Environnement

Maîtriser la fréquentation des sites protégés

La sur-fréquentation de certains sites est devenue un problème écologique et économique majeur. Les îles Lavezzi dans les Bocchi de Bunifaziu, la réserve de Scàndula, située dans « e punte di Ghjirulatu » sur la commune d’Osani, mais aussi des sites comme l’Agriate, ou encore certains lieux de baignade ou de canyoning en rivière sont concernés. Comment maîtriser cette fréquentation et supprimer les menaces qui se font jour sur la préservation de ces sites exceptionnels ?

 

 

Les situations sont très différentes.

Ce qu’un arrêté municipal peut faire sur un site terrestre se révèle impossible sur un site maritime où tout dépend de décisions de l’État. Ainsi, la commune de Bucugnà a pris des mesures pour restreindre l’accès au site de canyoning très renommé de la Richjusa. Impossible d’en faire autant à Scàndula, pourtant dépendant de la commune d’Osani, car ce site est fréquenté par mer, si bien que seul un décret ministériel, ou un arrêté du Préfet maritime basé à Toulon, peut réglementer la fréquentation de la zone mise en réserve.

 

Or, en ce domaine, l’État est singulièrement laxiste : est autorisé à commercialiser comme bon lui semble la prestation de visite de la réserve de Scàndula quiconque dispose d’un « permis de conduire » (appelé pour les permis maritimes « capitaine 200 »), et d’un navire ayant passé avec succès un contrôle technique auprès des services de l’État (Direction des Territoires et de la Mer).

Ce lascià corre n’est pas toujours la règle dans l’administration de l’État. Ainsi, par exemple, l’activité de taxi est très sérieusement encadrée par des licences qui sont accordées après avis d’une commission qui se réunit en Préfecture et qui vérifie qu’une nouvelle licence correspond à des besoins bien réels. Cette licence devient ainsi un bien commercial qui consolide la valeur économique de celui qui en dispose.

Comment peut-on concevoir qu’un tel système de licences ne soit pas encore mis en place dans le cas de Scàndula ?

La fréquentation du site, avec l’apparition d’une flotte de petits bateaux très rapides de 12 places, multiplie chaque année davantage les épisodes de dérangement de la faune protégée. Ce que la visite de 120 passagers d’un « grand bateau» provoque comme dérangement est décuplé si ces mêmes passagers sont transportés par dix bateaux de 12 places sillonnant la réserve. Cette évolution est exponentielle depuis les dernières années. Il faut impérativement la réguler en limitant le nombre de bateaux autorisés à exploiter l’activité de découverte de ce site protégé.

 

Au moment de délivrer ces licences, qui auront à terme une valeur commerciale certaine, une négociation est possible pour en limiter le nombre accordé à chaque professionnel en contrepartie de leur attribution. Ce serait déjà un moyen concret de faire diminuer le nombre de navires mis en exploitation, et, par voie de conséquence, de limiter la fréquentation du site qui bénéficierait ainsi immédiatement d’une véritable bouffée d’oxygène.

Et, si besoin, en fonction des rapports des scientifiques, quand ces licences sont remises en vente, la Collectivité pourra se positionner pour les racheter et les sortir du circuit commercial. Ce serait ainsi un outil de régulation, et sans de tels outils, il sera impossible de maîtriser la fréquentation du site protégé.

Il y a urgence à ce qu’un tel dispositif soit enfin mis en oeuvre. Plusieurs rapports de scientifiques ont souligné le rôle néfaste d’un dérangement excessif sur la reproduction des balbuzards et l’occupation des nids de la réserve. Un tel phénomène n’avait pas été observé jusque-là, et on peut donc l’attribuer à la sur-fréquentation générée depuis quelques années, du fait de l’augmentation du nombre de vedettes à passagers.

Il est important de revenir à des niveaux bien moindres de dérangement par cette activité. Il doit être possible de visiter la réserve de Scàndula comme cela se fait depuis plus de 40 ans. C’est même vital pour l’économie touristique de tout un secteur qui va de Calvi à Aiacciu.

Cette activité, si elle est bien maîtrisée, peut même être salutaire pour la défense de l’environnement : chaque visiteur devient après l’avoir visité un avocat de la protection de tels sites, et l’acceptation de l’impôt en faveur de cette protection s’en trouve automatiquement confortée. Mais il faut qu’elle soit régulée, et que l’on puisse la freiner quand elle provoque un impact excessif.

C’est manifestement le cas aujourd’hui, et il faut passer sans attendre à des mesures concrètes pour y remédier.

François Alfonsi, Maire d’Osani.

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