Arritti poursuit ses interviews des élus Femu a Corsica. Frédérique Densari fait partie des nouvelles élues de l’Assemblée de Corse. Très impliquée dans sa région de Balagne, elle nous livre son sentiment sur la crise que nous vivons.
Vous êtes élue depuis décembre 2017, votre impression sur cette expérience ?
C’est mon premier et unique mandat. Au moment de mon installation, la militante que j’ai toujours été a ressentie beaucoup d’émotion.
Je savais que la tâche ne serait pas simple, surtout du fait de la fusion des trois collectivités et qu’il y aurait beaucoup de travail. Il m’a fallu quelques mois pour m’approprier l’institution, me familiariser avec son fonctionnement.
Toujours en activité professionnelle, j’ai appris à gérer mon temps afin de pouvoir concilier les deux. Je prends ma tâche d’élue à coeur, c’est un travail au quotidien où il faut être à l’écoute, disponible et présente sur le terrain au contact de la population. Il ne faut pas compter son temps. Du fait de la fusion, nous nous retrouvons à siéger dans de nombreuses commissions, ce qui demande beaucoup de présence, cela s’ajoute à la vie politique de l’institution. C’est un enrichissement, il nous faut être polyvalents.
Comment vous impliquez-vous au sein du groupe ?
Je siège au sein du SIS 2B, à l’OEC, à l’OEHC, au PNRC et au Syndicat mixte du Giunsani. Membre de la commission de l’éducation, de la culture, de la cohésion sociale et de la santé, de la commission des politiques de santé et de la commission violence, je suis également présidente de la Commission pluridisciplinaire du RSA Corte/Balagne.
Mon implication : Une présence et assiduité constante en participant aux différentes réunions du groupe pour échanger nos points de vue sur les dossiers mais aussi traiter des sujets d’actualité, économiques, politiques, culturels, sociaux.
C’est un groupe où je me sens à l’aise, il y a beaucoup de solidarité entre nous et où la démocratie s’exerce sans faille, ce qui nous permet de travailler dans les meilleures conditions avec un président de groupe toujours disponible pour répondre à nos sollicitations.
La crise est sans précédent, d’un point de vue sanitaire mais aussi économique et social…
Cette crise était difficilement prévisible. Nul n’aurait imagé l’extrême violence de la pandémie.
Pendant le confinement, j’ai continué à exercer mon activité professionnelle, responsable qualité en GMS, j’ai dû mettre en place les différents protocoles sanitaires, adapter le plan de continuité d’activité à la crise et répondre de façon quasi quotidienne aux exigences sanitaires. Ça n’a pas été chose facile, cette période a été parfois très anxiogène.
L’élue a dû aussi s’adapter. Nous avons eu recours à la visioconférence, ce qui a permis d’être réactif et enchaîner tout un travail dans les différentes commissions, plus particulièrement dans la commission des politiques de santé présidée par le docteur Danielle Antonini où nous avons entamé une série d’audition avec les professionnels de la Santé. Ces réunions quasi hebdomadaires nous ont permis d’avancer en même temps que la crise sanitaire, d’alimenter l’Exécutif dans l’élaboration des différents plans présentés.
Les sessions se déroulent sous un format inhabituel mais qui a permis d’assurer la continuité de l’institution.
Pendant ces différentes périodes (confinement et déconfinement) j’ai pu lire sur beaucoup de visages les inquiétudes et questionnement tant au niveau sanitaire, qu’économique et social. Je crains que les moments que nous venons de vivre et qui je l’espère sont derrière nous, ne connaissent un deuxième épisode. La vigilance doit rester de mise.
Cette pandémie aura mis en exergue le fait que tout peut basculer très vite.
Vous vous êtes impliquée sur votre territoire en Balagne auprès des plus démunis… racontez-nous…
Face aux difficultés pour les oeuvres caritatives présentes sur le territoire de la Balagne de procéder à la distribution de denrées alimentaires, j’ai avec Pasquà Carlotti élu également à la CdC, décidé de venir en aide aux plus démunis. Les bénévoles de ces associations étant âgés et officiant dans des locaux étroits pour recevoir du public dans ce contexte de crise sanitaire ont dû cesser leur mission. Les chemins de fer de la Corse et son président Hyacinthe Vanni nous ont mis à disposition les locaux de la gare de Calvi et de Lìsula. La générosité des commerçants balanins ainsi que les nombreux bénévoles qui sont venus prêter main forte a permis la distribution de denrées alimentaires deux fois par semaine jusqu’au 11 mai, date du déconfinement.
Je profite d’ailleurs de cette occasion pour les remercier une nouvelle fois, leur aide a été précieuse.
Chaque semaine, le nombre de bénéficiaires a augmenté, en moyenne 150 paniers ont été distribués. Pour les personnes ne désirant pas faire état de leurs difficultés, des livraisons à domicile ont été effectuées dans la plus grande discrétion.
La précarité est un mal qui n’épargne pas notre région. L’activité économique quasiment à l’arrêt, a accentué cette situation. Je pense qu’il nous faut réfléchir à pérenniser et renforcer la coopération entre les différents acteurs caritatifs sur le territoire de Balagne, au service, toujours, des gens qui en ont besoin.
Comment envisagez-vous la suite ?
Cette crise nous oblige à repenser un nouveau modèle économique, un nouveau monde, revenir à l’essentiel où la place de l’humain doit être centrale. Notre modèle économique basé essentiellement sur une activité touristique étalée sur 6 mois avec une forte concentration du 15 juin au 15 septembre a montré ses limites et sa fragilité.
Nous ne devons plus subir le tourisme mais s’en servir pour construire une véritable économie basée sur la production de valeurs ajoutées en matières environnementales, patrimoniales et culturelles. Il nous faut penser une valorisation des métiers et de l’action professionnelle, former un vivier de ressources humaines avec des formations qualifiantes et des salaires à la hauteur des niveaux de qualifications, reconstruire un tissu économique basé sur des circuits courts de distribution dans le cadre d’une économie circulaire, passer d’une logique de consommation à une logique de production.
Le choc que subit le tourisme corse est un séisme économique et social qui aura des répercussions à court, moyen terme.
L’impérieuse nécessité d’agir doit être collective.
Inseme femu vince u nostru paese.