Non au plan Déchets

Pour Ecologìa Sulidaria, une autre voie est encore possible !

Le plan Déchets présenté par l’Office de l’Environnement de la Corse déchaîne les réactions négatives. Après la création de Corsica Pulita, un collectif d’associations* le 28 octobre dernier, qui depuis mène campagne contre l’adoption de ce plan et appelle chacun à participer à l’enquête publique en cours, c’était au tour du mouvement Ecologìa Sulidaria de donner ce 15 novembre une conférence de presse pour dire qu’une autre voie est encore possible.

 

 

Quinze ans après le refus unanime de l’incinération, sept ans après avoir opté pour une généralisation du tri, force est de constater que la Collectivité de Corse peine toujours à imposer ses choix. La Corse, en France et encore plus en Europe, est un mauvais élève, et ce n’est pas pour s’arranger : « le plan Déchets de la Collectivité mis en enquête publique n’apporte aucune réponse satisfaisante et capitule devant le Syvadec qui, avant même le vote du plan, nous engage dans le surtri/incinération avec des usines XXL, polluantes, inutiles et particulièrement coûteuses pour le contribuable » dénonce Ecologìa Sulidaria.

Un échec patent : 38 % seulement de tri, 4000 tonnes de biodéchets collectés seulement sur 40.000. 70 % de matières recyclables dans nos poubelles. 170.000 tonnes par an de déchets à transporter. 295 € par habitant et par an de coût de traitement, soit « plus de deux fois la moyenne française ! »

Et pour faire plus mal encore, le mouvement écologiste rappelle le résultat de nos voisins européens qui trient à : 75 % en Sardaigne, 77 % dans le Trentin, 76 % en Vénétie, 73 % en Lombardie, 75 % en Slovénie !

« Des performances obtenues grâce à des systèmes de tri adaptés, notamment le tri des biodéchets à la source ». Un tri mal organisé, par apport volontaire dans des sites éloignés et peu commodes, des conteneurs qui débordent, des systèmes non homogènes, l’absence de solution pour les biodéchets et les cartons, des coûts importants, la mauvaise volonté des intercommunalités, la solution de facilité à travers l’enfouissement… bref, tout qui engage au désengagement et au refus du geste de tri !

Pourtant, même en Corse il y a des bons exemples : la communauté de communes Calvi Balagna atteint 58 % de tri dont 39 % de papier/verre/emballages contre 11 % à Aiacciu !

« Les enjeux financiers colossaux du marché des déchets particulièrement juteux à tous les niveaux : collecte, transport, enfouissement, rapportent près de 150 millions d’euros par an à des opérateurs privés en situation de monopole » dénonce Ecologìa Sulidaria qui s’inquiète des dérives mafieuses potentielles.

Dans ces constats alarmants, l’espoir était dans la Collectivité de Corse pour inverser la tendance. C’est tout le contraire !

 

Ecologìa Sulidaria déplore le renoncement de ce plan, avec des chiffres de base aléatoires, non fiables, « ce qui permet de justifier les systèmes les moins performants, les plus coûteux, les plus polluants : le tri mécano-biologiques (TMB) et l’incinération. » Pour les écologistes le plan est trompeur , il ne peut parvenir à l’objectif de 65 % de tri imposé par la loi. Il n’est conforme ni au niveau européen, ni au niveau national, qui demande une généralisation du tri à la source, ni au niveau territorial puisqu’il prend le contre-pieds de précédentes délibérations de l’Assemblée de Corse qui annonçait cette priorité au tri à la source et au rejet de l’incinération. Le tout pour un coût hors capacité de la Collectivité de Corse.

Deux centres de TMB et préparation de CSR (combustibles solides de récupération) pour un montant de 112 M€ et une « chaufferie » centrale (autrement dit un incinérateur de plastiques et carton) d’une capacité jusqu’à 150.000 tonnes, pour 119 M€, soit 231 M€ au total avec en sus un coût de traitement annoncé à la tonne de 300 à 450 €, hors collecte, transports, enfouissement des résiduels et traitement des Refioms… Bref, « la ruine pour les contribuables, banco pour les opérateurs » prédit Ecologìa Sulidaria.

 

Tout ça pour ne pas sortir de l’enfouissement puisqu’il restera encore 30 % de déchets non triés à enfouir, et que « le plan ne traite pas les dangers liés au brûlage, ne dit pas où seraient enfouis les 25 % de mâchefers toxiques issus de la combustion, ni les 5 % de Refiom issus du filtrage. Et reconnaît qu’il n’y a aucune garantie sur l’utilisation de la production de chaleur »…

« En transformant des déchets non dangereux en déchets toxiques, l’incinération reste plus que jamais inacceptable pour notre santé et notre environnement » dénoncent les écologistes pour qui ce plan « tourne le dos aux fondamentaux des nationalistes, opposés à l’incinération et attachés depuis toujours à une saine gestion des déchets ». Pour Ecologìa Sulidaria, « le Syvadec et l’État ont déjà pris la main ! » Le Syvadec, en lançant et attribuant des marchés pour les deux « méga usines de TMB, une à Monte, l’autre à Sàrula ». Pour un compost qui sera de mauvaise qualité et inutilisable pour l’agriculture. Il faudra donc l’enfouir ! Un comble ! Ecologìa Sulidaria en est persuadé, « ces usines brûleront des ordures en vrac ».

Le coût « s’ajoutera à celui du tri à la source, qui est une obligation : nous paierons deux fois ! » « Un pactole pour les opérateurs ! »

 

L’État est « hors la loi ». Il a entériné les décisions du Syvadec, et annoncé son financement alors que la loi de transition énergétique (2015, article 70) réclame « la généralisation du tri à la source des biodéchets » et déclare « non pertinente la création de nouvelles installations de tri mécano-biologique (…) qui doit donc être évitée et ne fait, en conséquence, plus l’objet d’aides des pouvoirs publics ». C’est pourtant 90 M€ qui ont été annoncés !

Quant à la directive européenne du 14 juin 2018 (art. 22), elle somme les États membres « à ce qu’au plus tard le 31 décembre 2023 (…) les biodéchets soient soit triés et recyclés à la source, soit collectés séparément et non mélangés avec d’autres types de déchets ».

« Comment le préfet peut-il passer outre ? » interroge Ecologìa Sulidaria qui dénonce de même l’enfouissement en vrac à Vighjaneddu comme au Fium’Orbu comme « inadmissible et insupportable ».

Pour Ecologìa Sulidaria « il n’y a pas d’autre solution » que : optimiser les collectes par le porte-à-porte, partout ; traiter en priorité les biodéchets par compostage ; diminuer drastiquement les transports ; simplifier le geste de tri par regroupement en un seul flux (papiers/emballages/cartons) ; recycler sur place (broyage du verre pour le BTP, billes de plastique) ; développer la prévention (diminution des plastiques, consigne des bouteilles, etc).

 

Ecologìa Sulidaria demande « un plan d’action immédiat pour organiser efficacement le tri à la source, notamment la collecte des biodéchets », « le retrait des projets de Monte et Sàrula et la réorganisation des financements d’État vers le soutien à la collecte, les installations de compostage et réutilisation/recyclage ». Il appelle les Corses « à interpeler leurs élus et à refuser les solutions dangereuses pour notre avenir ».

L’enquête publique s’est terminée le 24 novembre. •

F.G.

 

* ABCDE. AGR Avvene Ghjustu è Resiliente. Global Earth Keeper. Le Garde. U Levante. Ligue Corse contre le Cancer. Collectif Massimu Susini. Collectif A Maffia Nò A Vita Iè. Plateforme Citoyenne Corse. Pumonte Pulitu. Associu Si pò Fà. A Sentinella. A Spiriata. Rescue Life Passaportu ADN. Vico region Poubelle Communauté. Zeru Frazu.