Une conférence publique était donnée ce lundi 6 décembre au Théâtre du Palais Royal à Paris, à l’initiative de l’eurodéputé François Alfonsi et de trois autres collègues députés au parlement européen, François Xavier Bellamy (groupe PPE), Sylvie Guillaume (groupe Social-Démocrate), et Nathalie Loiseau (groupe Renew Europe). Ce qui se passe en Arménie n’est pas une affaire lointaine où l’on n’a pas prise. « Il est urgent de briser le silence et de redire avec force notre soutien au peuple arménien » expliquent les parlementaires européens qui ont adopté une résolution commune. Les souffrances du peuple de l’Artzakh interpellent la démocratie et les équilibres de la paix en Europe. Voici le discours d’introduction au débat prononcé par François Alfonsi qui décrit la situation en Arménie, son impact sur la démocratie européenne et l’action qui peut être menée pour en sortir.
« Ce qui s’est passé au Nagorno-Karabakh il y a un an à peine est d’une gravité extrême. La brutalité de l’agression contre le peuple arménien d’Artzakh par l’armée azérie et son allié turc a provoqué d’immenses souffrances, des milliers de morts et de disparus. Le combat qui a été perdu là-bas en novembre l’an dernier, c’est celui de la démocratie face à la dictature. La France, l’Europe doivent soutenir la démocratie arménienne et combattre la dictature de Bakou.
L’Europe ne peut rester indifférente. Elle a connu des dictatures à ses frontières par le passé. Il n’y a pas si longtemps, une dictature comparable à celle de l’Azerbaïdjan sévissait en Espagne avec le franquisme. Quarante ans plus tard, il en reste encore quelques réminiscences. Le franquisme a été vaincu parce qu’il a été combattu, de l’intérieur et aussi de l’extérieur par la mobilisation internationale. Sinon, il serait toujours là à nos portes.
La dictature de l’Azerbaïdjan doit être combattue de la même façon jusqu’à ce que la démocratie s’impose. Cette démocratie ne sera effective, et reconnue comme telle, qu’à condition de respecter pleinement les Droits de l’Homme, et aussi les droits du peuple arménien. Voilà le message que nous voulons adresser ce soir.
Comment parvenir à faire triompher la démocratie dans cette partie du monde ? Pourquoi faut-il s’y engager ?
Il faut s’y engager parce que nous sommes l’Europe, et parce que l’Arménie est dans le voisinage immédiat de l’Europe, comme l’étaient hier les Etats baltes écrasés par la dictature soviétique. Chaque fois qu’une dictature reculera dans le voisinage de l’Europe, la démocratie européenne sera renforcée et mieux sécurisée.
Avec l’Arménie, nous partageons une même appartenance au Conseil de l’Europe, et le même respect des Droits de l’Homme, et de la Cour Européenne des Droits de l’Homme. La Turquie et l’Azerbaïdjan violent ces droits fondamentaux ; ils sont plusieurs fois condamnés pour cela. Mais, parce que ce sont des dictatures désormais, ils refusent les décisions de justice de la CEDH.
Il ne s’agit pas bien sûr de fomenter des guerres, d’ajouter du conflit au conflit, de la violence à la violence. Mais si le reste de l’Europe et du monde était resté inerte, l’Espagne serait toujours franquiste, et les États baltes seraient encore soviétiques !
La France et l’Europe ne peuvent rester inertes face à, ce qui se joue en Arménie, tout particulièrement dans l’enclave territoriale du Nagorno-Karabakh. La France est un des trois co-Présidents du groupe de Minsk qui avait été créé pour éviter de nouvelles guerres. Elle ne peut rester en arrière. Nous devons nous engager, apporter davantage de solidarité et peser pour faire reculer la dictature au pouvoir à Bakou.
Cette dictature, comme toutes les dictatures, veut effacer les langues et les cultures qui expriment leurs différences. Nous devons empêcher l’Azerbaïdjan de « nettoyer » l’héritage culturel arménien dans les zones dont il a pris le contrôle.
La dictature veut humilier sans fin celui qu’elle domine, et les prisonniers de guerre sont un enjeu majeur pour cela. Leur libération ne renversera pas le sort de la guerre, mais elle soulagera l’humiliation de celui qui subit l’oppression.
La dictature azérie veut certainement « finir le travail », s’emparer de tout le Nagorno-Karabakh, et faire main basse sur des pans entiers du territoire arménien. Il faut l’en empêcher et on ne peut tout attendre de la force d’interposition actuelle de la Russie.
L’Europe peut user de l’arme des sanctions diplomatiques et économiques. Elle en a les moyens car elle est une grande puissance économique mondiale, et parce qu’elle est un débouché essentiel pour les productions azéries, notamment en matière d’énergie qui en sont la plus grande composante. L’Europe a les moyens de mettre en place une dissuasion économique à l’encontre des dirigeants de Bakou. Elle contribuera ainsi à contenir ses intentions agressives.
C’est une nécessité vitale pour que l’avenir de l’Arménie, du Nagorno-Karabakh, et du peuple arménien en général, ne soit pas un avenir d’incertitude et de peur.
Le peuple arménien a le droit de vivre dans la Paix et la sécurité.
La France et l’Europe ont une grande responsabilité à cet égard.
Ils ne doivent se dérober ! » •