C’est passé un peu à l’étouffoir dans le grand battage médiatique sur la Covid et la gestion de cette crise, mais l’Organisation Mondiale de la Santé a révélé une information déprimante en cette fin d’année 2020. Alors que les vaccins sont enfin prêts et que la campagne de vaccination s’organise un peu partout dans le monde, l’OMS modère les espérances…
Au-delà de tout complotisme bien sûr, ou de la simple prudence naturelle d’une population, on avait déjà été un peu refroidi par les annonces des différents ministères de la Santé européens dans un contexte inédit de manque de recul pour juger de l’efficacité des différents vaccins mis sur le marché. Entre réelle parade à la contamination ou frein aux formes les plus graves de la maladie, les scientifiques, et donc les politiques, ont tempéré les ardeurs. Mais le démarrage de la campagne de vaccination a été une bonne nouvelle et un espoir face à cette pandémie qui sévit depuis bientôt un an, paralysant les économies et la vie en société.
Puis, nouvelle douche froide : « un vaccin va compléter les autres outils que nous avons, pas les remplacer » a déclaré le Directeur Général de l’OMS, le Docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus. Voilà qui tempère les déclarations commerciales des laboratoires sur l’efficacité à 90 ou 95% des différents vaccins…
En clair, un retour à « la normale » n’est pas pour demain ! La Covid est entrée dans nos vies et le restera pour longtemps. L’épidémie ne disparaîtra pas, d’autant que de nouvelles variantes apparaissent (au Royaume Uni, en Afrique du Sud*), et nous ne nous passerons pas des fameux gestes-barrière et autres distanciations imposées dans nos rapports humains.
Président du groupe stratégique et technique de l’OMS, le professeur David Heymann a enfoncé le clou lors d’une conférence de presse le 28 décembre dernier : « le destin du virus est de devenir endémique ». « Le monde a espéré que se crée une immunité collective, que la transmission du virus serait en quelque sorte réduite (…) mais ce concept d’immunité collective a été mal compris (…) [le virus] continuera à muter au fur et à mesure qu’il se reproduit dans les cellules humaines, en particulier dans les zones de contamination plus intenses. » En clair, il s’adapte, et de façon plus rapide que prévu. La bonne nouvelle, c’est que la contagiosité sera plus faible mais elle sera toujours présente. Pire… selon Mark Ryan, chef du programme d’urgence à l’OMS, « cette pandémie est très grave (…) mais ce n’est pas nécessairement la plus importante à laquelle nous serons confrontés (…) ces menaces continueront. »
« L’existence d’un vaccin, même avec une efficacité très élevée, n’est pas une garantie d’éliminer ou d’éradiquer une maladie infectieuse. »
Pire encore, sa collègue, le Docteure Soumya Swaminathan révèle qu’à ce stade l’OMS se concentre sur la façon de prévenir les symptômes, et de réduire les décès, « je ne crois pas que nous ayons les preuves que l’un des vaccins va empêcher les gens de contracter l’infection et nous ne sommes donc pas convaincus qu’ils empêchent de la transmettre. »
On reste donc dans l’incertitude et une seule chose est sûre, il faut conjuguer tous les moyens à disposition pour réduire la transmission : gestes-barrière, vaccin, dépistage, traitements. Bref prudence à maintenir pour soi et pour les autres, on ne doit pas relâcher la vigilance !
Vu ce constat, ne serait-il pas grand temps de s’attaquer au vrai problème de ce qui crée la panique mondiale, particulièrement en France ? À savoir, le dimensionnement adéquat de nos systèmes de santé, l’arrêt des restrictions budgétaires sur l’hôpital public, les moyens à mettre en lits, en personnel soignant, en traitements adaptés, pour soulager « nos héros » et permettre une prise en charge rapide, anticipée, des malades d’aujourd’hui et de demain ?
Ce n’est qu’à cette condition, que les rééquilibrages pourront se faire entre santé et économie, entre les millions de personnes contaminées dans le monde, et les millions de chômeurs que la crise sanitaire a engendré.
Ci tocca à dassi curagiu. •
Fabiana Giovannini.
* Il s’agit des souches les plus inquiétantes, mais des milliers de variantes sont apparues depuis le début de l’épidémie. Les virus mutent en permanence.