Pacte des îles, stratégie Méditerranée

Deux dossiers essentiels pour l’avenir de la Corse

La venue en Corse de Younous Omarjee, député européen réunionnais, président de la commission du Développement régional du Parlement européen, auteur du rapport appelant l’Europe à adopter un « pacte pour les îles », et de Antonì Vicens i Vicens, directeur des relations extérieures du gouvernement des îles Baléares, a été l’occasion de faire le point sur une démarche très importante, initiée au Parlement européen, afin de renverser la doctrine négative des autorités de l’Union européenne sur la question des îles. À la veille de la présidence espagnole, qui couvrira le second semestre de l’année 2023, cette manifestation poursuit la mobilisation pour que ce dossier progresse enfin.

 

 

Un autre dossier vient renforcer cette démarche collective qui unit les rivages de la Méditerranée. Ce 9 mai 2023, en séance plénière à Strasbourg, le Parlement européen a adopté à une très large majorité le rapport que j’ai présenté afin que l’Union européenne s’engage dans l’espace méditerranéen en y prenant l’initiative d’une stratégie macro régionale comme il en existe déjà en mer Baltique, dans l’espace alpin, ou dans la vallée du Danube.

Pour chaque île de Méditerranée, les deux dossiers sont liés. Sans une approche spécifique des espaces insulaires, elles seront marginalisées par les politiques européennes, et elles resteront cantonnées à une mono activité touristique. Et sans une stratégie globale à l’échelle de la Méditerranée, définissant des politiques publiques coordonnées, elles seront impuissantes alors que la situation se dégrade de façon continue sur les enjeux environnementaux : rejets de plastiques en mer, pollution par hydrocarbures issus de dégazages sauvages du fait d’un trafic maritime qui ne cesse de croître, perte de biodiversité sous l’effet cumulé du réchauffement climatique et de l’augmentation de la pression humaine, résidents permanents comme fréquentation touristique. La question des posidonies, trésor écologique majeur, endémique au bassin méditerranéen, est emblématique de l’importance d’une approche européenne coordonnée pour enrayer leur dégradation et amorcer la restauration des surfaces déjà détruites, que ce soit par la pollution côtière ou par l’effet d’une plaisance débridée.

 

Concernant une approche européenne spécifique pour les îles, l’obstacle principal tient à un statu quo qui, comme tous les conservatismes, oppose son inertie. En tout premier lieu, une évidence : ni l’Autriche, ni la Tchéquie, ou d’autres États qui sont sans façade maritime, ne sont disposés à s’emparer de la question des îles ; et pas même l’Allemagne ou la Pologne dont la façade maritime ne comporte aucune île.

Durant ces cinq années, le Parlement européen a été très actif et, par leurs votes, les députés européens, de tous les groupes et de tous les pays, ont su dépasser ces considérations. Il faut maintenant entraîner les États qui constituent le Conseil européen dans la même prise de conscience !

Pour ce faire, la fenêtre politique est bien mieux ouverte dès l’instant que la présidence du Conseil de l’Union européenne est le fait d’un État directement concerné. Ce sera le cas dès le premier juillet prochain avec l’Espagne. Le gouvernement autonome des Îles Baléares mène un lobbying très actif auprès de son gouvernement pour que l’Espagne mette cette question à l’agenda de sa présidence. Encore faudra-t-il que d’autres États l’appuient fortement, au-delà des deux États insulaires (Chypre et Malte), et de la Grèce traditionnellement en pointe. Obtenir l’implication de la France, concernée à travers la Corse, est à cet égard très important. Il faudra que ce point soit à l’ordre du jour du processus de Beauvau lors de sa prochaine réunion. •