Danielle Antonini, Présidente de la Commission Santé

« Vaincre l’épidémie tout en préparant l’avenir »

Danielle Antonini est médecin à l’hôpital La Miséricorde à Aiacciu. Elle vit au coeur de la crise sanitaire et n’en oublie pas pour autant son rôle d’élue conseillère territoriale Femu a Corsica. Une fois quitté le service, elle est encore à la tâche pour apporter des réponses à la catastrophe sanitaire au sein de la Commission Santé qu’elle préside. Ses travaux alimentent les réflexions du Conseil Exécutif. Plusieurs auditions des acteurs de la médecine sont lancées. L’objectif de cette large concertation : être au plus près du diagnostic de terrain. Elle est également très attachée à sa ville d’Aiacciu où elle siègera désormais dans l’opposition au sein du Conseil municipal.

Arritti salue à travers son investissement l’engagement de tous nos personnels soignants.

 

C omme médecin, qui plus est à l’hôpital d’Aiacciu, quel a été votre premier sentiment à l’annonce d’un cluster sur Aiacciu?

Le premier sentiment à l’annonce du cluster a été une grande inquiétude car on s’est rapidement rendu compte que cette maladie n’était pas une simple grippe et qu’elle se transformait à la vitesse grand V en pandémie. Inquiétude pour les siens dans un premier temps avec une mère très âgée, un conjoint hypertendu, une belle fille enceinte mais un deuxième temps pour soi car il fallait continuer à travailler, la boule au ventre parfois, même si on n’était pas en première ligne. Et comment oublier sa patientèle dans ce contexte sanitaire si particulier avec le risque de renoncement aux soins.

 

Comment l’hôpital s’est-il adapté à cette situation inédite et inquiétante?

L’hôpital d’Aiacciu s’est rapidement adapté à la situation avec une réorganisation complète des services et la Miséricorde est pratiquement devenue un Centre entièrement dédié au Covid.

Il faut souligner également l’importance du partenariat public/privé qui a permis la continuité des soins avec la mise à disposition du plateau technique chirurgical de la clinique Clinisud pour la réalisation d’interventions urgentes en matière de traumatologie mais aussi de carcinologie.

Et enfin, il convient de féliciter encore une fois le personnel dans sa globalité (la fille de salle comme l’infirmière, sans oublier les étudiants et les médecins) qui a su se former dans l’urgence à la prise en charge d’une pathologie émergente, à de nouvelles techniques de désinfection, de réanimation… Le tout avec courage et abnégation.

 

Aujourd’hui quelle est la situation?

La situation à Aiacciu, aujourd’hui, semble apaisée et ceci en partie dû à l’absence de nouveaux cas hospitalisés en réanimation depuis une quinzaine de jours.

L’angoisse du début se fait moins sentir et on assiste d’ailleurs depuis quelques jours à de «timides tentatives» de déconfinement précoce, quitte à en oublier parfois les mesures barrières, qui demeurent indispensables.

Et même si celui-ci est inévitable, il doit être différencié en fonction de l’impact dans les territoires et doit être régionalisé.

Tout faire à l’échelle nationale sans discernement est une erreur. On ne peut pas envisager de déconfiner en même temps et de la même manière Aiacciu et Bastia.

 

Vous êtes aussi élue conseillère territoriale et présidez la Commission Santé à l’Assemblée de Corse, quel rôle tient-elle?

Le rôle de la commission santé, est celui d’une cellule d’écoute, de réflexion et de proposition sur les différentes problématiques de la santé de l’Île. Différents sujets ont déjà été abordés comme la prise en charge intégrale des frais de transports sanitaires sur le continent français, la recherche souvent compliquée de médecins remplaçants voire successeurs, la télémédecine et le beau projet Alta Strada porté par les URPS-ML (unions des médecins libéraux de Corse), l’implantation de Pet Scan en Corse et une motion votée à l’unanimité lors de la session du 27/09/2019 et surtout l’état de la cancérologie en Corse avec un rapport qui devrait prochainement être présenté à l’Assemblée.

 

Quelles initiatives avez-vous prises?

Actuellement, la commission santé a débuté un cycle d’auditions sur la situation actuelle liée au Covid19 avec un volet santé déjà abordé, puis d’autres, dans les jours qui suivent, sur la reprise scolaire, les transports et l’économie.

Le président de l’Exécutif a d’ailleurs présenté son rapport «Vince contr’à u Covid 19» qui a fixé le cap et tracé le chemin avec quatre objectifs : sauver des vies et protéger la santé publique, renforcer la solidarité humaine et territoriale, bâtir un plan d’urgence pour aider à surmonter un choc sans précédent, véritable tsunami économique et enfin réussir un allègement progressif du confinement et vaincre l’épidémie tout en préparant l’avenir.

 

Comment voyez-vous la suite?

Le rôle d’une élue dans cette période est certes difficile avec des moments de découragement devant l’ampleur de la tâche car, ne l’oublions pas, il ne s’agit pas d’une crise mais d’une catastrophe sanitaire. Il faut continuer l’ouvrage, le but ultime étant de trouver une stratégie de lutte contre l’épidémie en intégrant un déconfinement qui devra être adapté aux spécificités de notre pays. La synthèse des travaux de la Commission devrait permettre d’apporter une pierre à l’édifice et ainsi enrichir la proposition du plan de sortie du confinement.