Une résidence de création dramaturgique en langue corse voit le jour à Chigliani

Paul-Alexandre Fortini et Forteleone Arrighi (photo CNI).
Dans le cadre du Festival de l’Olmu, une résidence de création dramaturgique en langue corse s’est tenue pour la première fois du 11 au 15 novembre 2023 à Chigliani (Vicu) à l’initiative de la Compagnie du partage de minuit, avec le soutien de la Collectivité de Corse. Forteleone Arrighi nous parle de sa pièce de théâtre en langue corse « Prunu, di u to sangue prezioso » mise en scène par Paul-Alexandre Fortini, première œuvre produite lors de la résidence.

 

 

Quel est le but de cette initiative qui s’inscrit dans le festival de l’Olmu ?

Le festival de l’Olmu a plusieurs axes dont un est la programmation et la mise en avant d’artistes émergeants insulaires. Dans ce cadre, il y a un peu plus d’un an, Paul Alexandre Fortini a décidé de créer avec l’aide de la collectivité de Corse une bourse à la nouvelle dramaturgie en langue corse. Ce dispositif permet de mettre en relation, un auteur ou une autrice avec un metteur en scène ou une metteuse en scène dans le but d’écrire et de monter une pièce de théâtre en langue corse ou bilingue, afin qu’elle soit jouée au festival de l’Olmu.

 

Comment s’est déroulée la première résidence ?

La première résidence a été un moment riche à la fois artistiquement et humainement. Nous avons pu travailler sur le texte avec une méthode dite d’écriture plateau. Celle-ci consiste à mener des improvisations dirigées, des débats et des lectures avec les acteurs afin que l’auteur ait une autre vision de son texte. Pour ma part, cette méthode d’écriture plateau a été très intéressante, car cela m’a permis de voir mes personnages en action, incarnés, et j’ai pu ainsi améliorer mon texte à la lumière des idées qui ont émergé à travers ces exercices.

 

Quels sont les thèmes abordés dans la pièce ?

La pièce raconte l’histoire de trois jeunes nationalistes, qui, après un évènement traumatique et profondément violent, vont devoir se poser la question de la vengeance et de la radicalisation de leur lutte. Cette histoire est également une matrice pour aborder des thématiques qui me tiennent à cœur comme l’honneur, le concept de mort métonymique, et toute la dynamique funèbre en Corse.

 

Quelles ont été tes inspirations pour l’écriture ?

C’est la première fois que j’écris du théâtre, je n’étais pas un grand lecteur de théâtre à l’origine non plus donc mes aspirations sont assez éloignées de ce style. Toutefois, les représentations du festival cet été ont été très enrichissantes pour moi en particulier Andromaque, joué par les sœurs Sépulcre Nativi et mise en scène par Paul Alexandre Fortini. Mes inspirations plus profondes viennent beaucoup de texte que j’ai pu lire sur la Corse notamment l’incroyable livre de José Gil, entre la liberté et la terreur, mais aussi de la thèse sur le chant de la mort. Pour les aspects symboliques et philosophiques que ces deux ouvrages décortiquent, je trouve qu’ils décrivent un tableau très juste des dynamiques de pensée du peuple corse, qui oscille toujours entre la vie et la mort entre le droit et le devoir entre l’honneur et le déshonneur entre la liberté et la terreur.

 

Comment as-tu construit la pièce ?

J’ai construit ma pièce en m’inspirant de la structure traditionnelle d’une veillée funéraire dans laquelle le corps du défunt est exposé sur une tôle, une planche de bois ou la table du salon et autour de laquelle toute la société et la communauté vient rendre hommage aux défunts et dans le cas de mort violente pousser les hommes à accomplir leur devoir, c’est-à-dire la vengeance. •

Propos recueillis par Pauline Boutet-Santelli.