29 ans de recherche, deux ouvrages, et ce n’est pas fini : Didier Ramelet Stuart a effectué un travail gargantuesque pour dévoiler et comprendre les liens entre la famille Stuart et la Corse de Paoli. Du 25 au 29 septembre, l’auteur sera en Ecosse pour un cycle d’interventions, à la rencontre notamment d’universitaires et des cercles liés à la famille Stuart. Pour Arritti, il revient sur cette aventure hors norme. De l’histoire familiale à l’Histoire avec un grand « H », récit des liens entre la Corse et les Stuart d’Écosse.
D’où est partie l’initiative de parler de la famille Stuart et des liens qu’elle entretient avec la Corse ?
C’était un sujet assez mystérieux et récurrent dans ma famille. Mon grand-père a toujours été très vague sur les origines de la famille Stuart de Corse, mais je savais qu’il y avait plus. C’est une quête personnelle et familiale de vouloir résoudre le mystère de la présence d’une famille écossaise en Corse depuis l’indépendance. J’ai su qu’un historien, Théodore Stuart, avait effectué des travaux à la fin du XIXe siècle à Bastia. C’est à partir de là que, indépendamment de mes aspirations professionnelles, je me suis donné les moyens pour effectuer les recherches avec une rigueur académique, notamment en m’orientant vers des études d’anthropologie.
Comment expliquer ce manque d’information sur une famille qui, pourtant, fait partie de l’Histoire de la Corse et également de l’Écosse, avec, par exemple, des personnages s’étant illustrés auprès de William Wallace ?
Il y a plusieurs raisons. La raison factuelle : on est dans la diplomatie des réseaux « de l’ombre ». Ensuite, l’Histoire est écrite par les vainqueurs. Comme on parle d’activités liées aux destins de deux peuples qui ont perdu à peu près à la même période leur indépendance, la documentation élude une part importante de cette Histoire. Les accords qui ont pu exister entre les Stuart et les paolistes n’ont jamais été abordés, sauf de manière très sibylline par les historiens écossais. C’est un sujet qui n’a jamais été évoqué en Écosse en soi. Concernant la Corse, il y a peu de traces écrites de cette présence, mais les lettres codées de Paoli sont encore pour certaines à découvrir et à interpréter, donc nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Ce qui est avéré, c’est qu’une lettre de Paoli à son père ainsi qu’une lettre adressée à Achille Murati [chef d’armée sous Pasquale Paoli, NDLR] mentionnent les Stuart ainsi que la présence des jacobites en Corse.
« Un Stuart dans la nation Corse » qui est sorti en 2013 est centré sur mon ancêtre, l’ancêtre des Stuart de Corse, Emmanuel Stuart. Mes campagnes de recherches sur ce personnage en particulier se sont heurtées aux accès aux documents, notamment avec les barrières linguistiques dans certains pays où les archives sont présentes, comme l’Allemagne ou la Pologne. Le lien avec la Corse n’est pas un sujet mineur pourtant, et c’est ce que j’aborde dans « Les Stuart et la Corse » avec une édition internationale. Il y a un contexte historique qui relate des liens historiques et durables entre naziunali corsi et jacobites écossais, irlandais ou anglais, et ces liens ont couru pendant 80 ans durant la période des Lumières. C’est un ouvrage qui comble des lacunes dans l’histoire de la Corse.
Pouvez-vous nous détailler votre tournée en Écosse du 25 au 29 septembre ? Quelles rencontres avez-vous prévu ?
Je vais rencontrer des universitaires, dont Murray Pittock, un des spécialistes du jacobitisme qui m’a fait l’honneur de préfacer mon dernier livre. Le but est de faire connaître mes travaux dans le milieu universitaire et auprès de quelques libraires, mais il s’agit surtout de rencontrer les membres de la Stuart Society, qui a vocation à rassembler tous les membres descendants des Stuart. J’ai déjà des membres qui sont dans ce cercle depuis longtemps, qui fête ses 125 ans d’existence.
Quelle suite est prévue dans vos publications et travaux de recherches ?
Actuellement, les éditions Albiana vont sortir les actes du colloque d’Histoire maritime de Bonifaziu cette année, où figure un de mes articles sur l’origine des Stuart de Corse. Ensuite, la sortie d’un troisième ouvrage, mais la date n’est pas encore fixée. J’ai une idée des fonds et des documents à exploiter pour sortir un ouvrage rigoureux sur la vie d’Emmanuel Stuart, mais cela nécessitera encore du temps et de la recherche. Je souhaite cependant sortir un livre sur ce personnage, qui sera beaucoup plus romancé, tout en restant bien factuel.
Quels retours avez-vous eu en Corse sur vos travaux ?
Mon premier livre est épuisé, je pense que j’ai rencontré mon public, mais la diffusion a été limitée. Des universitaires insulaires m’ont dit du bien de mon travail, notamment de la part de M. Vergé-Franceschi ou notamment Jean-Dominique Poli. Sans prétention aucune, ce sont deux ouvrages qui représentent trente ans du travail, et je pense que c’est une référence désormais. •
Propos recueillis par Léa Ferrandi.
Da leghje : Didier Ramelet Stuart, Les Stuart et la Corse.