Corse, Catalogne :

Et après ?

En Corse, quelle direction prendra Emmanuel Macron ?

Après l’échec de la démarche menée par les Présidents de l’Exécutif et de l’Assemblée de Corse à Paris, une grande manifestation aura lieu 48 heures avant qu’Emmanuel Macron ne tienne son discours dans le cadre de la visite officielle qu’il a décidé à l’occasion du 20e anniversaire de la mort du Préfet Erignac.

 

Les neuf premiers mois de la présidence d’Emmanuel Macron à l’Elysée ont été ceux d’une démarche attentiste, soucieuse avant tout de limiter l’ampleur de la victoire annoncée du mouvement nationaliste en Corse, d’abord aux législatives, puis aux territoriales du mois dernier. Sur ce plan, l’échec est flagrant, et les 56,5% réalisés par Gilles Simeoni et sa liste le mois dernier s’imposent à lui.

Dans une manifeste précipitation, après le 10 décembre, un membre du gouvernement, Jacqueline Gourault, a été promue «Madame Corse » et a fait sa première visite officielle début janvier pour évoquer la réforme constitutionnelle en cours, à laquelle pourrait se raccrocher une évolution de la Constitution concernant la Corse. Son retour a Paris a été fracassant, Jacqueline Gourault s’est contredite elle-même, et la position affichée par le Premier Ministre a été ostensiblement réservée, voire davantage. Le rendez-vous qui a suivi avec le Président du Sénat a confirmé ce dont on se doutait ; la réforme constitutionnelle est sur les rails, et ce qui en sortira pour la Corse sera au mieux homéopathique, comme l’a délibérément exprimé Gérard Larcher.

 

Pourtant, le Président de la République vient de montrer, à propos de Notre Dame des Landes, qu’il n’est pas aussi psycho-rigide que beaucoup de ses prédécesseurs et qu’il peut, en rupture avec ses positions affichées en campagne électorale, rendre une décision tout à fait différente. Quoi qu’il en soit après le 6 février, tout restera fragile. Le chemin d’une réforme constitutionnelle satisfaisante ne sera pas vraiment dégagé même si Emmanuel Macron y met du sien. Le passage par le Congrès présuppose un accord avec le Sénat, et il n’y a pas que la question corse qui soulève des difficultés pour cela. L’alternative au Congrès est le referendum et le risque est grand que la question posée aux électeurs ne soit simplificatrice à l’extrême, évacuant la question corse.

 

Pour Gilles Simeoni et son Exécutif, et, au delà, pour Femu a Corsica dans son ensemble, il faudra encore et toujours conforter le rapport de forces avec l’État. À rombu di luttà, forse un ghjornu venerà ! En Catalogne, quelle sera la décision finale du mouvement catalan ? Vouloir investir Puigdemont au nez et à la barbe du pouvoir néo-franquiste, c’est résister ! Mais le scénario madrilène est écrit d’avance : arrestation, dissolution, nouvelles élections. Et donc prendre le risque de perdre le plus grand acquis de ces dernières semaines, à savoir la majorité absolue des sièges obtenue le 21 décembre dernier. Au moment d’écrire cet édito, de séance ajournée en discussions acharnées, les trois partis indépendantistes évaluent l’option la meilleure, ou plutôt la moins mauvaise.

En trente années d’autonomie, ils ont déjà beaucoup fait, et la reprise en main des institutions par Madrid peut remettre en cause leurs acquis à la vitesse grand V : catalan minoré dans les programmes scolaires, police catalane mise au pas du Ministère de l’Intérieur madrilène, etc.

 

La passe d’armes entre le peuple catalan et l’Etat post-franquiste espagnol restera à tout jamais dans l’Histoire. Puigdemont, malgré les pressions de Madrid, reste et restera le Président légitime de la Catalogne. Le reste ne sera que péripéties pour s’adapter au contexte d’un Etat obstinément fermé au dialogue et bénéficiant du soutien des États européens qui enferment l’Union dans le carcan de l’Europe des États.

Mais le peuple catalan a d’ores et déjà bousculé l’ordre établi, et il est évident que les millions de citoyens qui ont choisi l’indépendance n’y renonceront plus.

En Corse comme en Catalogne, la lutte continuera, quel que soit le pouvoir auquel il faudra s’affronter.

François Alfonsi.

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