Les partis nationalistes européens qui sont de véritables partis de gouvernement ne sont pas si nombreux.
En voici l’inventaire.
Le plus ancien parti nationaliste européen est sans doute le PNB, Parti Nationaliste Basque, qui a présidé quasiment sans discontinuer la Communauté Autonome du Pays Basque depuis l’autonomie post-franquiste des années 80. EHBildu, coalition de la gauche abertzale qui s’est formée depuis l’arrêt de la violence politique au Pays Basque, se positionne comme une alternative au PNB désormais. Au sein de l’Alliance Libre Européenne, Esquerra Republicana de Catalunya est le principal parti de la coalition Junts pel Sì, qui gouverne la Catalogne, tout en mettant sur pied un processus d’autodétermination avec une échéance cruciale le 1er octobre prochain, date fixée par la Generalitat de Catalunya pour la tenue d’un referendum d’autodétermination. Son partenaire de la coalition, Congergencia Democràtica di Catalunya, devenue désormais Partit Demòcrata Europeu Català, a de son côté gouverné la Catalogne durant toutes les années post-franquistes.
Egalement au sein de l’ALE, très puissant en Flandres depuis une décennie, la Nouvelle Alliance Flamande (N-VA) a pris la suite du parti fondateur de l’ALE, la Volksunie. NVA est le seul parti nationaliste en Europe à exercer des compétences étatiques, au niveau de la Belgique, et, dans le cadre de cet Etat fédéral, il dirige aussi la puissante région flamande. De tous les partis nationalistes européens, il est le seul, via ses ministres en activité, à siéger au sein du Conseil des Ministres pour certaines compétences, au même titre que les représentants des autres gouvernements étatiques. Autre parti phare membre de l’ALE, le Scottish National Party a pris le pouvoir au sein de l’Assemblée écossaise depuis trois mandats successifs. Il est largement majoritaire désormais en Ecosse, et il est à l’origine du vote si différent en Ecosse par rapport au reste de la Grande Bretagne sur le Brexit (62% de oui en Ecosse contre 47% dans le reste du Royaume Uni).
Autre parti nationaliste actuellement en charge du gouvernement de l’Irlande du Nord, le Sinn Fein. Il est le seul qui soit issu d’une Lutte de Libération Nationale, et sa gouvernance équilibrée, dans le contexte si particulier de l’Irlande du Nord où le combat nationaliste a divisé la population en deux camps, républicains et unionistes, l’amène aujourd’hui à de nouveaux challenges pour maintenir le lien de son territoire avec la République d’Irlande, et donc avec l’Europe.
Car en Irlande du Nord aussi, le oui à l’Europe l’a largement emporté.
Tous ces partis ont des députés européens ; ils dirigent les gouvernements et les parlements de leurs territoires, et ils comptent des députés dans les Parlements des capitales étatiques.
Voilà ce premier cercle auquel il est possible aujourd’hui d’adjoindre un parti nationaliste corse, Femu a Corsica. Via l’ALE, le chemin pour cela sera encore plus facile. La fusion d’Inseme pè a Corsica, du PNC et de Chjama Naziunale crée la taille critique pour être une force politique de même rang. Certes, la Corse ne pèsera jamais aussi lourd en Europe que la Catalogne, le Pays Basque, l’Ecosse ou la Flandre. Et nous n’avons pas encore les structures fortes et démocratiques dont ces partis disposent, appuyés sur des années d’expérience au sein d’institutions autonomes aux pouvoirs étendus. Mais au plan du symbole politique, le pas sera franchi, nous aurons changé de dimension.
Car la visibilité que nous aurons, et à laquelle l’ALE contribuera, dans le paysage politique européen, en sera décuplée. C’est là une donnée essentielle si nous voulons alimenter le rapport de forces qui nous permettra d’arracher l’autonomie dont nous avons besoin pour le peuple corse.
La création de Femu a Corsica, pour le mouvement nationaliste corse, c’est un changement d’époque. Cela le sera également au niveau européen.
François Alfonsi
Président de l’Alliance Libre Européenne