I messaghji d'Edmond Simeoni

Le péril mafieux

Nouveau rappel des innombrables messages que le Dr Edmond Simeoni a délivré tout au long de sa vie de militant inlassable pour la construction d’une Corse libre et démocratique. Il voyait clair depuis longtemps sur ce qu’il appelait le « péril mafieux » qui concentre de fortes inquiétudes aujourd’hui. Il en dénonçait les mécanismes mais aussi, et surtout, il appelait à la part du chemin à faire pour le peuple corse et pour son aile marchante, le mouvement national. Il alertait sans relâche sur nos responsabilités collectives, sur l’importance du socle démocratique à préserver et à faire fructifier. « Ce pays est plus menacé par la mafia dans les cinq, dix, quinze ans qui viennent que le sous-développement » disait-il avec son analyse visionnaire, et convaincu que la réponse ne pouvait être que collective.

Ce texte est extrait de son intervention qui a fait date, adressée à l’ensemble des forces politiques de l’île, et prononcée devant l’Assemblée de Corse le 1er avril 2004. Il y a 15 ans.

«Je veux vous dire simplement qu’il faut faire un effort collectif de révision de nos conceptions que les campanilismes étriqués ; qu’il faut avoir recours à des forces transcourantes, qu’il faut mobiliser la société ; qu’il faut donner de l’espoir ; qu’il faut donner du courage ; qu’il faut s’engager ; qu’il faut se respecter. Et ce ne sont pas les combines d’arrière-cour qui résoudront quelque chose. Ne croyez pas que le problème corse va être résolu par la répression. Ne croyez pas que le problème corse va être résolu par le laxisme. Le problème corse ne peut être résolu que par la concertation, par la démocratie, qu’il faut faire vivre et revivifier, par le travail collectif, par un effort de chacun sur lui-même se tenant à distance de ses propres coteries et de ses propres amis. Voilà l’effort qu’il faut faire sur nous-mêmes. « Ce qui guette la Corse, ce n’est pas de devenir une région du Tiers-Monde ou du Quart-Monde.

Ce qui guette la Corse, c’est qu’en dix, quinze, vingt ans, elle ne devienne un pays comme la Sicile. Pourquoi ? Parce que c’est un pays qui a des richesses naturelles considérables, où la violence est endémique depuis des centaines d’années et qu’elle a connu, c’est vrai, un regain contemporain depuis vingt ans.

Mais aussi parce que c’est un pays où demain, avec un marché européen extrêmement solvable, vous avez la possibilité très vite de créer une économie artificielle.

Oui, vous allez voir des héliports, des ports, des fréquentations, des sociétés de gardiennage, vous allez voir des drapeaux corses partout, mais vous aurez perdu l’essentiel : vous aurez perdu votre âme et vous aurez rendu impossible tout retour à la démocratie. Ce pays est plus menacé par la mafia dans les cinq, dix, quinze ans qui viennent que le sous-développement. Bien entendu, il y aura une Corse à plusieurs vitesses, nous le savons. Moi, je vous demande, je vous adjure, de bien comprendre que sans aucun calcul, nous vous tendons la main à toutes et à tous. »