Il y a un peu plus d’un an (avril 2022), le Tribunal administratif annulait la carte des ESA du Padduc. « Danger, on ouvre de nouveau les vannes » titrait Arritti* alertant sur les conséquences d’une telle décision.
Le président de l’agence d’Aménagement d’urbanisme et d’énergie de la Corse, Julien Paolini, a heureusement saisi la Cour d’appel. Celle-ci vient de rendre son jugement : la carte des ESA du Padduc est rétablie ! Ouf ! Première conséquence immédiate : le projet de Ghjuncaghju devient illégal et le Tavignanu va pouvoir souffler…
Les parcelles où se situe le projet de centre d’enfouissement technique (CET) de Ghjuncaghju sont classées en espaces stratégiques agricoles du Padduc (ESA). Or, Ghjuncaghju n’a établi aucun document d’urbanisme (PLU ou carte communale). Elle n’a donc pas la possibilité, de déclasser ces ESA. U Levante se réjouit de l’annoncer sur son site : « Selon l’article L4424-11, II du code général des collectivités territoriales, les ESA, régis par un principe général d’inconstructibilité, sont directement opposables aux demandes d’autorisation d’urbanisme dans les communes qui ne sont pas couvertes par un Scot, un PLU ou une carte communale. Des activités autres qu’agricoles ne pourraient y être permises qu’à trois conditions cumulatives :
a) qu’elles ne soient pas incompatibles avec l’exercice d’une exploitation agricole ou pastorale ;
b) qu’elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ;
c) que soit justifié qu’aucun autre emplacement ou aucune autre solution technique n’est envisageable à un coût économique environnemental acceptable.
Réunissez ces trois faits et concluez ! Aucun permis de construire pour un CET ne pourra dorénavant être accordé sur les ESA du méandre du Tavignanu. S’il était accordé, il serait annulable… ce qui avait déjà été le cas d’un permis de construire annulé en avril 2018 » explique U Levante.
Bon, ça c’est dans le cas d’une bonne application des textes… Le collectif Tavignanu Vivu, de son côté, devait analyser le jugement et ses conséquences. Il réagira ultérieurement, trop instruit par les coups bas dans ce dossier !
En avril 2022, pour une question de forme plus que de fond, le Tribunal administratif avait annulé la carte des ESA, estimant que sa modification (en réalité régularisation) à propos de limites de pente, aurait dû se faire dans le cadre d’une révision du Padduc. En réalité, la définition des ESA n’a jamais changé depuis l’adoption du Padduc en 2015 et les critères y sont clairement définis dans le Livret règlementaire, la carte n’étant qu’une transcription visuelle par aplats jaunes à l’échelle cartographique. Ce dont il n’a pas été tenu compte en première instance. Et ce qui n’a pas été suivi non plus par le préfet qui a délivré l’autorisation de CET à Ghjuncaghju…
La Cour d’appel de Marseille confirme que la carte des ESA n’a pas modifié leur définition et donc que la CdC a « légalement pu préciser, après l’enquête publique et conformément aux recommandations de la commission d’enquête, les critères de définition des espaces stratégiques agricoles, s’agissant en particulier des terrains avec une pente. »
Jean Paolini s’est réjoui de cette validation qui « sécurise » les ESA « et donne un signal fort » à l’opinion. « Son rétablissement permettra de donner une indication supplémentaire en cas de litige et de recours par un tiers, elle est un outil décisionnel supplémentaire pour les maires. De plus, le ju-gement de la cour d’appel crée une jurisprudence qui conforte les critères de définition des ESA. » Ce qui est le plus important pour la Corse et son Padduc.
Reste maintenant, à Ghjuncaghju comme partout, à faire des ESA une réelle mise en valeur agricole, en formant des jeunes et en vouant ces terres à leur seule destination possible : la production agricole. Ce qui lèvera toute velléité actuelle ou future d’artificialisation. •
F.G.
* Lire l’article “Danger, on ouvre de nouveau les vannes”