La seconde vague de la pandémie Covid-19 nous laisse en pleine incertitude alors que le nouvel an a été fêté sur fond de couvre-feu. Que d’incertitudes alors que l’année commence à peine ! On espère dans le vaccin, mais on voit bien que son déploiement ne va pas de soi. On attend un plan de relance économique en vue du « monde d’après », mais on n’arrive pas à se dépêtrer d’une contagion rampante qui ne demande qu’à rebondir au premier relâchement. Décidément, 2021 commence sous de bien mauvais auspices.
En théorie, il faut immuniser les deux tiers d’une population pour qu’une épidémie ne puisse plus se transmettre et finisse par s’éteindre.
Au premier janvier, environ trois millions de malades atteints par la Covid ont été recensés en France (5 % de la population totale, bien loin des 66 %) ; 300.000 d’entre eux ont été hospitalisés (10 %) ; 60.000 en sont morts (2 %). Aussi, pour que soient immunisés sans recours aux vaccins 40 millions de français après avoir contracté une forme bégnine de la maladie, il faudrait se résoudre à accepter encore 750.000 morts, dont plusieurs centaines en Corse ! Et il faudrait, au rythme actuel, plusieurs années passées à confiner/déconfiner au rythme de la saturation hospitalière. Sans compter que le virus évolue et mute, et qu’un malade touché par une des souches ne serait pas nécessairement immunisé contre une de ses variantes, et pourrait donc rechuter.
Cette simple photographie des données chiffrées situe l’importance des espoirs mis dans la vaccination massive, seule façon possible, dans un délai raisonnable, d’arriver à une proportion suffisante de population résistante au virus, ce qui en bloquerait enfin la propagation.
Mais après les masques introuvables du printemps, voici venu le temps de la vaccination au compte-gouttes géré par une administration de la santé qui incarne toutes les carences de l’État jacobin paralytique qu’est la France.
Pour des raisons qu’elle ne sait expliquer, si tant est qu’elle les comprend elle-même, l’administration française a vacciné à grands renforts de médiatisation une centaine de patients triés sur le volet, quand dans le même temps, l’Allemagne en a vacciné des centaines de milliers ! Le comble du ridicule échappe aux images des caméras des télés qui ont dépêché sur place beaucoup plus de journalistes et cameraman qu’il n’y avait de patients à filmer en train de se faire vacciner devant les Ministres venus parader.
Le temps perdu se rattrapera-t-il demain ? Formons-en le vœu puisque nous sommes en ce début d’année. Mais décidément cette crise du Covid-19 est révélatrice de l’impotence étatique française.
Peut-on espérer parvenir à vacciner beaucoup dans un délai suffisamment bref ? Le Royaume Uni qui vaccine à tour de bras avance au rythme de deux millions par mois. Dans quatre mois, même si la France se hisse à ce niveau d’efficacité, on sera encore bien loin du compte alors que commencera la saison touristique. D’où l’importance pour la Corse, devenue « verte » sur les cartes de propagation du virus, de poursuivre avec efficacité la politique du « green pass » que lui permet sa situation insulaire.
Encore faudra-t-il la libérer du carcan jacobin qui en impose une organisation kafkaienne ! Faire simple et efficace consisterait à demander au voyageur de présenter un test Covid-19 récent en même temps que sa carte d’identité au moment de son embarquement dans un avion ou un bateau, qui sont les deux seuls moyens pour gagner une île. Et de lui refuser l’embarquement s’il ne peut en justifier.
Au lieu de ça, au nom des prérogatives de l’État régalien, on oblige à ne contrôler à l’embarquement qu’une attestation sur l’honneur que la vaccination a bien eu lieu, et on délègue aux CRS le soin de contrôler les tests des voyageurs à leur arrivée, ce qui, en cas d’infraction, rend les choses encore plus compliquées pour tout le monde, autorités comme contrevenants.
Ce dispositif extraordinairement lourd et ridicule a un seul avantage : donner au Préfet le privilège de parader devant les caméras télé flanqué de CRS dans les aéroports et les ports insulaires, pour faire passer un message subliminal qui est manifestement sa priorité : c’est l’État qui dirige la Corse, et non l’Exécutif élu par le peuple corse.
Nous voilà donc renvoyés quarante ans en arrière, « au bon temps des colonies » !
La Corse, frappée par la crise de façon aggravée puisque le recul de son PIB est deux fois plus fort que la moyenne nationale, n’avait pas besoin de ça ! •