Hudson Institute

Thème pour le développement de la Corse (1970)

Chaque été, la population corse décuple avec l'arrivée des touristes.

La préméditation de la colonisation économique et culturelle ressort à l’évidence de ce rapport qui avait été soigneusement caché par l’État. On a compris pourquoi. L’ARC en son temps (Azzione pè a Rinàscità di a Corsica) l’a obtenu, avec mille difficultés et l’a rendu public. Il est édifiant et, en cette période de bilan, il est intéressant de montrer au Peuple Corse les intentions de l’État à l’époque. Il a d’ailleurs pris toute sa signification parce qu’il venait couronner le PAR (Plan d’action régional) de 1957, qui avait créer deux sociétés d’économie mixte : la Somivac pour l’agriculture et la Setco pour le tourisme.

La tentative de nous imposer le Schéma spoliateur d’Aménagement de la Corse en 1972 – que nos luttes déterminées, avec d’autres, ont fort heureusement mise en échec – vient éclairer le dessein de l’État. Compte tenu de son évolution actuelle négative en Corse, la nécessité nous impose de prolonger, de populariser et d’enraciner les luttes. Nous publions le commentaire préliminaire de l’ARC puis nous renvoyons nos lecteurs à la consultation du dossier complet que vous trouverez sur mon blog : www.edmondsimeoni.com

Instructif !

Edmond Simeoni.

 

 

Commentaire de l’ARC (1970)

«Il y a quelques mois, les Corses furent informés par la presse, qu’un rapport sur l’avenir du développement de l’Ile avait été établi par un organisme américain spécialisé : le Hudson Institute de New-York, à la demande de la Datar (Délégation à l’aménagement du territoire, et à l’action régionale).

Ce que l’on a su de ce rapport à l’époque provoqua la colère des défenseurs de l’ethnie Corse. On pouvait, en effet, résumer l’affaire en une formule : la Corse est promise à l’invasion touristique avec ou sans l’accord des Corses.

L’émotion provoquée par cette information incite d’administration préfectorale à jouer la courroucée.

On laissa entendre que ce rapport n’avait aucun caractère officiel et que ses conclusions n’avaient aucun intérêt. Ces propos étaient démentis par le fait que l’organisme qui avait commandé ce rapport était gouvernemental et qu’il était inimaginable que la Préfecture n’en fut pas instruite. Mais la tactique employée était bonne. Après les premiers remous on parvint à faire oublier l’affaire. Rien ne fut communiqué des véritables conclusions du rapport de l’Hudson Institute. La presse avait dû se contenter de ce qu’on avait bien voulu lui en dire.

 

L’ARC est aujourd’hui en possession du rapport complet.

Quand ils sauront que ce rapport est l’inverse de ce qu’on en avait laissé percer, les Corses ne s’étonneront plus de la discrétion officielle. Sur tous les points qui constituent le contentieux de la Corse avec l’État : exode des jeunes, défense du couvert végétal, conservation des sites, spécificité des problèmes, défense de l’identité culturelle, de la langue, de l’ethnie, le rapport rejoint, et parfois dépasse, les revendications régionalistes.

Les neuf dernières pages de ce rapport contiennent les diverses solutions que les auteurs ont envisagé pour l’avenir de la Corse.

Elles sont au nombre de quatre :

– les deux premières sont très voisines. Elles représentent le statut quo plus ou moins amélioré.

En voici la substance : rien n’est fait pour rendre aux Corses leur identité culturelle mais le tourisme est encouragé soit mollement soit jusqu’à l’invasion. Les Corses, de plus en plus minoritaires chez eux, éprouvent un sentiment grandissant et dangereux de frustration ;

– la troisième solution est séduisante : l’État fait confiance à certains Corses et les aide à relever la Corse : hypothèse improbable dit le rapport : car il y faudrait l’union de tous les Corses qui semble impossible dans les circonstances actuelles ;

– la quatrième solution donne à l’État français le rôle de promoteur éminent du relèvement de la Corse. Pour sa beauté, son histoire, ses traditions, son particularisme, la Corse est protégée dans sa nature, dans sa culture, dans son ethnie qui deviennent ainsi le véritable pôle d’attraction d’un tourisme national et international encouragé sur tous les plans. La France fait en quelque sorte de l’Ensemble Corse un monument national que l’on visite.

Ces trois solutions reviennent, dit le rapport, à deux hypothèses :

– ou bien l’État français sacrifie l’identité culturelle des Corses et leur communauté à un développement touristique qui les ignore et les envahit,

– ou bien c’est en conservant et en restaurant l’identité culturelle corse qu’on développe le potentiel de l’Ile dans le contexte corse.

Le rapport juge raisonnable, sans grands risques cette deuxième hypothèse « qui pourrait être intéressante et passionnante ». Il conseille à la Datar d’entreprendre des études complémentaires pour juger du bien-fondé de cette proposition car il y a, d’après les auteurs, des risques graves à poursuivre la politique actuelle.

Il nous reste à dire ce qu’a fait la Datar : elle a inspiré certainement et en tous cas, fait adopter par le Gouvernement, le fameux schéma d’aménagement rejeté par toutes les forces actives de l’Ile et mis en pièces par le conseil général. Ce schéma pose comme un postulat que la population de l’Ile s’accroîtra par l’immigration. Il veut améliorer le statut quo par l’invasion touristique, il méprise systématiquement l’identité culturelle de la Corse. C’est la première des deux hypothèses du rapport Hudson, celle que les auteurs du rapport considèrent comme «douloureuse, difficile et aléatoire ».

 

C’est finalement parce que, contrairement aux espoirs officiels, le rapport du Hudson Institute, malgré les imperfections et les erreurs inhérentes à tout travail de ce genre, donnait la préférence à une solution de progrès mais anti-centraliste, que l’administration, après avoir laissé publier un aspect tronqué et inexact l’a littéralement étouffé.

Ainsi s’affirme la volonté du centralisme d’écarter, de parti pris, toutes les solutions favorables à la Corse même si elles lui sont proposées par les conseillers qu’elle paie.»

 

Le rapport complet sur www.edmondsimeoni.com

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