Le raidissement de l’État constaté tous ces derniers mois vis-à-vis de la majorité nationaliste ou plus largement de la société corse et de sa jeunesse, a pris une nouvelle tournure avec le vote consultatif du Comité Régional de l’Habitat et de l’Hébergement. La prise de position en faveur du rattachement de l’Office HLM de Corse du Sud à la Communauté d’Agglomération du Pays Ajaccien (CAPA) est vécue par la Collectivité Territoriale comme un traquenard de l’État, qui viole ainsi « de manière flagrante l’esprit de la loi sur les ordonnances » a dénoncé Gilles Simeoni. Contraire aux Ordonnances, contraire au droit, contraire au simple bon sens et menace au niveau social pour le bon fonctionnement d’un outil capital pour la question du logement en Corse : ce revirement est scandaleux.
Gilles Simeoni a réagi vivement dans la presse et dénoncé les reniements de l’État : « Je trouve grave la position du préfet de Corse exprimée juste avant le vote, et qui a donc pesé de façon significative sur l’issue de celui-ci. La thèse validant la demande de rattachement de l’Office Public à la CAPA est en violation flagrante de la lettre et de l’esprit de la loi.
Il est particulièrement regrettable et incompréhensible que le représentant de l’État s’en écarte et que, s’appuyant sur une note de la Direction Générale des Collectivités Locales, qu’au demeurant il ne nous a pas transmise, il vienne contredire ce qu’avaient été les engagements fermes, publics, inscrits dans la loi, du gouvernement de la France, et notamment du Ministre Baylet. »
Le texte de loi a prévu en effet qu’à compter du 1er janvier 2018, les deux offices publics départementaux devaient être rattachés à la nouvelle Collectivité de Corse. Aussi, dénonce encore Gilles Simeoni :
« la CAPA, soutenue désormais par le préfet de Corse, s’appuie sur un texte de portée générale dont elle détourne l’esprit. Un texte qui vise à permettre les extensions de compétences d’un plus petit établissement d’une collectivité vers une plus grande. C’est-à-dire d’une intercommunalité vers un département, et non pas le contraire, d’un département vers une intercommunalité. De ce fait on contourne la loi spécifique à la Corse. Je ne suis pas surpris de la demande de la CAPA, je suis affligé, atterré et même scandalisé par le fait qu’elle soit cautionné et appuyé par l’État. »
Cette attitude de l’État annonce-t-elle des raidissements plus graves encore concernant l’ensemble des engagements pris par le gouvernement dans la précédente législature? Pour Gilles Simeoni,
« c’est extrêmement inquiétant lorsque l’on met tout cela en perspective. Les premiers qui vont souffrir de cette situation anormale qui nous est imposée, ce sont d’abord les personnels et agents des deux offices, qui vont être aux plans statutaire et professionnel extrêmement hétérogènes. Et puis seront également impactées, les personnes qui ont droit ou peuvent avoir droit à un logement social, puisque le législateur, appuyé par la représentation unanime de la Corse, a voulu à travers la nouvelle collectivité engager un processus de rationalisation, de cohérence, d’équité, au niveau territorial, avec des déclinaisons très opérationnelles au niveau des territoires. Or il va y avoir notamment pour l’Office Public d’HLM de Corse du Sud qui avait vocation à continuer à exister en étant rattaché à la Collectivité de Corse, une situation totalement fractionnée, avec d’un côté la CAPA, et puis sur d’autres territoires où il y a également des logements sociaux, des statuts dont on ne sait pas ce qu’ils seront au 1er janvier 2018, donc une situation chaotique ! Aujourd’hui, la CAPA et le Conseil départemental de Corse du Sud, appuyés par le représentant de l’État, ont contourné l’esprit de la loi et ont véritablement dynamité le statut voulu par le législateur et par la Corse, dans un domaine qui est essentiel, y compris en termes d’équité et de transparence, qu’est le domaine du logement social ».
De son côté, le STC, réuni devant la préfecture avec plusieurs dizaines de salariés au moment du vote était également très en colère. Pour Dominique Biaggi, responsable du syndicat : « Il était écrit dans les Ordonnances que les deux OPH seraient rattachées à la CTC. La CAPA en a demandé la gestion pour ses seules dix communes, alors que la Haute Corse est rattachée à la nouvelle Collectivité de Corse. Des agents seront donc traités différemment, on va à l’encontre même de la loi qui cherchait à simplifier et harmoniser les choses ! De plus, si la CAPA a annoncé ne vouloir récupérer que les logements sociaux sur la région ajaccienne, que deviennent les autres logements des autres communes ? Comment va-t-on gérer ces logements dans le rural ? Que vont devenir les agents de ces autres régions ? Qui va gérer ce dossier ? »
Des questions que ni les membres du CRHH, ni la CAPA, ni le préfet, ni le gouvernement ne semblent se poser !
ARRITTI