‘‘Frais généraux’’ au Parlement européen

Installer la ‘‘maison de cristal’’ à Bruxelles !

Lundi 2 juillet au soir, lors d’une réunion à huis clos, une infime majorité du Bureau du Parlement Européen a refusé de réformer le système des “frais généraux”. Au-delà de l’opportunité ratée de mettre fin à un système opaque et d’introduire un peu de transparence et de contrôle sur ces frais, c’est surtout un scandale politique qui s’annonce.

L’argent du contribuable

Les “frais généraux” sont l’équivalent de l’Avance Mensuelle sur Frais de Mandat, (AMFM), l’ex Indemnité Représentative de Frais de Mandat (IRFM), pour les députés et sénateurs français. Les ‘‘frais généraux’’ s’élèvent à 4416€ net par mois à Bruxelles. Cette indemnité très élevée, mais moins qu’à Paris (5373€ net par mois), permet, entre autres choses, aux eurodéputés de payer le loyer et les factures de leur permanence parlementaire ou divers frais utiles dans le cadre de leur mandat (frais de poste, matériel informatique…). Ce n’est donc pas un salaire annexe mais une indemnité pour couvrir des frais inhérents au mandat de député européen.

Mais aujourd’hui, cette somme peut être versée sur le compte personnel du député. Cette indemnité n’est absolument pas contrôlée ni par un Commissaire aux comptes externe, ni par un auditeur interne du Parlement européen, ni par la Cour des Comptes européenne. Et jackpot, le député n’est pas obligé de rendre l’argent non utilisé à la fin de son mandat! Proprement scandaleux.

 

Loin de moi l’idée de crier au “tous pourris”, de nombreux députés respectent l’esprit et la lettre des règles non contraignantes qui régissent l’utilisation des ‘‘frais généraux’’ au Parlement européen, mais il y a de nombreux eurodéputés qui ont abusé et qui abusent encore des règles. L’homme étant ce qu’il est, il y a un risque, par absence de règles claires et contraignantes et de contrôles stricts et rigoureux, que des eurodéputés utilisent irrégulièrement cette indemnité ou -pire- l’utilisent frauduleusement en arrosant des partis politiques par exemple ou -encore pire- en s’enrichissant personnellement.

 

Les réponses du Secrétaire Général du Parlement européen envoyées à la Commission du contrôle budgétaire du Parlement sont d’ailleurs éloquentes. Quasiment aucun eurodéputé n’a rendu d’argent à la fin du mandat précédent (2009-2014). Quel heureux hasard, tout le monde a tout dépensé ! En réalité, les eurodéputés, du moins une partie d’entre eux, appliquent la règle selon laquelle ‘‘l’argent mis à ma disposition est le mien, je dépense tout sinon je dois rendre ‘‘mon’’ argent’’. Sauf que non, cet argent n’est pas celui de l’eurodéputé mais celui du contribuable européen, mis à disposition de l’eurodéputé pour qu’il mène à bien sa mission. Et en cas de sous-utilisation, l’argent public doit être rendu, c’est un principe simple qui ne devrait jamais être oublié ni contourné.

 

Encore un (mauvais) coup des socialistes européens

C’est d’ailleurs pour lutter contre cela que le Parlement européen a voté à plusieurs reprises, ces 2 dernières années, et à une large majorité, pour une réforme de ce système afin d’y mettre de la transparence et du contrôle.

La proposition déposée sur la table du Bureau,  composé du Président et des 14 vice-Présidents du Parlement européen et compétent en la matière, n’avait rien de révolutionnaire par ailleurs. L’idée était simple : les “frais généraux” devaient être versés sur un compte en banque séparé, être contrôlables et contrôlés, et l’argent non utilisé devait être rendu à la fin du mandat parlementaire. Le strict minimum.

 

Le Parti Populaire Européen, (Les Républicains en France), premier groupe au Parlement, est vent debout contre cette réforme depuis le début mais, au Bureau du PE, il n’a pas la majorité (5 sur 15). La majorité contre la transparence et le contrôle des ‘‘frais généraux’’ n’a été possible que grâce au soutien des socialistes (3 sur 5 VP ont voté avec la droite).

 

La transparence partout

À l’exception de l’utilisation privée d’argent public (salaires et indemnités des élus ou des fonctionnaires par exemple), il est inacceptable que l’utilisation d’argent public ne soit pas soumise aux contrôles d’un auditeur externe et/ou interne et une Cour des Comptes. Et il est inconcevable que des élus puissent avoir des moyens financiers pour mener à bien leur mission sans être responsables de la bonne utilisation de ceux-ci, car on parle, in fine, de l’argent des contribuables européens.

C’est pour cela que les règles, ou plutôt l’absence de règles, et les comportements de ‘‘l’ancien monde’’ ne sont plus acceptables et qu’il est temps d’installer la ‘‘maison de cristal’’ à Bruxelles aussi.

 

Roccu GAROBY.

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