Le 30 mars 2019 au matin, à 00h01, le Royaume-Uni sortira de l’Union Européenne. Déjà un an que les négociations ont commencé entre le continent européen et les îles britanniques et on est loin de voir le bout du tunnel…
Londres ‘’lost in translation’’
Le 23 juin 2016, 51,9% des Britanniques ont voté clairement et majoritairement pour sortir de l’Union Européenne. Et le 29 mars 2017, la Première Ministre britannique, Theresa May, notifiait officiellement à l’UE que son pays allait partir, déclenchant ainsi les horloges prévues dans le Traité de Lisbonne qui limite à 2 ans la période pour négocier une sortie.
Depuis, les négociations n’avancent pas vraiment et pour cause : Londres est complètement perdue, ‘’lost in translation’’. Rappelons que l’idée d’un référendum avait été défendue par David Cameron, alors chef de l’opposition conservatrice en 2009, pour s’opposer au Traité de Lisbonne pour lequel il savait ne rien pouvoir faire contre puisque les élections législatives britanniques avaient lieu en 2010, après l’entrée en vigueur dudit Traité (1er décembre 2009).
Mais en promettant ce référendum à sa frange la plus eurosceptique, David Cameron s’est trouvé pris à son propre piège, une fois élu premier ministre en mai 2010. L’absence de majorité absolue et son alliance avec les europhiles libéraux-démocrates a permis à David Cameron de contenir temporairement les eurosceptiques de son parti qui voulaient un référendum. Mais en 2015, il obtient (de peu) la majorité absolue et il est contraint de tenir sa promesse de campagne : organiser un référendum qu’il ne veut pas.
Après 42 années de relations difficiles, de passe-droits, de dérogations, de chèques, d’arrangements, David Cameron a continué à faire ce que Londres faisait si bien : du chantage au départ. Et comme aucun dirigeant européen ne voulait le perdre, ils ont tout accepté pour qu’il remporte son référendum.
Le camp du « Leave » (sortie de l’UE) a gagné le référendum mais personne n’avait imaginé cela et y était encore moins préparé, que ce soit du côté sud du Shuttle ou au nord. En démocrate, David Cameron, défait, laisse un pays en ruine et divisé.
Pire, le parti conservateur, coupé en 2, mais toujours aux affaires, est incapable de dire quelles relations Londres devra avoir à Bruxelles. Sortir, c’était une menace mais pas un plan A pour Cameron.
L’impossible compromis
En réalité, pour les brexiters (favorables à la sortie de l’UE) qui ont fait campagne contre la libre circulation des personnes (contrôle de l’immigration) et contre les règles européennes, rester dans le marché intérieur qui nécessite de respecter les 4 lois fondamentales (libre circulation des biens, des marchandises, des capitaux et des personnes) et accepter les règles européennes (sans avoir le droit de voter) n’était pas une option.
De plus, ces derniers ayant aussi fait campagne sur le thème que le monde entier signerait des accords de libre échange avec le Royaume-Uni, rester dans l’Union Douanière (ce qui nécessite d’avoir les mêmes tarifs douaniers que l’UE vis-à-vis des États tiers) -droits fixés par Bruxelles-, ce n’était pas une option non plus.
Enfin, sauf à vouloir que la Paix soit en danger en Irlande du Nord, Londres s’est engagée à ce qu’il n’y ait pas de frontière entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord, entrées toutes les 2 dans l’UE en 1973 et désormais s’éloignant l’une de l’autre. Mais cela n’est pas une option pour Bruxelles puisqu’un produit importé d’un État tiers au Royaume-Uni pourrait franchir la frontière irlandaise sans contrôles et donc accéder au marché intérieur sans contrôle non plus.
Bref, il n’y a pas de solution sauf à revenir sur l’un des 3 engagements. Et vu les tensions aux seins du parti conservateur, allié au DUP, le parti conservateur, pro-brexit et pro-britannique d’Irlande du nord, il y a fort à parier que c’est la troisième promesse qui ne sera pas tenue.
Le temps presse
Il ne reste qu’un an, en réalité 6/8 mois, pour trouver un accord car ensuite il faudra que le Conseil des Ministres de l’UE l’approuve (à la majorité qualifiée 72% des États représentant 65% de la population de l’UE (hors Royaume-Uni)), que le Parlement européen le ratifie (à la majorité absolue de ses membres) et cela demandera du temps.
Bref, à un an du Brexit, rien n’est vraiment prêt, les Britanniques ne savent toujours pas ce que leur gouvernement souhaite négocier (accord de libre-échange, accord d’association…) et les Européens ne savent toujours pas sur quel pied danser.
Pendant ce temps-là, n’oublions pas que les Écossais ont voté à 62% pour rester membre de l’UE, adhésion qu’on leur garantissait en rejetant l’indépendance en 2014, et les Irlandais du nord, à 56%, ont refusé de s’éloigner de leurs compatriotes du sud.
Si nous devons respecter le vote des Britanniques, nous devons aussi regarder celui des Écossais et des Irlandais car chaque peuple a le droit de choisir son avenir. Que ce soit dans ou hors de l’Europe.
Le Brexit ne fait que commencer…
Roccu GAROBY
Vice-Président de l’Alliance Libre Européenne Jeune