I messaghji d'Edmond Simeoni

Macron

Edmond Simeoni désespérait de l’État et de son fossé d’incompréhensions et de mépris envers la Corse. Au lendemain du voyage du Président de la République en Corse, le 5 février 2018, il écrivait ce texte. Une analyse qui reste fortement d’actualité, y compris en ces périodes de crise si particulière qui secoue le monde entier. L’État est « sans doute irrémédiablement hostile à tout traitement politique de la question corse » disait-il. La libération de plusieurs centaines de détenus en France à l’occasion de la crise sanitaire liée au Covid19, dont sont hélas exclus les militants nationalistes en est encore une illustration. Il eut été pourtant heureux et sans risque pour l’État de faire ce geste politique.

 

Il n’y a pas d’énigme Macron concernant la Corse. Ses choix sont limpides. Le Président de la République Française est un homme pressé, affairé, ambitieux ; il voit le monde à travers le diagramme les ratios, la productivité ; il est parfaitement à l’aise à Davos et il vit les rendez-vous avec les grands de ce monde avec une jubilation manifeste. Il croit que le monde économique en particulier doit être tiré vers le haut, par des entreprises leaders performantes et qu’ainsi le cycle vertueux finira par profiter à toutes les bases.

On cherche en vain dans sa démarche générale, une once d’humanité, de compassion, de compréhension ; on a l’impression, peut-être fausse, qu’il considère les sociétés, les peuples, les entreprises, les institutions comme de simples variables d’ajustement qui doivent progressivement trouver leur juste place, grâce à l’harmonie rédemptrice du capital, des grands groupes, des financiers ! Un fantasme.

À mon sens, le lien avec la Corse est clair ; il ne connaît pas du tout le dossier et la modestie des enjeux locaux, à l’échelle mondiale, le dissuade de s’y intéresser ; mieux, son irritabilité est entière sur le sujet ; si on analyse objectivement son rapport à l’île depuis son élection à la Présidence de la République, il est rythmé par l’affirmation de non répétés, martelés et repris par toute son équipe à propos des revendications démocratiques de la Corse parce que validées par le suffrage universel.

Nous avions la candeur de croire ou on faisant semblant de croire que cette onction serait un sésame imparable. Comme Paris n’a cessé de le prêcher depuis des décennies… pour le refuser aujourd’hui.

Des questions se bousculent si on analyse la séquence récente de sa venue en Corse :

– Pourquoi a-t-il choisi pour son premier voyage officiel la date anniversaire de l’assassinat du Préfet Erignac, en présence d’une famille toujours profondément traumatisée ?

– Pourquoi a-t-il choisi de se faire accompagner par l’ancien ministre de l’intérieur M. JP. Chevènement, dont le principal titre de gloire est d’avoir validé a posteriori l’incendiaire volontaire des paillotes, le préfet Bonnet, flanqué d’un gendarme de haut rang ?

– Nous ne pouvons pas oublier que le véritable objectif de cette pantalonnade ridicule, non sanctionnée, sinon amnistiée, était de créer la guerre civile en Corse.

Heureusement que ce sinistre calcul a échoué. On comprend mieux pourquoi le staff présidentiel du voyage était dominé par un quarteron de la préfectorale, une caste, porteuse non pas de paix, mais de vengeance éternelle.

– Pourquoi aux détours de ce voyage, les éminences gouvernementales qui « dialoguent » avec les responsables de la CTC, alternent les refus, les ambiguïtés, les attitudes dilatoires ? Créant ainsi une défiance et un malaise majeurs.

– Pourquoi l’État pose-t-il sans arrêt des « lignes rouges » qui ne sont en fait que des préalables, alors que la Corse demande simplement un « dialogue sans tabou ni préalable » ; tous simplement sans doute parce qu’il bénéficie d’un rapport de force très favorable (répressif, financier, économique…) ?

Il faudrait une totale cécité pour refuser d’admettre que le Président Macron est totalement foncièrement et sans doute irrémédiablement hostile à tout traitement politique de la « question corse ». La conception et la réalisation de sa récente venue en Corse ne rentrent pas dans le cadre de la maladresse ou de l’incompréhension, mais tout simplement dans celui de la provocation.

Chacun sait qu’il ne peut y avoir de rapport humain sans qu’il existe la confiance. Nous l’avons perdue depuis longtemps. Il faut poursuivre notre chemin sans outrances, sans violences avec pour objectif un statut d’autonomie de plein droit dans la République. Le fait de se placer en dehors du droit international et des usages en la matière le laisse indifférent, comme le jugement éclairé d’une opinion publique et d’une conscience internationale, largement sensibilisées.

Construisons tous ensemble à l’intérieur de l’île et dans des partenariats avec l’extérieur – Union européenne, Méditerranée, Monde – la Corse émancipée qui permettra à notre peuple, à terme d’être libre, reconnue et de maîtriser son destin interne dans l’île. Inéluctablement. »