La mise en place du nouveau Conseil économique social environnemental et culturel de Corse (CESEC) a été entachée par la polémique. Plusieurs organisations de la société civile, notamment dans le monde culturel, n’ont pas compris le mode de désignation et ont exprimé leur mécontentement sur les réseaux sociaux. Mais c’est surtout Via Campagnola qui s’est fait entendre dans la presse. Le syndicat nationaliste agricole a été écarté de l’instance de manière incompréhensible puisque la réunion officielle de désignation qui s’est tenue en septembre avait confirmé une désignation à parité des trois syndicats agricoles pour chacune des trois places réservées à leur représentation au sein du CESEC. Pourquoi donc être revenu sur cette désignation, rompant un équilibre déjà difficile à trouver au sein d’un monde agricole traditionnellement en tension ? Femu a Corsica s’est étonnée de ce mauvais arbitrage et a réagi dans un communiqué lire Ici. L’État renvoie les syndicats dos à dos, alors que c’est lui qui arbitre, que les représentations ne sont pas équilibrées et que, même dans les autres collèges par exemple, nombre d’associations, ou même de chefs d’entreprises se plaignent de ne pas avoir été impliquées. Cherchez l’erreur ! Pour notre part, concernant la représentation agricole, nous donnons la parole à ceux qui sont évincés.
Paul André Fluxia, secrétaire regional de Via Campagnola, répond aux questions d’Arritti.
Via Campagnola exclue du Conseil économique social culturel et environnemental de la Corse… que s’est-il passé?
Paul André Fluxia: En fait il est prévu un poste pour la chambre régionale et trois pour les organisations syndicales représentatives.
Il y a en Corse depuis 2001, trois organisations syndicales représentatives : Via Campagnola, FDSEA et JA, il nous est demandé de nommer nos représentants, c’est ce que nous avons fait au mois de septembre en commission Territoriale d’orientation agricole (co-présidée par le président de l’Éxécutif et par le préfet). Cependant, le préfet, suite à un revirement de situation de nos partenaires n’en a pas tenu compte, il a préféré nous réunir et soumettre la désignation au vote. De plus, dans le collège des électeurs il a nommé des organisations syndicales départementales (il y en a 6) et non pas régionales (qui sont, elles, au nombre de trois : FDSEA, JA, Via campagnola) ce qui a conduit nos partenaires unis, reniant leur engagement, à nous mettre en minorité et donc à nous évincer de cette représentativité logique. Je rappelle que, au niveau régional, nous représentons 37% des agriculteurs de Corse contre 31,5% pour FDSEA et 31,5% pour JA, (chiffres du ministère suite aux dernières élections de chambres).
L’État arbitre les désignations… mais il récuse toute mise en cause. Vous en pensez quoi?
Nous pensons que le préfet jour un rôle trouble, incompréhensible alors qu’il aurait dû se baser à appliquer les textes. Tout semble fait pour semer la zizanie et retarder la mise en oeuvre du CESEC.
Que comptez-vous faire pour faire reconnaître vos droits?
Nous comptions tout d’abord expliquer clairement et sereinement ce qui a conduit à notre éviction, c’est pour cela que nous avons tenu à nous exprimer devant l’ensemble des conseillers qui forment aujourd’hui le CESEC. Nous regrettons que nos contradicteurs (les représentants de l’État comme nos collègues agriculteurs) n’aient pas choisi d’en débattre le jour de la mise en place du CESEC, démocratiquement et au grand jour, ils ont préféré le faire a posteriori et par voie de presse…
Au niveau juridique nous intenterons un recours au Tribunal administratif, et nous espérons que l’application des textes et le soutien de nombre de représentants de la société civile comme des politiques nous permettra d’intégrer rapidement le CESEC.
Qu’est-ce qui différencie Via Campagnola des autres syndicats agricoles?
Nous sommes un syndicat paysan très impliqué dans la défense des terres agricoles comme de la préservation des ressources (sols et eau) mais aussi respectueux de l’héritage de tout ce patrimoine biologique et culturel que nous avons en charge de transmettre à nos enfants.
Notre vision est celle d’une agriculture de proximité basée sur la production de qualité en circuits courts. Une agriculture fermière et non pas «de filière » dont l’orientation est, elle, en main de quelques individus détenant le pouvoir économique.
Nous sommes aussi farouchement opposés à l’intensification des systèmes qui est néfaste pour la durabilité de l’agriculture et qui engendre inéluctablement l’industrialisation de la production avec l’apparition de projets complètement anachroniques, portés par les tenants de la majorité aux Chambres.
Vous pensez que c’est cette vision de l’agriculture qu’on a voulu écarter?
Nous avons l’impression que toute initiative émancipatrice est rejetée par la majorité aux Chambres qui s’est construite et renforcée autour d’une agriculture de rente avec en parallèle et surtout dans les productions végétales une organisation verticale qui muselle et contraint toute volonté ne correspondant pas aux orientations choisies.
Nous pensons que c’est cette volonté de changement de paradigme qui est écartée dans cette instance en charge de représenter la société civile et donc une vision différente de l’agriculture corse pour demain.