Après les menaces sur les maires catalans, les perquisitions et les arrestations dans les locaux officiels du gouvernement autonome de Catalogne, Madrid affiche sa volonté d’empêcher à tout prix l’expression démocratique du peuple catalan. Y compris par les moyens répressifs les plus lourds, puisque des navires entiers ont été réquisitionnés pour acheminer et héberger des véhicules et des forces de police dans les ports de Barcelona et Tarragona.
Dernier épisode de l’aventure répressive menée depuis Madrid: la police autonome, placée statutairement sous les ordres de la Generalitat, a été sommée par le Ministère de l’Intérieur espagnol de se ranger sous ses ordres. Les gradés de cette force de 21.000 hommes, qui a montré sa capacité d’intervention lors des attentats terroristes du mois dernier, ont refusé d’obtempérer.
La guerilla anti-démocratique de Madrid consiste à vouloir démanteler en amont le dispositif organisationnel qui permettra la tenue du scrutin. Pour cela les perquisitions se multiplient, ainsi que le ciblage de ceux qui, selon la police espagnole, seraient les organisateurs de l’ombre, ceux qui vont permettre aux 2.500 bureaux de vote d’ouvrir avec des urnes et des bulletins pour que les citoyens puissent s’exprimer.
Certes une saisie importante de bulletins a eu lieu, seul résultat vraiment tangible de cette « chasse à l’électeur » qui, chaque jour, assombrit un peu plus l’image du gouvernement madrilène. Partout en Europe c’est une même réaction: Franco est de retour !
Mais cette saisie d’un lot de bulletins est très certainement insuffisante pour enrayer l’organisation catalane du referendum qui a probablement prévu d’imprimer plusieurs lots de bulletins stockés en des lieux secrets que la police ne réussira pas à débusquer tous. Et si les urnes sont saisies, de simples cartons feront l’affaire ! Face à un tel assaut d’agression pour empêcher la démocratie de s’exprimer, les catalans pourront répondre d’une façon ou d’une autre sans risquer d’être considérés comme attentatoires à la démocratie.
Car la force du mouvement catalan est sa légitimité démocratique, et la logique imparable de sa démarche, qui consiste à faire voter le peuple sur son avenir. Toutes les provocations en cours depuis Madrid prennent manifestement le risque de déboucher sur une flambée de violence, ce que le mouvement catalan a réussi à conjurer grâce à de nombreuses années durant lesquelles la société civile s’est structurée en bannissant la violence.
Quel peut être le bilan de ce bras de fer ? Le vote aura lieu, de toute façon, même s’il est perturbé dans certains bureaux de vote. La police ne pourra intervenir partout, et ils en seront empêchés par des manifestations citoyennes.
La Generalitat avait une crainte vis-àvis de la participation. L’action de Madrid a réglé le problème : vu l’offensive menée contre l’organisation du referendum, le seul fait de le tenir sur l’immense majorité du territoire sera une victoire politique considérable. Dans le contexte créé par Madrid, le sì sortira majoritaire des urnes du 24 septembre et le mouvement politique catalan pourra continuer sa route.
La participation reste un enjeu crucial.
Par ses gesticulations répressives, Madrid espère arriver à intimider les catalans les moins engagés. Mais le spectre du retour du franquisme risque au contraire de se révéler mobilisateur dans une opinion qui a le souvenir des années de la guerre civile.
Durant la dernière semaine, la mobilisation va s’amplifier. Dimanche 1er octobre, l’opinion internationale aura les yeux tournés vers Barcelone. La Catalogne vit des heures historiques.
François Alfonsi.