A Valella c’est une petite maison de A Parata, village au cœur de l’Orezza. C’est l’antre de Miché Dominici, auteur-compositeur interprète, musicien, batteur avant tout, et chanteur… une âme poète en vérité car dans ses compositions tant musicales qu’en paroles, c’est la douceur et la tendresse qui prédominent. Peut-être ses quêtes personnelles ? Ou bien le cocon où il a grandi, sans être épargné non plus par l’existence.
Il était sur la scène du Spaziu Culturale Carlu Rocchi de Biguglia ce 16 mai. Un incantu.
Miché est un paradoxe. Il a commencé par la batterie qui révèle un caractère passionné, rebelle, comme tous les batteurs qui s’éclatent avec talent sur leurs caisses et pour ceux qui l’ont connu tout petit, c’était déjà très tôt chez lui un moyen d’expression et d’escapade. Vous pouviez essayer alors de lui parler, de l’appeler, il était ailleurs, concentré sur son jouet, échappant à notre monde ! Et puis, quand il laisse sa batterie pour sa guitare, tout s’apaise, et le voilà tendre et poète… de sa voix profonde qui puise des tonalités au fond de son être intime, puis s’envole dans des sonorités plus aigües peut-être pour rechercher et suivre « l’étoile », comme disait Jacques Brel. Tel est sa quête…
Pour écouter Miché, il faut d’abord entendre sa mélodie, et sa voix s’y mêle à en faire partie, les mots viennent après, avec toute leur importance. C’est l’autre paradoxe, très attaché à sa terre de Corse, au point de s’être enfermé à A Valella, son refuge, il s’échappe encore et compose beaucoup en anglais, même s’il chante aussi en français et (trop peu) en langue corse. Il est dans la world music, l’anglais n’est qu’un instrument de plus pour lui dont il use pour atteindre de meilleures sonorités. Ça plait ou ça déplait, il faut comprendre « sa quête » et le chemin qui l’a mené jusque-là pour permettre à nos âmes torturées par plus de deux siècles de colonisation de le tolérer.
Miché, c’est d’abord un batteur, depuis de longues années, avec l’Attrachju et d’autres groupes insulaires, puis pendant quelques années avec des musiciens anglais avec qui il apprend et se forme. Enfin, il rejoint un groupe d’amis, les Four Kiks, rencontrés à Nice, qui le conduisent sur toutes les scènes du Continent et d’ailleurs, pour jouer et se construire. Il s’est ainsi forgé des amitiés extraordinaires, et baigne dans cet univers musical de solidarité entre artistes qui fait qu’un jour il accompagne, l’autre il est accompagné. Et dans ces échanges magiques, tous puisent leurs propres inspirations et leurs originalités. D’autres artistes confirmés le rejoignent et s’y affirment à leur tour comme Nicolas Torracinta, Jean-Jacques Murgia, Tim Parisot, Célia Picciochi, et bien d’autres encore qui l’accompagnent dans sa soif musicale. On a vu même du côté de A Valella des artistes de renom comme Joyce Jonathan ou Patrizia Gattacecca ! Il y tourne aussi de petites vidéos originales, et le Miché que nous connaissons aujourd’hui pour ceux qui sont séduits par son offre musicale, ou qui l’ont découvert sur la scène du théâtre de Bastia, le 18 mai 2022, ou du Spaziu Culturale di Biguglia, le 16 mai dernier, s’est d’abord révélé, nouveau paradoxe, alors qu’il était de retour en Corse, et s’est cloîtré, comme nous tous, durant la période du confinement. Il fait alors le choix de ne pas se renfermer justement. Mais au contraire de s’offrir par les moyens du net. Il se crée un univers dans la maison de ses grands-parents à A Valella, où il compose pour la première fois, joue et voyage avec d’autres, encore, chacun s’envoyant ses créations et construisant des compositions originales distribuées ensuite sur les plateformes.
Après le confinement, de studio d’enregistrement, A Valella devient résidence d’artistes où les un(e)s et les autres viennent aussi gratter la guitare et mêler leurs voix. Nouveau concept : il crée A Valella 360° qui fait découvrir aux internautes ces compositions depuis le cœur de l’Orezza… et témoigner ainsi, que depuis un petit village de Corse, peuvent se bâtir de grandes choses, musicalement parlant.
De là, avec le concours d’un paisanu di A Parata, Amatu Leoni, di core pueta anch’ellu, est née la magnifique chanson qui consacre A Valella et qu’il chante en duo avec son cousin, Romain Dominici, deux magnifiques voix !
Miché était sur scène ce 16 mai à Biguglia avec son talent pour rendre ce qu’il a reçu, partageant la scène avec nombre d’artistes, connu(e)s ou moins connu(e)s. De Patrizia Gattacecca à Clément Albertini, Nicolas Torracinta, Jean-Jacques Murgia, Nicolas Zimako, Romain Dominici, Amatu Leoni, le trio Elixir, Elisa Tramoni, Martial Paoli, Tim Parisot… C’était, parait-il, la dernière du spectacle A Valella et de cette période d’après confinement, il s’est envolé vers d’autres créations. Di mùsica A Valella… •
Fabiana Giovannini.