce journaliste de Via Stella sauvagement agressé, et pour toutes les victimes, supporters, passants et commerçants de ces trois jours de folle dérive dans les rues d’Aiacciu et dans les travées du stade de Timizzolu.
Il faut dire aussi la honte qui nous étreint au récit de ce qui est arrivé à cet enfant, cette maman et ce père de famille. Elle n’en est que plus grande car on les entend défendre l’image de la Corse et des Corses dans toutes leurs interventions médiatiques alors que les médias nationaux enfoncent volontiers le clou en faisant allusion à une « violence endémique » des Corses. Imaginer que des gens aussi amicaux aient pu être ainsi pris à partie, frappés et humiliés pour avoir été fiers de leur ville et de leur club est vraiment inconcevable.
Certes, la violence dans les stades ne se limite pas aux clubs de Corse. La même journée à Bordeaux des débordements violents ont conduit à annuler le match 20 minutes après le coup d’envoi. La Liga espagnole, trop longtemps tolérante aux manifestations racistes dans les stades, fait désormais face à une bronca des joueurs exaspérés de ces insultes permanentes.
Mais, malgré les problèmes criants qui restent à régler, les autorités – dirigeants des clubs, police, politiques publiques – ont montré dans de nombreuses occasions leur capacité à venir à bout de ces débordements inqualifiables. Le hooliganisme a été inventé en Grande Bretagne ; il y appartient désormais au passé.
Faisons-en sorte qu’il disparaisse de Corse aussi, pour que tous les jeunes puissent aller au stade profiter pleinement du meilleur que ce sport peut leur apporter.
Au vu de ce qu’il s’est passé ce week-end à Aiacciu, il faut bien admettre que la Corse est encore loin du compte ! •
F.A.
Condamnation de l’ACA
« Le 25 avril dernier, l’AC Ajaccio a eu le bonheur de recevoir l’association “Des coccinelles rouges pour Thomas” au stade François-Coty. Parmi les enfants de cette association, se trouvait le petit Kenzo, atteint d’un cancer. Il avait fait part de son rêve de rencontrer les joueurs de l’Olympique de Marseille, le club de sa ville et de son cœur. Kenzo et sa famille ont été invités au stade François-Coty à l’initiative du Rotary Club et de la présidente d’Air Corsica, pour que l’enfant réalise son rêve lors de la rencontre de ce soir ACA-OM.
Le rêve s’est rapidement transformé en cauchemar lorsque Kenzo et ses parents, venus aux couleurs de l’Olympique de Marseille, ont été honteusement violentés par des individus qui se sont introduits dans leur loge. Alertée, la sécurité du club s’est interposée. Kenzo et sa famille ont été pris en charge par les services du club et accompagnés dans la zone vestiaires pour que l’enfant puisse réaliser son rêve.
Ces individus ne représentent en aucun cas les valeurs de notre club et de notre île. Même la plus extrême bêtise ne saurait excuser ces comportements ! Le club condamne avec la plus grande fermeté ces actes inqualifiables ! L’AC Ajaccio fera toute la lumière sur ces agissements honteux. Dès que les individus auront été identifiés par nos services, nous porterons plainte contre eux. L’AC Ajaccio est solidaire avec le petit Kenzo et ses parents ». •