Projet de société Femu a Corsica À défaut d'autonomie institutionnelle,

À défaut d’autonomie institutionnelle, construire une autonomie de fait

Le samedi 15 juin dernier, les membres de la Commission Projet de Femu a Corsica se sont réunis pour leur première réunion de travail. L’occasion pour l’ensemble des participants d’acter que, six mois après l’Assemblée Générale constitutive du 2 décembre 2018, « l’heure est venue de donner un véritable contenu à ce projet autonomiste qui a reçu l’onction démocratique d’une majorité absolue de suffrages. » En charge de la jeunesse et du projet avec Paul Jo Caïtucoli au sein de l’exécutif du parti, Marc Antoine Campana en a profité pour insister sur la nécessité de se doter d’un projet de société qui exposera sans ambiguïté les orientations stratégiques de Femu a Corsica pour créer les conditions économiques, sociales et énergétiques de l’autonomie de la Corse dans les années à venir.

 

 

Femu a Corsica a fini de mettre en place ses différentes structures militantes. Parallèlement, vous avez installé la Commission Projet. Quelle est la méthode de travail et comment se passe l’élaboration du projet de société?

Marc Antoine Campana: Avec Paul-Jo Caitucoli, notre binôme repose sur la complémentarité de son expertise d’élu de terrain et de mon expérience en matière d’évaluation des politiques publiques. Nous avons décidé d’organiser la commission projet de Femu a Corsica en groupes de travail qui seront constitués de la façon la plus pragmatique qui soit c’est-à-dire sur la base de la recommandation et du volontariat bien sûr mais surtout en fonction des compétences actuelles de la Collectivité de Corse, des intercommunalités et des communes de façon à ce que, dans les semaines et les mois à venir, Femu a Corsica devienne une machine à produire des propositions qui alimenteront concrètement la politique de nos élus partout où ils sont en situation de responsabilité.

Forts de la confiance de ces 56,4% d’électeurs qui se sont prononcés en faveur d’un « statut d’autonomie de plein droit et de plein exercice» en décembre 2017, notre position de parti majoritaire au sein de la majorité territoriale nous oblige désormais à sortir de cette posture de parti d’opposition pour investir l’ensemble des secteurs dans lesquels nous pouvons d’ores et déjà gagner en autonomie sans avoir à demander l’autorisation de l’État. Sans jamais rien céder sur le terrain de la revendication institutionnelle, nous n’avons pas besoin de l’autorisation de l’État pour trier nos déchets comme on devrait le faire, ni même pour créer les emplois qui correspondent aux besoins de notre territoire, et encore moins pour parler la langue de notre choix.

 

Quelles sont les grandes orientations de travail qui se dégagent?

Ce projet de construction nationale nous voulons l’inscrire dans le droit fil du riacquistu, comme un prolongement de la prise de conscience des années 1970 qui n’a pas seulement permis aux Corses de se réapproprier leur langue et leur culture mais également d’introduire, déjà à l’époque, des formes d’intelligence collective sur lesquelles nous serions bien inspirés de prendre exemple pour faire de la Corse un territoire pilote en matière de développement durable ou encore d’économie sociale et solidaire. En effet, nous aurions tort de nous enfermer dans un rapport de force stérile avec Paris alors que les Corses nous attendent sur le terrain des réponses à la situation d’urgence économique, sociale et environnementale dans laquelle ils se trouvent. À l’issue de 50 années d’actions clandestines menées dans l’illégalité, l’État a fermé la porte à la construction d’une solution politique négociée dans le cadre de la légalité.

Dont acte. Entre la sortie irréversible de l’illégalité et l’impasse manifeste de la légalité, il ne nous reste donc plus qu’à investir le champ alternatif de l’a-légalité, c’est-à-dire d’agir dans le périmètre de tout ce qui nous est permis de faire faute de nous être interdit. Ce riacquistu actualisé dans le cadre d’un réel aggiornamento c’est l’opportunité de renouer avec l’esprit de conquête qui était à l’origine du nationalisme contemporain dans la mesure où l’on passerait du registre de la requête institutionnelle d’une autonomie de droit que l’on refuse de nous accorder à la conquête d’une autonomie de fait, consentie par chacun et autolimitée par l’intérêt général.

 

L’autonomie de fait, c’est quoi exactement?

C’est le concept autour duquel je propose de refonder le logiciel de notre famille politique et c’est d’ailleurs ce qui sous-tend toute la philosophie de notre commission projet qui a prévu de se réunir régulièrement tout au long de l’été jusqu’à la tenue d’un séminaire de travail qui sera organisé à la rentrée de septembre et ouvert à l’ensemble de nos militants, de nos sympathisants et des forces économiques, sociales et culturelles de l’île qui se reconnaissent dans notre démarche. Il y a une inadéquation structurelle entre notre aspiration à l’émancipation de la Corse et la structure de l’État central. Dans cette configuration, il faut redoubler d’effort pour soutenir l’action collective qui est conduite par le Président du Conseil Exécutif de Corse. En cela, le concept d’autonomie de fait permet de réconcilier la revendication autonomiste avec nos fondamentaux en matière de droit à l’autodétermination, de souveraineté du peuple corse et de défense de ses intérêts.

 

Plus précisément?

Il s’agit ni plus ni moins de s’engager dans un processus politique qui serait fondé sur:

  1. l’auto-organisation des compétences actuelles de nos institutions ;
  2. l’autogestion de nos ressources naturelles et humaines ;
  3. l’autorégulation de nos propres richesses.

L’autonomie, en effet, ça ne se décrète pas ; c’est moins un objectif qu’un chemin qu’il nous reste à parcourir avec l’ensemble des composantes et des forces vives du peuple corse : c’est un nouveau contrat social porteur de véritables choix de société à destination de toutes celles et de tous ceux qui vivent en Corse, qui y travaillent et qui y élèvent leurs enfants, qu’ils soient Corses d’origine ou d’adoption, Corses d’aujourd’hui et de demain.

 

Les Corses sont-ils nombreux à vouloir s’impliquer? Comment peut-on rejoindre les groupes de réflexion pour participer à ce travail collectif?

Conformément à ce que nous avons annoncé le 2 décembre dernier, nous allons travailler à la mise en place de tout un arsenal de mécanismes participatifs qui devront nous permettre de tirer profit de toutes les ressources internes et extérieures au parti pour aboutir à l’élaboration d’un projet de société qui sera régulièrement amendé par nos militants puis en dernier recours validé par nos instances.

Paul-Jo Caitucoli vous parlera mieux que moi du projet de Fundazione per u Riacquistu qu’il propose de mettre en place mais dans la série de ces outils que l’on souhaite mettre à la disposition du parti je peux déjà vous dire qu’à moyen terme nous disposerons d’une plateforme participative de consultation et de proposition destinée à tous les membres de Femu et qui sera directement accessible sur le site du parti de façon à associer chaque militant à chaque étape de l’élaboration du projet, pour que celui-ci soit le résultat d’une réflexion collective. En attendant que tout cela soit opérationnel et pour commencer à travailler au plus vite sans être dépendant du calendrier de création de notre site, nous avons créé une boite mail qui est exclusivement consacrée au projet et sur laquelle vous pouvez d’ores et déjà nous adresser toutes vos contributions :

prughjettu.femu@gmail.com

De même, j’invite chacun de vos lecteurs, adhérent de Femu ou simple sympathisant, à s’inscrire directement en ligne dans l’un des dix groupes de travail que nous avons constitué.

https://bit.ly/2X4pduO

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