« Au nom de la mer »

Le débat public sur la mer s’invite à Bastia

Depuis le 24 novembre, la Commission nationale du débat public (CNDP) a entamé une série de consultations publiques sur la question de la mer. D’ici à 2050, la France doit planifier son espace maritime. Protection, pollution, partage de l’espace, développement, énergie… C’est à Bastia ce samedi 2 décembre que la CNDP a ouvert le bal du débat avec les élus, associations et institutions mais également des citoyens, tous venus participer à une projection et à des ateliers.

 

 

La Corse, île-montagne, est indissociable de son environnement méditerranéen. L’île et son peuple est donc en première ligne des changements liés à la gestion et à la préservation de cette espace fragile, le plus pollué du monde, mais également le plus fréquenté. C’est donc sans surprise que Bastia est la ville d’ouverture du débat public sur la mer, débat qui sera mené à travers plusieurs villes jusqu’en avril 2024.

Ce samedi 2 décembre au matin, une projection s’est faite au cinéma Le Studio. « Au nom de la Mer », c’est le film de Caroline et Jérôme Espla que les Bastiais ont pu découvrir pour ouvrir le débat public sur la mer. À l’affiche, plusieurs acteurs du monde de la protection marine, entre continent et Corse, qui expliquent leurs actions, leurs motivations et leurs (dés)espoirs.

Parmi eux, Pierre-Ange Giudicelli, de l’association Mare Vivu, a été suivi en 2018 lors d’opérations de dépollution du Golu notamment. « Ce film a été l’occasion d’expliquer nos motivations, mais beaucoup de choses ont changé entre le tournage en 2018 et aujourd’hui » explique le coordinateur associatif. « Le film mentionne notamment l’image du colibri, qui fait sa part des choses même si elle est minime, avec des nettoyages de plages par exemple. Aujourd’hui, on a changé de discours : il est nécessaire de viser les réels décisionnaires de la pollution plastique, qui sont les industriels et les décideurs politiques. »

Antoine Orsini, hydrobiologiste, chercheur et administrateur de l’Agence de l’eau et de l’Office de l’environnement de la Corse, président du Conseil scientifique du Parc naturel régional de Corse et des Réserves naturelles de Scàndula et du Fangu (Unesco) était également l’un des invités phares de cette journée. Lorsqu’on lui pose la question de la résolution de la pollution plastique en Corse, le chercheur a des réponses très claires : « Il faut du courage politique. La loi est très bien faite, si elle était appliquée à la lettre, on aurait plusieurs problèmes de résolus ». Concernant la Corse en particulier, l’arrêt total de l’import de plastiques, notamment à usage unique, serait « un sujet à discuter durant les débats sur l’autonomie » pour Antoine Orsini.

 

Une journée ambitieuse pour l’implication citoyenne

La projection a donc été la scène de questions-réponses dans la matinée, et la journée s’est poursuivie avec une série d’ateliers, consacrés à trois thèmes : la posidonie, les relations terre-mer, et le réchauffement climatique. Des moments qui ont permis des échanges intenses entre les participants et les intervenants.

La pollution plastique a notamment été abordée lors de l’atelier « Relations terre-mer et pollution plastique ». Antoine Orsini, animateur de cet atelier, a expliqué la source de la pollution marine au panel de spectateurs présents : « 80 % de la pollution plastique provient de la terre, par l’action des rivières ». Le chercheur précise également les mécanismes de la détérioration du plastique : « l’action des cours d’eau broie les plastiques, qui se transforment en micro-plastiques arrivés dans la mer : la menace est donc sur terre, un déchet à terre est une menace pour les milieux marins ». Des faits qui ont été l’occasion d’échanges intenses entre les participants, notamment sur la question de la réduction à la source, voire de l’interdiction même du plastique.

 

Des conclusions décevantes ?

Les conclusions de ces journées n’ont peut-être pas été à la hauteur des ambitions mises dans cette journée. « On a quand même ressassé des lieux communs, des messages en boucle sur certains thèmes comme le réchauffement climatique » déplore une participante. « Il y a 30 ans, on avait déjà le même type de sensibilisation, aujourd’hui on en est toujours au même point. Quand est-ce qu’on aura un vrai changement ? » questionne un professeur des écoles.

Si ce débat n’a pas eu l’occasion de révolutionner la question de la mer en cette journée de samedi, elle a au moins eu le mérite de sensibiliser et poser un dialogue entre représentants d’institutions, associations, et citoyens. •

Lea Ferrandi.

 

Pour suivre le débat public sur la mer, rendez-vous jusqu’au 26 avril 2024 sur : www.debatpublic.fr/la-mer-en-debat