Cette fin d’année 2023, le monde de la culture en Corse a reçu un cadeau très attendu : le vote à l’unanimité pour la création d’une formation menant à un diplôme de professeur de musique, avec en spécialité les chants et la musique traditionnelle corses.
En septembre 2024, les nouveaux étudiants de la formation entreront dans la première des trois années de formation à Corti, dans une aile réaménagée de la caserne Padoue. Ce cursus a pu être développé grâce au précieux partenariat avec l’IESM (l’Institut d’enseignement supérieur de la musique) basé à Aix-en-Provence.
La culture musicale corse est profondément ancrée dans une culture méditerranéenne et latine. Nadine Nivaggioni, de Fà Populu Inseme, rappelle les similitudes fortes entre la Corse et la Sardaigne, comme l’utilisation du Chjama è Rispondi dans les classes sardes pour stimuler l’improvisation et le sens de la poésie des élèves. Également, l’étude des instruments est bien entendu prévue, instruments qui trouvent pour la plupart leurs origines dans le rapport que les insulaires ont à leur environnement. En témoignent les instruments à vent comme a pìrula, a caramusa, ou encore comme le culombu (conque marine), qui trouvent tous leurs équivalents en Méditerranée et au-delà.
Ce diplôme sera donc une ouverture de plus de la Corse sur le monde, à travers ses propres spécificités.
Une opportunité unique d’ouverture pour le monde culturel méditerranéen
Cependant, avant même de traverser la Méditerranée, cette formation ouvre un pont de plus entre les différentes disciplines qui permettent de sauvegarder et faire vivre la langue corse et son patrimoine. À l’étude et l’apprentissage de la langue, en passant par son histoire et son évolution linguistique, s’ajouteront désormais l’enseignement des instruments, des formations de chants profanes et sacrés, ou encore de la construction d’un chant aussi spécifique que le Chjama è Rispondi. Le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, résume ainsi les espérances autour du nouveau cursus : « On va graver les choses dans le marbre, parce qu’à travers ces quinze femmes et hommes que nous allons former, nous avons de quoi mailler l’ensemble du territoire de la Corse et sans doute au-delà. Nous avons désormais la garantie académique que ce patrimoine immatériel est aujourd’hui sauvé. » Christian Andreani, membre fondateur de Canta U Populu Corsu le déclare officiellement : « On parle d’un moment historique ! »
La fin d’une problématique de transmission générationnelle
Le secteur de la musique traditionnelle et du chant corse souffrait du manque d’enseignants. En effet, s’il n’est pas rare que les enseignants en langue corse dispensent durant leurs heures de cours une éducation à la musique et aux chants corses, ce n’était malheureusement pas suffisant pour éveiller leurs élèves à la beauté et à la spécificité de la culture musicale insulaire.
Une tentative avait été faite, il y a de cela plusieurs années, d’ouvrir une licence professionnelle en musique traditionnelle par l’université de Corse, licence qui n’existe désormais plus. La force réelle de cette nouvelle formation est que les futurs étudiants bénéficieront d’une préparation au diplôme d’État d’enseignement en conservatoire, un réel débouché professionnel dans un domaine souffrant malheureusement d’opportunités. •